Le Chemin navarrais commence à la stèle de Gibraltar (Xilbaltarreko hilarria en basque), à Uhart-Mixe, en amont d'Ostabat, où finissent la Via Turonensis, la Via Lemovicensis et la Via Podiensis, un point de jonction des trois itinéraires venant de Tours, Vézelay et Le Puy-en-Velay. Il fini à Puente la Reina, symboliquement à l'endroit où une statue moderne du pèlerin, érigée en 1965, porte une plaque rappelant qu'ici le « Camino aragonés » et le « Camino navarro » se fondent en un seul « Camino francés », le chemin français[1]. Géographiquement, la jonction est faite à la place des Fors d'Obanos où se situe la porte ou arche médiévale et l'église de Saint-Jean-Baptiste.
Au sens le plus strict, le Camino navarro peut partir soit du pied espagnol du col de Roncevaux ou puerto de Ibañeta (possible localisation du « col de Cize »[2]), pour rejoindre Puente la Reina. Au sens large, le Camino navarro, débute au pied français du franchissement des Pyrénées, c'est-à-dire initialement à Saint-Michel et aujourd'hui et plus fréquemment à Saint-Jean-Pied-de-Port pour des questions pratiques et logistiques; voire dès l'entrée en Basse-Navarre[3], territoire qui faisait autrefois partie du Royaume de Navarre.
Itinéraires jacobites en Basse-Navarre et en Navarre
À travers l'analyse des voies de pèlerinage médiévales, Le Guide du Pèlerin du XIIe siècle est un ouvrage de référence sur les chemins de Saint-Jacques qui décrit brièvement les itinéraires convergeant vers Ostabat et Puente la Reina[4]. Cependant, la préposition latine « ad » utilisée dans ces descriptions, signifiant « près de » ou « en direction de », suggère que les chemins ne se rejoignent pas directement à Ostabat mais se rapprochent plutôt de cette localité: ad Hostavallam coadunanturet ad Pontem Regine sociantur[5].
Le carrefour autour du Mont Saint-Sauveur de Saint-Palais était un point crucial où se croisaient plusieurs voies jacobites. Les observations des voies pavées autour de la maison Aincy à Uhart-Mixe et des traces d'un gué dans la Bidouze indiquent un réseau de chemins au sud de la colline. Parmi ces chemins, il y a l'Arzen bidia[6], le Jakobe bidea[7] et le chemin de Garns, appelé Arte bidia[8]. Le carrefour de Saint-Sauveur, marqué par une stèle, reste un point névralgique où se rejoignent plusieurs itinéraires importants, notamment ceux menant à Ostabat et au prieuré-hôpital de Haranbeltz. Ce réseau est en partie aligné avec les routes des Guides du Pèlerin et les voies d'accès en Navarre.
Malheureusement, de nombreuses sections de ces anciens chemins ont disparu en raison de l'expansion agricole et du remembrement des parcelles, rendant les gués souvent méconnaissables. Cependant, le carrefour de Saint-Sauveur ou de Gibraltar est toujours présent en limite d'Uhart-Mixe, Larribar et Saint-Palais, et reste un point clé de rencontre et de transit pour les pèlerins[5]. Les hôpitaux médiévaux d'Ostabat, tels que Nostre Done Sainte Catherine et Saint-Antoine, étaient situés à des intersections stratégiques, facilitant les connexions avec divers itinéraires de pèlerinage. Après Ostabat, l'étape d'Utziat reliait également d'autres chemins historiques, démontrant l'importance continue des routes autour du Mont Saint-Sauveur jusqu'à la chapelle d'Ibañeta[5].
Le chapitre premier du livre V du Codex Calixtinus d'Aimery Picaud, intitulé postérieurement par sa traductrice Jeanne Vieilliard : Le Guide du Pèlerin de Saint-Jacques-de-Compostelle, indique : « La route qui passe par Sainte-Foy, celle qui traverse Saint-Léonard et celle-qui passe par Saint-Martin se réunissent à Ostabat et après avoir franchi le col de Cize, elles rejoignent à Puente la Reina celle qui traverse le Somport ; de là un seul chemin conduit à Saint-Jacques. »
Les péages de Saint-Palais, Ostabat, et Saint-Jean-Pied-de-Port étaient significatifs pour les pèlerins médiévaux. Les documents historiques, tels que le sauf-conduit accordé à Guillaume, archevêque d'Arles, montrent que le péage était un aspect important du voyage. Les droits de péage variaient selon les villes, et des témoignages comme celui d'Arnold Von Harff révèlent les coûts élevés et les pratiques parfois considérées comme abusives par les pèlerins[5].
À travers divers documents historiques, plusieurs caractéristiques abordées, et son importance historique dans le contexte des routes jacobites :
Les legs aux Hôpitaux: En 1312, Arnaud Raymond, vicomte de Tartas, lègue des fonds aux hôpitaux le long de la route de Roncevaux à Bordeaux, incluant ceux de Haranbeltz et Lagarrage à Saint-Palais. Il précise des dons pour l'entretien des hôpitaux à chaque entrée de ville sur le chemin, avec des montants variés pour ces établissements et les églises locales.
Donations et Péages: En 1232, le comte de Toulouse fait une donation à l'hôpital de Roncevaux, et en 1263, le comte de Poitiers confirme cette donation. Les péages sur le chemin sont également mentionnés comme source de revenus pour les hôpitaux.
