Joueur amateur et enseignant de formation, Gérard Houllier débute comme entraîneur de football dans son Nord-Pas-de-Calais natal. D'abord en régional, au Touquet AC puis à l'US Nœux-les-Mines qu'il fait monter en Division 2 et lutter pour l'accession dans l'élite deux saisons de suite. Il intègre l'élite en 1982, à la tête du RC Lens. Il qualifie l'équipe pour la Coupe de l'UEFA dès la première année. Après trois saisons, Houllier rejoint le jeune Paris SG à qui il offre son premier titre de champion de France dès la première saison. Par la suite, les résultats mitigés lui coûtent son poste en 1988 et il devient adjoint de Michel Platini à la tête de l'équipe de France.
En 2005, un an après avoir été écarté du club anglais, Gérard Houllier arrive à l'Olympique lyonnais, remporte deux nouveaux titres de champion, en 2006 et 2007. Il démissionne après ce dernier. Il met finalement un terme à sa carrière d'entraîneur avec un passage sur le banc d'Aston Villa en 2010-2011, rattrapé par son problème de santé. Il rejoint le New York Red Bulls en tant que directeur sportif jusqu’en 2016. Houllier s'implique dans le projet Red Bull et devient conseiller du président lyonnais Jean-Michel Aulas.
Biographie
Les débuts dans le Pas-de-Calais
Né à Thérouanne[2] (Pas-de-Calais), Gérard Houllier commence le football à Hucqueliers[3] et y reste durant neuf années[4]. À l'été 1969, il traverse la Manche dans le cadre de son CAPES d'anglais qu'il entame à l'université de Lille[2] et est aussi assistant dans une école de Liverpool pendant un an[4]. En plus de donner des cours et mener des recherches, le jeune Gérard joue aussi comme attaquant dans l’équipe des Alsop Old Boys et va voir les matchs du Liverpool FC[4].
Après ce poste d'enseignant chercheur en sciences de l'éducation, il revient de 1969 à 1971 à Hucqueliers. Il met quelque temps à terminer ses études à cause de la maladie de son père et devient un temps surveillant, instituteur puis directeur de l'école normale d'instituteurs d'Arras[3],[2]. Il devient ensuite professeur d'anglais[2] à l'ESC Lille avant d'embrasser la carrière d'entraîneur professionnel.
En 1973, Le Touquet AC lui fait confiance pour devenir entraîneur-joueur en Promotion d'honneur[2]. Son travail est remarqué par l'US Nœux-les-Mines, bastion du football nordiste à l'époque, qui l'accueille en 1978. Dès sa première saison, Gérard Houllier hisse le club en Division 2. Au bout de deux exercices, en 1980-1981, le club du Pas-de-Calais joue les barrages d'accession à l'élite française. L'année suivante, les Nœuxois éliminent le FC Nantes en Coupe de France, avant de chuter face au PSG, futur vainqueur de l'épreuve[2].
En 1982, il est nommé entraîneur du RC Lens à la place de Jean Sérafin[4]. Houllier parvient à qualifier les Sang et Or pour la Coupe UEFA lors de sa première saison parmi l’élite du foot français en terminant quatrième de D1[4]. Houllier peut compter sur une bonne génération de joueurs avec Daniel Xuereb, Didier Sénac ou encore Philippe Vercruysse, encadrée par des joueurs de poigne comme Daniel Leclercq[4].
En C3, l'équipe atteint les quarts de finale[4] et termine treizième de D1, puis à la septième place en 1984-1985.
Champion de France avec le PSG
Il s'engage avec le Paris Saint-Germain pour la saison 1985-1986. Dans la capitale, avec Francis Borelli comme président, il décroche le premier titre de champion de France du club dès sa première saison, au terme de l'ultime journée[4]. Le PSG termine avec trois points d'avance sur le FC Nantes. Pour cela, Houllier fait confiance à des joueurs tels que Joël Bats, Luis Fernandez, Dominique Rocheteau ou encore Safet Sušić. L'équipe est aussi demi-finaliste de la Coupe, éliminé de peu par les Girondins de Bordeaux[2].
La saison suivante, il devient le premier entraîneur à coacher l'équipe en Coupe des clubs champions. Mais le PSG est sorti par les Tchécoslovaques de Vítkovice au premier tour de la C1, puis termine septième en fin de saison en D1. Quinzième à l'issue de la saison 1987-1988, Houllier est écarté[2].
Sélectionneur national puis DTN
En 1988, Gérard Houllier rejoint alors la Fédération française de football et est nommé adjoint d'Henri Michel, puis de Michel Platini, intronisé sélectionneur national fin 1988[2]. Houllier gère le terrain et Platini la stratégie[2]. Les hommes font notamment débuter la carrière internationale de Didier Deschamps[5], capitaine des Bleus champions du monde 1998. Cette équipe de France avec Papin et Cantona en figures de proue, se qualifie sans encombre pour l'Euro suédois de 1992, mais chute lourdement lors de la phase finale[2]. Platini quitte alors les Bleus et Houllier est nommé pour lui succéder, en [2].
