En corse : Corsu. En italien : Còrso. En sarde : Cossu ou même Corsicanu (latin : Corsicanus).
Anthropologie et ethnologie
La base ethnique des Corses était constituée des tribus corses de la civilisation nuragique puis torréenne, d'origine sarde. Dans les temps anciens, ils ont été influencés et mélangés depuis les anciens corses aux Ligures, Carthaginois, Étrusques, aux premiers colons Grecs puis à d'autres peuples tels que les Latins. Au début de notre ère, la Corse a subi la romanisation. Au Moyen Âge, la population locale de Corse se mêlait à une minorité de Grecsbyzantins, de germains Ostrogoths, Francs et Lombards. Au IXe siècle, la Corse a été conquise par les Arabes et musulmans venus d'Espagne, et aux XIe et XVIIIe siècles les Pisans et les Génois ont dominé l'île. Il est à noter que la population indigène préférait vivre dans la partie centrale de l' île, ce qui contribuait à une relative sécurité et les empêchait de se mêler aux étrangers.
Cependant, malgré les influences, les corses furent hostiles à ces envahisseurs successifs tout en reprenant certaines traditions de ces envahisseurs, adoptant parfois la langue (par exemple le toscan qui dérivait pour devenir le corse) et les traditions (la Vendetta corse est un dérivé d'une tradition de vengeance des Ostrogoths).
Bien que la base ethnique des corses soit d'origine sarde, les corses modernes sont aussi proches des populations de Sardaigne en tant que groupe ethnique que celles d'Italie centrale, notamment dû à une forte ascendance étrusque durant l'Antiquité, mais aussi dû à la domination de la puissance Toscane de la république de Pise et à la diffusion de la culture toscane auprès des corses durant deux siècles de domination sur la Corse. Cette diffusion de la culture toscane de la république de Pise influença la langue corse ainsi que l'architecture traditionnelle de la Corse jusqu'à la culture locale qui mêle des éléments toscans et sardes.
Louis Dussieux considère les Corses comme étant un peuple descendant des Ligures, il indique également qu'ils sont mêlés d'éléments pélasgiques (premiers habitants de la Grèce) et qu'ils ont été italianisés[9]. D'après Giovanni Ugas, il est probable que les Corses de l'antiquité appartiennent à la famille des peuples Ligures[10]. Selon Claude Ptolémée, la Corse était habitée par douze nations qui, pour la plupart autochtones, n'ont subi l'influence romaine que dans de faibles proportions[11].
Strabon dit que quand les capitaines romains faisaient quelques courses en Corse et qu'ils emmenaient un grand nombre d'esclaves à Rome, on regardait avec admiration le fait que les Corses étaient tous sauvages et tenaient plus de la bête que de l'homme : car ou ils se pourchassaient à mort en toutes les façons qui leur étaient possibles, ou bien ils ennuyaient si fort leurs maitres avec leur impatience et leur peu d'esprit, que lesdits maitres se fâchaient d'y avoir mis leur argent, encore qu'ils ne leur eussent coûté que fort peu[12].
Au cours des siècles suivants, la Corse fut gouvernée et colonisée par les Pisans (de 1050 à 1295) et les Génois (de 1295 à 1755, lorsque l'île se libéra de La Superba) : cela se reflète dans le fait qu'une grande partie des patronymes d'origine corses ont une consonance italo-romane (Andreani, Andreoni, Agostini, Albertini, Bartoli, Benedetti, Buresi, Casanova, Cesari, Colonna, Coppolani, Filippi, Luciani, Padovani, Paoletti, Paoli, Pietri, Rossi, Santoni, Simeoni etc.). En effet, ils sont pour la plupart issus d’une « traduction » ou « italianisation » datant de l’époque de l’administration pisane ou génoise (qui utilisaient déjà le toscan comme langue officielle)[14]. À l'inverse, d'autres patronymes sont directement issus de la colonisation (notamment Benigni, patronyme qui trouve son origine en Toscane ou Fieschi, qui trouve son origine dans la région génoise).
Cela explique aussi le fait que les variétés corses modernes, en particulier celles du Nord, sont considérées linguistiquement comme faisant partie du dialecte Toscan. Parce que l'île a été historiquement et culturellement liée au continent italien jusque-là[15],[16], les populations italiennes du nord et du centre de l'Italie ont pu contribué en partie à l'ascendance corse moderne.
