La Constitution de la République de Madagascar[2] organise le fonctionnement de la République de Madagascar depuis la IIIe République, garantit un certain nombre de droits aux citoyens et oriente les buts sociaux de sa politique. La version actuellement en vigueur est la deuxième constitution de la République de Madagascar, après celle de 1992, et la quatrième loi fondamentale républicaine malgache. Elle a été adoptée à la suite d'un référendum tenu le 17 novembre 2010 et proclamée le 11 décembre de cette même année, et faisant entrer le pays dans sa IVe République. La toute première constitution du pays datait de 1959.
La Constitution de 2010 accorde au président de la République un poids institutionnel très important. Nonobstant, elle ne remet nullement en question le caractère parlementaire du régime : en effet, à l'instar de la constitution précédente, celle de la IVe République demeure fondée sur une séparation souple des pouvoirs (l'exécutif peut dissoudre l'Assemblée nationale, qui, elle-même, peut renverser le Gouvernement), par opposition aux régimes présidentiels fondés sur une séparation stricte des pouvoirs (l'exécutif n'a pas le pouvoir de dissoudre le législatif, lequel ne peut renverser l'exécutif). De plus, le chef de l'État a toujours à sa charge la nomination d'un tiers des sénateurs ainsi que des hauts magistrats de la Cour suprême et de la Haute cour constitutionnelle.
La Haute cour constitutionnelle vérifie obligatoirement la conformité des lois à la constitution avant leur promulgation[3]. Elle peut également être saisie par un chef d'institution ou par le quart des membres des organes législatifs ou par les organes des collectivités territoriales décentralisées ou encore par le Haut conseil pour la défense de la démocratie et de l'État de droit pour le contrôle de la constitutionnalité de textes législatifs ou réglementaires préalablement promulgués[4] ou encore en projet[5].
La Constitution malgache de 1992, adoptée par référendum le 19 août et promulguée le 18 septembre, a été modifiée en 1995, 1998 et 2007 à la suite de plusieurs conflits. Cependant, avant que les réformes soient totalement mises en œuvre, le président Marc Ravalomanana fut contraint de démissionner le 17 mars 2009, sous la pression de grandes manifestations menées par Andry Rajoelina, alors maire d'Antananarivo, qui a pris la tête de la Transition.
Un processus de réconciliation nationale, impliquant Rajoelina et les trois anciens présidents déchus, a été instauré sous médiation internationale. Un accord signé à Maputo le 9 août 2009 établit une Charte de la transition et un gouvernement d'union nationale pour quinze mois, visant à réconcilier le pays et à préparer de nouvelles institutions démocratiques. Toutefois, malgré un acte additionnel signé à Addis-Abeba le 9 novembre 2009, la crise perdure.
En août 2010, Rajoelina signe un accord politique avec 178 partis, bien que sans l'approbation des mouvances des anciens chefs d'État. Un projet de Constitution, rapidement rédigé, a été soumis à référendum le 17 novembre 2010, avec des résultats validés par la Haute Cour constitutionnelle le 6 décembre et une promulgation le 11 décembre[2]. Cette nouvelle Constitution est très proche de celle de la IIIe République, modifiée en 2007.
La crise persiste néanmoins. Un autre accord est signé à Ivato en septembre 2011, et l’élection du premier président de la IVe République a finalement lieu les 25 octobre et 20 décembre 2013 en l'absence d'Andry Rajoelina, qui accepte de ne pas présenter sa candidature. Parmi 41 candidats, Hery Rajaonarimampianina est élu avec 53,49 % des voix et proclamé président par la Cour électorale spéciale le 17 janvier 2014.
Élaboration
La Charte de la transition adoptée en août 2009 prévoyant la rédaction d'une nouvelle constitution, le conseil des ministres forme le 27 mai 2010 une Commission consultative constitutionnelle de la République de Madagascar. Cette Commission avait pour mission de rédiger la Constitution de la IVème République. Elle prendra le nom de Comité Consultatif Constitutionnel à la suite des accords politiques d'Ivato[6], lui mandant la rédaction de ladite constitution, et sera présidée par Florent Rakotoarisoa.
Le texte proposé le 24 septembre 2010 est adopté le 17 novembre de la même année par les électeurs malgaches, consultés par référendum, à une majorité de 74,19% des voix, avec cependant une abstention conséquente (47,39 %). La Constitution est promulguée par Andry Rajoelina le 11 octobre 2010[8].
Contenu
Structure de la constitution
La Constitution comporte un préambule suivi de 7 titres et 8 sous-titres.
Titre premier - Des principes fondamentaux ;
Titre II - Des libertés, des droits et des devoirs des citoyens ;
Sous-titre premier - Des droits et des devoirs civils et politiques ;
Sous-titre II - Des droits et des devoirs économiques, sociaux et culturels ;
Titre III - De l'organisation de l'État ;
Sous-titre premier - De l'exécutif ;
Sous-titre II - Du législatif ;
Sous-titre III - Du Conseil économique, social et culturel ;
Sous-titre IV - Du juridictionnel ;
Titre IV - Des traités et accords internationaux ;
Titre V - De l'organisation territoriale de l'État ;
Sous-titre premier - Des dispositions générales ;
Sous-titre II - Des structures ;
Titre VI - De la révision de la Constitution ;
Titre VII - Dispositions transitoires et diverses.
