L'Agence spatiale européenne décide en , sur proposition de la France, de développer une version plus puissante du lanceur Ariane, permettant de placer 4,17 tonnes en orbite géostationnaire et d'effectuer des lancements doubles. L'objectif est de mettre en service cette nouvelle version en 1986 de manière à pouvoir répondre aux besoins de la nouvelle génération de satellites de télécommunications.
Le CNES est maître d'œuvre et l'Aérospatiale l'architecte industriel. La plupart des composants sont confiés à l'Aérospatiale et DASA dont les activités spatiales ont été intégrées en l'an 2000 au sein d'EADS Astrium. Les moteurs sont fournis par la SEP intégrée à SNECMA en 1997, à l’exception des propulseurs à poudre PAP fournis par SNIA-BPD. La case à équipement est réalisée par Matra[2].
Les installations de lancement à Kourou sont agrandies : en effet, d'une part le premier complexe de lancement ne permet d'effectuer que 6 tirs par an, alors qu'il est prévu dans le futur une moyenne de 10 tirs par an ; d'autre part les propulseurs d'appoint liquide ne peuvent être montés dans les installations existantes. L'ESA autorise en l'édification d'un deuxième complexe de lancement, ELA 2, pour un coût de 153 millions d'euros. Avec ELA 2 le déroulement du montage de la fusée et son lancement sont profondément modifiés pour limiter les conséquences d'une explosion au décollage et surtout réduire le délai entre deux tirs, le bâtiment d'assemblage est construit à près d'1 km de l'aire de lancement et le lanceur est amené sur le lieu de décollage posé sur une table de lancement qui se déplace sur des rails. Grâce à ces nouvelles installations, le délai entre deux tirs peut être réduit théoriquement de 28 à 18 jours.
Arianespace commande un premier lot de 23 lanceurs en 1987 pour la somme de 10 MdF, puis en 1989 un second lot de 50 lanceurs pour une commande record de 18 MdF. Quatre autres commandes suivront en 1995 (5 lanceurs), 1996 (10 lanceurs), et deux en 1997 (10 et 20 lanceurs)[3].
En 1990, Ariane 4 réalise sa première mission héliosynchrone (vol V-35) et connait son premier échec (vol V-36), qui sera suivi par deux autres en 1994.
Le record de transfert en orbite géostationnaire est établi en 1998 par une Ariane 44L (V-113) avec AFRISTAR et GE-5 pour une masse 4 946 kg[3].
Elle termine sa carrière le avec Ariane 44L (V-159), remplacée par Ariane 5 qui permet d'emporter des charges plus lourdes.
Il y eut trois échecs : le Vol 36, où un technicien a oublié un chiffon dans une conduite d'eau d'un moteur Viking du premier étage[7], le Vol 63 lorsque la turbopompe d'oxygène liquide a surchauffé et s'est rompue, et le Vol 70 quand une fuite ou une obstruction (non déterminé par l'enquête) de la canalisation d'oxygène liquide en amont de la turbopompe entraîna une baisse de puissance du moteur[8]. Malgré ces ennuis, ce lanceur affiche un taux de fiabilité supérieur à 97 %.
Ariane 4 est la version la plus produite des lanceurs Ariane. C'est cette version qui permit à l'Europe de devenir un acteur majeur des lancements de satellites commerciaux détenant jusqu'à 60 % du marché mondial[9]. De 1995 à 2003, Ariane 4 a enchaîné 74 lancements successifs réussis, ce qui constituait un record pour un lanceur commercial [10] jusqu’au vol VA 233 en novembre 2016, qui permit à Ariane 5 de battre ce record.
Variantes
Le lanceur était commercialisé dans six configurations différentes permettant de lancer un ou deux satellites en orbite de transfert géostationnaire (GTO) avec une masse totale de 2 100 kg à 4 950 kg. Il possédait selon les versions des propulseurs supplémentaires (zéro, deux ou quatre) de types variables : à propergol liquide (symbolisés par la lettre L), ou bien à propergol solide (également qualifiés de « à poudre » ; symbolisés par la lettre P). Il en résultait ainsi les versions :
Ariane 4 possède une architecture à trois étages, similaire aux précédentes versions des lanceurs Ariane (Ariane 1, Ariane 2 et Ariane 3).
Propulseurs d'appoint
Des propulseurs d'appoint à carburant liquide ou solide pouvaient être associés au premier étage, offrant une souplesse supplémentaire avec différentes versions utilisables selon la charge à emporter[12].
Les propulseurs d'appoint liquide (PAL) utilisaient un moteur Viking 6 consommant les mêmes carburants que les premiers et deuxièmes étages :
Les propulseurs d'appoint à poudre (PAP) d'Ariane 4 étaient dérivés de ceux d'Ariane 3, allongés de 2 m :
masse d'ergols : 9,5 tonnes ;
longueur : 12 m ;
diamètre : 1 m ;
poussée au niveau de la mer : 650 kN ;
temps de poussée : 33 secondes.
Le premier étage L220
Le premier étage était construit par l'Aerospatiale, et les moteurs par la SEP. Par rapport aux versions précédentes d'Ariane, le premier étage fut allongé lui permettant d'emporter jusqu'à 227 tonnes d'ergols. La puissance des quatre moteurs Viking fut légèrement augmentée délivrant une poussée totale au niveau de la mer de 2 718 kN[10].
Différentes configurations existaient suivant le modèle d'Ariane 4 :
Configurations du L220
Modèle
Masse d'ergols
Temps de poussée
A40
167,5 tonnes
150 secondes
A42L
201 tonnes
181 secondes
A42P
217,2 tonnes
196 secondes
A44P/44LP/44L
227,1 tonnes
205 secondes
Dimensions :
longueur : 18,6 m
diamètre : 3,8 m
Le deuxième étage L33
Le deuxième étage était intégré par MBB-ERNO, devenu DASA, en Allemagne, les moteurs fournis par la SEP et les réservoirs par Dornier. Il fut peu modifié par rapport aux précédentes versions d'Ariane. Sa structure fut renforcée pour supporter les efforts supplémentaires liés à l'augmentation de la charge utile et à la coiffe plus grande. Quelques équipements furent également modifiés[12]. Il était propulsé par un moteur Viking 4B.
Caractéristiques du L33 :
masse d'ergols : 34,6 tonnes ;
longueur : 11,61 m ;
diamètre : 2,6 m ;
poussée dans le vide : 798 kN ;
temps de poussée : 125 secondes.
Le troisième étage H10
Ariane 4 reprend l'étage H10 des Ariane 2 et 3. Il est construit par Aérospatiale, les moteurs fournis par SEP et les réservoirs par Air liquide. Sa structure fut renforcée de la même manière que l'étage L33. Il était propulsé par un moteur cryogéniqueHM-7B (désormais utilisé au niveau de l'étage supérieur du lanceur Ariane 5 ECA).
Par rapport aux précédents lanceurs Ariane, la coiffe était entièrement nouvelle pour permettre les lancements doubles. Elle se décomposait en deux parties, la partie basse appelée SPELDA (pour Structure porteuse externe de lancement double Ariane) et d'une partie haute simplement appelée coiffe. Chaque partie existait en trois tailles différentes pour s'adapter aux différents satellites. Les deux parties se séparaient en utilisant un dispositif pyrotechnique. En cas de lancement simple, seule la coiffe était utilisée.
La partie SPELDA était construite par BAe et la coiffe par Contraves[10].