Mais deux défaites surprises à domicile durant l'automne 1993 (2-3 contre Israël puis 1-2 contre la Bulgarie) barrent à la France le chemin de la Coupe du monde de football 1994[2]. À la suite de cette défaite, il cible particulièrement David Ginola comme responsable[6]. Après cet échec retentissant, il démissionne de ses fonctions de sélectionneur national, tout en restant directeur technique national[4], poste qu'il occupe déjà depuis 1989[5].
En 1998, Gérard Houllier reçoit un coup de téléphone du directeur exécutif du Liverpool Football Club, Peter Robinson, une vieille connaissance[7]. Celui-ci lui propose le poste d'entraîneur du club avec un staff britannique déjà en place, avec lequel le duo Houllier-Bergues compose pendant deux mois[7].
Au départ, Houllier est associé à Roy Evans, mais celui-ci est écarté dès novembre 1998[2]. À la même période, il repère Steven Gerrard en équipe de jeune et le fait débuter en professionnel[8]. À l’issue de sa première saison, Liverpool termine septième du championnat, puis quatrième et européen en 1999-2000[2].
Le , à la mi-temps d'un match contre Leeds United, Gérard Houllier est victime d'une dissection aortique. L'arrivée rapide des secours le sauve[2]. Houllier doit subir en urgence une lourde opération de chirurgie vasculaire et suspendre ses fonctions à Liverpool[4]. Durant son absence, son adjoint Phil Thompson le supplée. Cet épisode lui impose un traitement médical important à vie[9]. Cinq mois plus tard, il revient à Anfield pour un match européen contre la Roma, où il est acclamé par les supporters[2]. Les Reds achèvent leur championnat à la deuxième place[2].
Liverpool connaît une nouvelle victoire en Coupe de la Ligue en 2003. En octobre 2003, il ôte le brassard à Sami Hyypiä pour le donner à Steven Gerard, à seulement 22 ans[8]. Dirigeants et supporters lui reprochent de plus en plus les performances irrégulières de l'équipe et, à l'issue de la saison 2003-2004, son contrat n'est pas renouvelé[2]. Jamie Carragher, un des joueurs les plus capés du club anglais se souvient à son décès fin 2020 : « Le club avait eu des heures difficiles dans les années 90, et c’est avec lui que Liverpool a de nouveau remporté des trophées. (...) Quand on regarde l’équipe qui a gagné la C1 en 2005, la majorité était le noyau dur formé par Houllier »[7].
Retour à la DTN puis fin sur le banc à Aston Villa
En il est de nouveau nommé DTN, aux dépens notamment de Raymond Domenech, malgré les différends qui les opposent lorsque Houllier est entraîneur de l'OL. Critiqué au sein de la Fédération française de football après la Coupe du monde de football 2010 pour avoir influencé le conseil fédéral pour le maintien de Raymond Domenech comme sélectionneur malgré l'échec à l'Euro 2008, il démissionne le de son poste à la DTN[4].
Houllier s'engage en tant que manager du club anglais d'Aston Villa pour une durée de trois ans[20]. Un passage à l’hôpital le prive de la fin de saison[4]. Il démissionne de son poste d'entraîneur le pour raisons de santé[21]. Les médecins lui interdisent alors d'entraîner[9].
Le projet Red Bulls et retour à l'OL
En , il s'éloigne quelque peu du banc de touche et devient officiellement directeur sportif du club américain des Red Bulls de New York[4]. À partir de , il est également membre du conseil de surveillance du FC Rouen.
Son ancien joueur au début des années 1980 à Nœux-les-Mines puis à Lens, Alain Tirloit, se souvient à son décès : « Il était extrêmement avant‑gardiste, toujours à la pointe de ce qui se faisait d’un point de vue tactique, technique et managérial. Sur le plan humain, il était à la fois très proche de ses joueurs, mais savait aussi garder ses distances »[24]. Son adjoint Patrice Bergues se souvient que lors de leur arrivée au Liverpool FC : « il a fallu convaincre les joueurs de beaucoup de choses. Sur le plan de l’entraînement, de la diététique, des soins, il a fallu une bonne année pour nettoyer le club »[7],[25]. La légende du club Ian Rush ajoute : « J’ai eu la chance qu’il me prenne comme coach des attaquants, et même si je n’étais pas un mauvais attaquant, je crois, il m’a appris un nombre incroyable de choses »[7].
L'attaquant lensois François Brisson se rappelle : « sa connaissance très pointue du football. (…) Il était toujours positif tout en étant un gros bosseur. Dans les causeries, tu avais toujours l’impression qu’il avait les mots justes au bon moment, notamment pour calmer les joueurs »[24]. Ouvert, Houllier ne refuse aucune discussion sur un choix tactique ou une composition d’équipe. Bergues ajoute sur Liverpool : « Les gens là-bas aiment leur club, ils veulent dire ce qu’ils ressentent pour essayer de comprendre, et ça Gérard le comprenait bien »[7].
À la fin de l'expérience anglaise, on reproche à Houllier sa politique de transfert (beaucoup de ventes et d'achats de joueurs) et le jeu de l'équipe jugé « trop unidimensionnel »[2].
↑Jean Bréhon, « Gérard Houllier et « les années Reds » (1998-2004) : une brèche pour les Frenchies à l’étranger ? », Football(s). Histoire, culture, économie, société, no 2, , p. 83–91 (ISSN2968-0115 et 2967-0837, DOI10.58335/football-s.272, lire en ligne, consulté le )