Au début du XVIIe siècle, d'après Pierre Davity, les Corses ne sont guère civilisés pour la plupart et il n'y a pas en eux cette politesse que l'on voit chez les Italiens. Ils sont « extrêmement cruels » et retiennent encore ce que César a dit d'eux pour ce regard, néanmoins il y a chez eux de bien bons soldats et des hommes forts courageux. Au reste, ils sont tellement vindicatifs que les Italiens ont un proverbe commun qui dit qu'il ne faut se fier en un Corse ni vif ni mort, car aussitôt que quelqu'un a été tué, soudain tous ses parents s'assemblent pour faire mourir le meurtrier s'il leur est possible[12].
Trois mois après le traité de Versailles, le , Louis XV proclame officiellement la réunion de la Corse à la France[18]. Cependant, la conquête française de l'ile n'est réellement effective qu'à partir du , date à laquelle la France remporte la bataille de Ponte-Novo. À la suite de celle-ci, les Français tâchèrent de réconcilier les Corses à la domination française, en leur montrant de la bienveillance et de l'équité[note 1]. Mais malgré cela, des meurtres, des brigandages et des révoltes partielles, souvent renaissantes, ne cessèrent de protester contre la conquête française[19].
D'après Henri Martin, l'acquisition de la Corse ne se légitima qu'en 1789, lorsque les Corses devinrent citoyens libres d'une nation libre et ratifièrent solennellement leur réunion à la France, ratification confirmée d'une façon plus explicite encore en 1796, lorsque les Corses, après avoir été séparés du territoire français par les événements de la guerre révolutionnaire et par l'influence de leur héros Paoli, rejetèrent le joug anglais et revinrent spontanément à la France, sous l'influence d'un autre héros corse, devenu le vainqueur de l'Autriche, en attendant qu'il fût le dominateur de l'Europe[19]. Néanmoins, un nationalisme corse fera plus tard son apparition.
En 1891, Roland Bonaparte écrit dans Une excursion en Corse que les Corses ont particulièrement horreur de l'injustice et comme les Génois qui dominèrent l'île pendant 500 ans avaient érigé les dénis de justice en principe de gouvernement, il s'ensuivit que le Corse en était réduit à se rendre justice lui-même : de là la vendetta[20].
Durant tout le XIXe siècle, de nombreux Corses sympathisent avec la doctrine bonapartiste tandis que d'autres corses participent à la vie politique et militaire française.
Selon Encyclopedia.com, les Corses se considèrent comme un groupe ethnique distinct[Quand ?][21].
Génétique
En 2006, une étude sur la structure génétique de la population corse révèle une forte proximité génétique entre Corses et Sardes[22].
En 2019, l'analyse du génome de la population corse révèle également une affinité génétique étroite avec les populations du nord et du centre de l'Italie, tout en partageant avec les Sardes une proportion notable d'ascendance, des processus démographiques et d'isolement similaires. Il est également vérifié que les corses auraient d'anciennes origines ibériques (lointaine ascendance basque), des origines grecques, germaniques et celtiques datant de la fin de l'Antiquité ainsi que des éléments arabes et berbères, datant de 55 à 70 générations (approximativement de l'époque de la chute de l'Empire romain aux invasions sarrasines du VIe siècle), tandis que les origines communes avec les sardes et les populations d'Italie centrale sont majoritaires. Dans les analyses, les échantillons corses étaient caractérisés par une ascendance élevée du Néolithique ancien européen (56 %), à l'instar des populations italiennes, espagnoles et balkaniques (Fig. 5B). De plus, la Corse abritait une proportion relativement élevée liée au néolithique iranien (22 %), tandis que la contribution des chasseurs-cueilleurs occidentaux et orientaux (WHG, EHG) était plus faible, environ 11 %[7]. L'analyse a révélé que la population corse partage plusieurs caractéristiques génomiques avec la Sardaigne, l'Espagne[8] et le centre-nord de l'Italie, créant un mélange unique d'ascendance génomique. Il existe également une minorité de corses ayant des origines slaves récentes, apparues à la suite de l'exode des Russes blancs en Corse[23] et à l'assimilation de plusieurs émigrés Russes.
En 2009, la Corse compte 28 961 immigrés (nés étrangers à l'étranger), dont 13 319 nés au Maghreb, sur une population de 305 674 soit 9,5 %. 31,2 % des nouveau-nés en 2011 en Corse, soit 962 sur 3 084, ont au moins un parent né à l'étranger (quelle que soit sa nationalité), soit la plus forte proportion après la région Île-de-France (46,3 %) et la région Provence-Alpes-Côte d'Azur (32,6 %).