Préambule
Le Peuple Malagasy souverain,
Affirmant sa croyance en Andriamanitra Andriananahary,
Résolu à promouvoir et à développer son héritage de société vivant en harmonie et respectueuse de l’altérité, de la richesse et du dynamisme de ses valeurs culturelles et spirituelles à travers le « fanahy maha-olona »,
Convaincu de la nécessité pour la société malagasy de retrouver son originalité, son authenticité et sa malgachéité, et de s’inscrire dans la modernité du millénaire tout en conservant ses valeurs et principes fondamentaux traditionnels basés sur le fanahy malagasy qui comprend « ny fitiavana, ny fihavanana, ny fifanajàna, ny fitandroana ny aina », et privilégiant un cadre de vie permettant un « vivre ensemble » sans distinction de région, d’origine, d’ethnie, de religion, d’opinion politique, ni de sexe,
Conscient qu’il est indispensable de mettre en oeuvre un processus de réconciliation nationale,
Convaincu que le Fokonolona, organisé en Fokontany, constitue un cadre de vie, d’émancipation, d’échange et de concertation participative des citoyens,
Persuadé de l’importance exceptionnelle des richesses de la faune, de la flore et des ressources minières à fortes spécificités dont la nature a doté Madagascar, et qu’il importe de préserver pour les générations futures,
Constatant que le non-respect de la Constitution ou sa révision en vue de renforcer le pouvoir des gouvernants au détriment des intérêts de la population sont les causes des crises cycliques,
Considérant la situation géopolitique de Madagascar et sa participation volontariste dans le concert des nations, et faisant siennes, notamment :
- La Charte internationale des droits de l’homme ;
- Les Conventions relatives aux droits de l’enfant, aux droits de la femme, à la protection de l’environnement, aux droits sociaux, économiques, politiques, civils et culturels,
Considérant que l’épanouissement de la personnalité et de l’identité de tout Malagasy est le facteur essentiel du développement durable et intégré dont les conditions sont, notamment :
- la préservation de la paix, la pratique de la solidarité et le devoir de préservation de
l’unité nationale dans la mise en œuvre d’une politique de développement équilibré et
harmonieux;
- le respect et la protection des libertés et droits fondamentaux ;
- l’instauration d’un État de droit en vertu duquel les gouvernants et les gouvernés
sont soumis aux mêmes normes juridiques, sous le contrôle d’une Justice indépendante ;
- l’élimination de toutes les formes d’injustice, de corruption, d’inégalité et de
discrimination ;
- la gestion rationnelle et équitable des ressources naturelles pour les besoins du
développement de l’être humain ;
- la bonne gouvernance dans la conduite des affaires publiques, grâce à la
transparence dans la gestion et la responsabilisation des dépositaires de la puissance publique ;
- la séparation et l’équilibre des pouvoirs exercés à travers les procédés
démocratiques ;
- la mise en oeuvre de la décentralisation effective, par l’octroi de la plus large autonomie aux collectivités décentralisées tant au niveau des compétences que des moyens financiers ;
- la préservation de la sécurité humaine.
Déclare :
TITRE PREMIER
DES PRINCIPES
FONDAMENTAUX
TITRE II
DES LIBERTES, DES DROITS
ET DES DEVOIRS DES CITOYENS
Le régime semi-présidentiel de la constitution de la Troisième République est maintenu, selon l'article 54. de la nouvelle Constitution : « Le président de la République nomme le Premier ministre, présenté par le parti ou le groupe de partis majoritaire à l’Assemblée nationale ».
Le préambule mentionne la volonté du peuple de faire sien les préceptes internationaux suivants :
la Charte internationale des droits de l'homme ;
les conventions relatives aux droits de l'enfant, aux droits de la femme, à la protection de l'environnement, aux droits sociaux, économiques, civils et culturels.
l'article premier nomme l'état « République de Madagascar » ;
les articles 3 et 143 officialisent que « Les collectivités territoriales décentralisées de la République sont les communes, les régions et les provinces » ;
l'article 8 interdit la peine de mort et la torture ;
l'article 24 engage l'état à organiser un enseignement public, gratuit et accessible à tous ; l'enseignement primaire est obligatoire pour tous ;
l'article 40 désigne quelles sont les institutions de l'État :
le président de la République et le Gouvernement,
l'Assemblée nationale et le Sénat,
la Haute Cour constitutionnelle ;
l'article 45 donne les modalités d'élection du président, au suffrage universel direct, pour un mandat de 5 ans reconductible une fois ;
les articles 71 et 85 interdisent le cumul de mandat pour les députés et sénateurs ;
l'article 89 autorise la promulgation des lois par ordonnance ;
l'article 103 autorise la dissolution du gouvernement par motion de censure ;
l'article 162 impose que toute révision de la Constitution soit soumise à référendum.
Constitutions antérieures
Depuis son indépendance en 1960, Madagascar a eu trois républiques et un régime de transition institutionnalisées par :
Par ailleurs, la Lalàna ny Fanjakana (Loi du royaume en malgache), plus communément appelé le Code des 305 articles, promulgué le 29 mars 1881, est souvent considéré comme étant la première loi constitutionnelle de Madagascar[14].
↑Art. 117.1 .- Avant leur promulgation, les lois organiques, les lois et les ordonnances sont soumises obligatoirement par le Président de la République à la Haute Cour Constitutionnelle qui statue sur leur conformité à la Constitution.
↑Art. 118.1 .- Un Chef d'Institution ou le quart des membres composant l'une des Assemblées parlementaires ou les organes des Collectivités Territoriales Décentralisées ou le Haut Conseil pour la Défense de la Démocratie et de l’Etat de droit peuvent déférer à la Cour Constitutionnelle, pour contrôle de constitutionnalité, tout texte à valeur législative ou réglementaire ainsi que toutes matières relevant de sa compétence.
↑Art. 119.1 .- La Haute Cour Constitutionnelle peut être consultée par tout Chef d'Institution et tout organe des Collectivités Territoriales Décentralisées pour donner son avis sur la constitutionnalité de tout projet d'acte ou sur l'interprétation d'une disposition de la présente Constitution.