Itinéraires de Bruges: Les Itinéraires de Bruges (XVe – XVIe siècles) détaillent les routes de pèlerinage à travers l’Europe, incluant la route de Bordeaux à Roncevaux et les étapes importantes en Navarre comme l'hôpital Lagarrague de Saint-Palais.
Carte des Itinéraires Européens: La carte de Martin Waldseemüller (1511) montre les principaux itinéraires européens vers Compostelle, incluant les routes par Bordeaux et Roncevaux. Les chemins de pèlerinage sont divisés en routes du haut et du bas, avec des tracés spécifiques pour chaque itinéraire.
Union des Chemins à Obanos: À Obanos, les chemins venant de Roncevaux et du Somport se rejoignent. Obanos devient un lieu clé pour les pèlerins, avec une légende associée à Guillaume d'Aquitaine et des éléments culturels et religieux qui marquent cette jonction.
Chemin de Frankua: Le Frankua bidea, ou chemin de Frankua, traverse la sierra del Perdón et est relié à la route française. Il est mentionné dans un testament de 1284 et correspond à l'actuel Camino francés.
Archives Privées: Les archives de la maison Rebole montrent l'évolution du tracé du chemin royal de Pampelune à Puente la Reina et confirment la continuité de ce chemin à travers les siècles.
Chemin d'Euñate: Traditionnellement appelé « camino de Eneriz a Puente », passe par Obanos, montant vers l'ermitage Saint-Sauveur et le calvaire. Il se rejoint avec un autre itinéraire à cet endroit. Ce chemin traverse la pente d'Elizapea, sous l'ancienne église et l'hôpital, et dessert le cimetière actuel en direction de la chapelle de Euñate. Le chemin est particulièrement significatif car il encercle le village d'Obanos, un aspect visible dans les cartes avant l'expansion urbaine moderne. Le chemin de Euñate est lié à des zones topographiques spécifiques, comme le ravin de Bicupea, situé au sud d'Obanos. Le nom Bicupea pourrait dériver du latin et du basque, signifiant « sous les figuiers ». Le chemin est également associé au quartier Ingoien (au nord d'Obanos) et à la topographie environnante, comprenant le ravin Elizapea et la montagne du Pardon[5].
Patronage de Saint-Sauveur: Saint-Sauveur est un vocable commun à plusieurs lieux de pèlerinage, notamment à Obanos et Saint-Palais. Il marque des carrefours importants sur les routes jacobites. Le nom Saint-Sauveur est également associé à plusieurs sites de pèlerinage au Pays Basque et dans les Pyrénées, suggérant une ancienneté et une importance historique dans la christianisation de la région. Le nom de Saint-Sauveur apparaît dans divers lieux, tels que la chapelle de Saint-Sauveur au col d'Ibañeta, ainsi que dans d'autres sites en Basse-Navarre et au-delà. Ce vocable pourrait symboliser des points de rencontre importants pour les pèlerins et marquer des lieux où des cultes païens ont été remplacés par la christianisation[5].
Les étapes et points de passage
Cet itinéraire possède quelques alternatives historiques ; de nouvelles variantes sont également tracées de nos jours par les collectivités locales et les organismes de randonnée, pour s'adapter aux évolutions de l'urbanisation et du tourisme notamment.
El puente de la rabia (Le pont de la rage) à Zubiri.
Alto del Perdón
C'est historiquement au niveau d'Obanos que se faisait la jonction avec le Camino aragonés, continuité de la Via Tolosane, et que s'achève le regroupement des quatre chemins partis de France avant leur passage sur le Pont de la Reine. Aujourd'hui, c'est plutôt la ville touristique de Puente la Reina qui est considérée comme le point de jonction des chemins et la fin du Camino navarro.
↑Jeanne Vielliard, Le Guide du Pelerin de Saint-Jacques de Compostelle; Texte Latin du XIIe siècle, édité et traduit en français d'après les Manuscrits de Compostelle et de Ripoll, Paris: Librarie Philosophique J. Vrin, 1984, 152 or. (ISBN8478462503)
↑ou chemin des bergers, descendait du sommet et traversait la Bidouze près de la maison Lahiria à Saint-Palais
↑ou chemin de Saint-Jacques, passait par le gué de Quinquil avant d'atteindre le pied de la colline
↑reliait Saint-Palais aux territoires environnants, séparant Saint-Palais d'Orsanco
↑Le col de Lepoeder est l'un des points culminant du chemin de Compostelle, à 1 429 mètres d'altitude, juste derrière le passage des Montes de León à plus de 1 500 mètres, en Castille-et-León.
• nnn (... km) = point d'entrée nnn dans la province et distance minimale de ... km jusqu'à Santiago.
(... km : col à hhh m) = distance de ... km à Santiago et passage d'un point haut à hhh mètres.
(... km : j. ccc ) = distance de ... km à Santiago et jonction avec le chemin jacquaire ccc.
| = séparateur de jalons ordinaires.
|(municipio)> = entrée dans un municipio complexe (nom du municipio), c'est à dire dans un concello en Galice, ou dans un valle ou un cendea en Navarre bascophone jusqu'à Cizur Menor.
|| = départ d'une ou plusieurs variantes ; (fin var.) = fin d'une ou plusieurs variantes et retour sur itinéraire unique.
(hc : . km) = écart de . km aller, hors chemin.
(var. nnn : + .. km) = variante nnn qui rallonge de .. km au total.
nnn (... km) • = point de sortie nnn de la province et distance minimale de ... km jusqu'à Santiago.