Une importante et documentée migration corse vers l'île voisine, la Sardaigne a eu lieu lors du Moyen Âge[24],[25],[26]. Ce phénomène est accentué en continu du XIVe au XVIIIe siècle, avec l'émigration de nombreuses familles corses en Gallura, à Sassari et en Anglona[27]. Il y avait aussi une grande communauté corse à Rome (Garde corse)[28].
À partir de l'entre-deux-guerres (années 1920-1930), la France continentale est devenue la destination majeure de l'émigration, surtout Marseille qui devient alors la « première ville corse du Monde » (environ 200 000 Corses).
Les causes de cette émigration sont variées, allant de la pauvreté due à des restrictions des exportations, de la seconde révolution industrielle et des crises agricoles qui en suivent. Les dommages de la Première Guerre mondiale ont accentué ces départs[réf. souhaitée].
La diaspora corse compte selon les estimations entre 1 000 000 et 2 000 000 de personnes issues de l'émigration des Corses dans le monde, dont environ 1 000 000 en France continentale, 300 000 en Sardaigne[citation nécessaire], avec environ 200 000 corsophones en Gallura. Le reste de la diaspora corse en Italie se regroupe en Toscane et dans le Mezzogiorno. Il existe aussi une population corse de quelques centaines de milliers de personnes en Amérique latine, notamment à Porto Rico et au Venezuela[30].
Vers 1802, l'habillement du corse consiste en un casaquin noirâtre, une brayette et des beillards de même ; le tout en poil de
chèvre ou en laine de mouton, d'une étoffe filée et tissue par la famille mais sans avoir été cardée car ce n'est pas la coutume ; un petit bonnet noir et pointu, en velours de Gênes avec des agréments, un manteau à capuchon très épais, tissu de même, ou plutôt cordé dans la famille et souvent sans couture ; enfin une chaussure de peau écrue de cochon ou de sanglier faite par lui-même ou bien une paire de souliers de pacotille génoise, qu'il ressemelle au besoin. Par ailleurs, plusieurs de ceux qui habitent proche des villes, substituent une veste, une culotte et des guêtres, de même étoffe, au casaquin, à la brayette et aux beillards[31]. Aux environs de Bastia, vers 1802, la plupart ont un chapeau mais sans déroger au bonnet de velours noir, qu'ils réservent pour le dimanche et auquel le plebéien porte beaucoup de vénération, parce que les deux premières castes s'en décoraient anciennement par un privilège exclusif[31].
Le costume du paysan corse est simple et original vers 1835 : un bonnet pointu, ayant la forme d'un casque phrygien, en peau ou en laine, dont les côtés peuvent retomber sur les oreilles ; une veste d'étoffe brune, des culottes courtes, que soutient une ceinture où par-devant pend une large giberne et enfin des bottines de cuir écru composent son habillement à cette époque. Il porte par ailleurs à sa ceinture un long couteau et est ordinairement armé d'un fusil à baïonnette[32]. Le costume des femmes de la même époque est plus varié : les Grecques de Cargèse ont un habillement qui rappelle celui des femmes maïnotes. Les paysannes des autres cantons, avec leur voile, ou mantille de drap à l'espagnole, portent dans les jours de fête des corsets, des jupons et des tabliers à couleurs vives et variées, comme ceux des paysannes italiennes[32].
La langue corse est une langue romane appartenant au groupe italo-roman. Étroitement apparentée au toscan, elle est très proche des dialectes d'Italie centrale. On distingue deux groupes dialectaux principaux, le cismuntincu (appellation traditionnelle en italien : cismontano) voisin du toscan (qui a donné naissance à l'italien moderne), et le pumuntincu (appellation traditionnelle en italien : oltramontano) qui présente de nombreuses caractéristiques communes avec le sicilien et les parlers continentaux de l'Italie méridionale. Des parlers très proches du pumuntincu (en particulier de sa variété sartenaise) sont également présents dans le Nord de la Sardaigne (gallurese et sassarese).
L'ensemble des dialectes corses présente une unité réelle, en ce sens que des règles au niveau de l'écriture permettent, par exemple, de passer de l'un à l'autre (langue-toit). Cette coexistence de l'unité et de la diversité a donné naissance au concept sociolinguistique de langue polynomique. Il y aurait environ 165 000 locuteurs[réf. souhaitée].
La Corse peut se targuer de bénéficier de nombreuses spécialités culinaires telles que la charcuterie (figatellu, lonzu, coppa) le fromage (brocciu) la farine (farine de chataigne) de l'huile, des clémentines et enfin du vin.
La Corse demeure très marquée par la crise politique et économique des années 1970 et 1980 qui a vu l'éclosion de nombreux artistes de langue corse aux sensibilités autonomistes ou indépendantistes (Canta u Populu Corsu, Chjami Aghjalesi, i Muvrini, L'Arcusgi, Diana di l'Alba) dans le cadre du Riacquistu (mouvement de réappropriation et de remise au goût du jour de la culture corse), constituant le principal substrat du paysage musical corse actuel.
Les chants sacrés et liturgiques ainsi que les paghjelle conservent une place importante dans la musique corse, généralement sous forme de polyphonies. Subsistent également diverses danses médiévales (gigue, moresca, scuttiscia) accompagnées par des instruments de musiques locaux.
La Corse a également vu naître Tino Rossi, l'artiste français ayant vendu le plus de disques à l'étranger.
Le drapeau de la Corse a été adopté par Pascal Paoli en 1755 et est basé sur un drapeau traditionnel utilisé précédemment. Il représente une tête de Maure en noir portant des cheveux crépus et un bandana blanc sur son front, le tout sur un fond blanc.
Il a été utilisé par la République corse (1755–1769) et a pratiquement été interdit après 1769, lorsqu'en 1768 Gênes donna l'île de Corse à la France pour payer une dette.
Dans l'anime japonais Noir, Mireille Bouquet, l'une des deux personnages principales, est corse.
Notes et références
Notes
↑Une amnistie, des chemins construits par les troupes, des établissements utiles, des encouragements à l'agriculture et au commerce, le maintien du régime municipal des podestats et la concession d'États-Provinciaux sous le titre de « consulte générale », signalèrent cette politique conciliante.
↑Grimaldi MC, Crouau-Roy B, Amoros JP, Cambon-Thomsen A, Carcassi C, Orru S, Viader C, Contu L. - West Mediterranean islands (Corsica, Balearic islands, Sardinia) and the Basque population: contribution of HLA class I molecular markers to their evolutionary history.
↑ abcd et e(en) Erika Tamm et al., « Genome-wide analysis of Corsican population reveals a close affinity with Northern and Central Italy », in Scientific Reports, volume 9, Article no 13581, 2019 (lire en ligne).
↑Stranieri nella Cagliari del XVI e XVII secolo dae “Los Otros: genti, culture e religioni diverse nella Sardegna spagnola”, Casteddu, 23 de abrile de su 2004.
↑Antonio Budruni, Da vila a ciutat: aspetti di vita sociale in Alghero, nei secoli XVI e XVII
↑Carlo Maxia, Studi Sardo-Corsi, Dialettologia e storia della lingua fra le due isole
↑Mauro Maxia, I Corsi in Sardegna, Edizioni Della Torre, 2006 (ISBN9788873434122)
↑Marie-Jeanne Casablanca, L'émigration corse à Porto Rico, le Signet, 1993 (ISBN290790003X)
↑Marie-Françoise Poizat-Costa, Le problème Corse : Essai d'anthropologie Philosophique, Paris, L'Harmattan, , 184 p., p. 13-14 :
« " [Les Corses] sont pourtant 1 million de par le monde, chiffre qui englobe: [...]
- enfin, une bonne partie, là encore les chiffres sont difficiles à obtenir, vivant à l'étranger: avec la répartition suivante: une grande partie en Amérique latine, en particulier à Caracas au Venezuela (où ils se sont exilés à partir de 1850: le dernier président vénézuélien était un Corse, M. Léoni, et il faut signaler qu'à Caracas un journal est publié quotidiennement en langue corse), en Colombie (Bogota) et à Porto Rico (300 000 environ).
Selon les renseignements fournis par le professeur J.-L. de Passalacqua, professeur de droit international à l'université de Porto Rico, 300 000 personnes à Porto Rico se reconnaissent des attaches avec la Corse, de par les noms qu'ils portent et l'attachement que leurs familles ont encore pour l'île [...] " »
↑ a et bGabriel Feydel, Mœurs et coutumes des corses, nouvelle édition, Paris, Garnery, 1802.
↑ a et bAbel Hugo, France pittoresque, ou description pittoresque, topographique et statistique des départements et colonies de la France, Paris, Delloye, 1835
Christoph Pan, Beate Sibylle Pfeil, Michael Geistlinger, National Minorities In Europe, Purdue University Press, 2004 (ISBN978-3700314431) : « The Peoples of Europe by Demographic Size », table 1, p. 11f.