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À partir des années 1940, Gene Tierney est marquée par une série d'épreuves familiales qui vont affecter le reste de sa carrière et de sa vie.
Biographie
Enfance et débuts
Fille d'Howard Sherwood Tierney, prospère courtier en assurances d'origine irlandaise, et de Belle Lavina Taylor, ancienne professeur de gymnastique[2], Gene Eliza Tierney est née à Brooklyn, New York. Elle est entourée d'un grand frère, Howard Sherwood "Butch" Tierney, Jr. et d'une petite sœur, Patricia "Pat" Tierney[2].
Gene Tierney étudie à la St. Margaret School de Waterbury et à la Unquowa School de Bridgeport dans le Connecticut. Night, son premier poème, est publié dans le journal de l'école, et l'écriture en vers sera un passe-temps occasionnel tout au long de sa vie. Elle passe alors deux ans en Europe, notamment pour étudier dans l'école privée de Brillantmont à Lausanne en Suisse, où elle apprend à parler couramment le français.
Elle retourne aux États-Unis en 1938, et s'inscrit à l'école de Miss Porter. En voyage sur la côte ouest, elle visite les studios de la Warner Bros., où elle est interpellée par Anatole Litvak ; ébloui par sa beauté, il lui conseille de devenir actrice (sa phrase exacte - "Mademoiselle, vous devriez faire du cinéma" - deviendra le titre français des mémoires de Gene). La Warner veut lui faire signer un contrat, mais ses parents la découragent en pointant le bas salaire de départ.
Son bal de débutante a lieu le , elle a dix-sept ans. Elle s'ennuie vite de la vie en société et décide de tenter une carrière d'actrice. Son père déclare « Si Gene doit être actrice, ce sera dans un théâtre convenable », aussi Gene est acceptée à l'American Academy of Dramatic Arts à New York. Parmi les autres talents notables de l'époque qui ont fréquenté ce conservatoire figurent Katharine Hepburn, Spencer Tracy, Grace Kelly et Lauren Bacall.
Carrière à Broadway
Pour son premier rôle à Broadway, Gene Tierney porte un seau d'eau sur la scène de What a Life! (1938). Le critique du Variety écrit : « Miss Tierney est sans doute la plus jolie porteuse d'eau que j'aie jamais vue ! » À la même époque, elle est remarquée pour sa prestation dans la pièce The Primrose Path (1938). L'année suivante, elle joue le rôle de Molly O'Day dans la production Mrs. O'Brien Entertains (1939), qui lui vaut ce commentaire élogieux de Brooks Atkinson dans le New York Times : « Miss Tierney est rafraîchissante et d'une spontanéité désarmante ». Cette même année, elle interprète Peggy Carr dans Ring Two (1939) et recueille de bonnes impressions. Et le critique de théâtre Richard Watts déclare : « Je ne vois aucune raison pour laquelle Mrs. Tierney ne fasse pas une carrière théâtrale intéressante, au cas où le cinéma ne la kidnapperait pas. »
Le père de Gene Tierney monte la société Belle-Tier afin de promouvoir la carrière d'actrice de sa fille (il finira par lui voler tout son argent)[3]. En 1939, Columbia Pictures la prend sous contrat pour six mois. Elle rencontre le milliardaire Howard Hughes, qui tente en vain de la séduire, la fortune du producteur n'impressionne pas la jeune fille de bonne famille qu'elle est[4]. Ils deviennent cependant des amis proches, et le resteront tout le long de leur vie. Un cadreur lui conseille de perdre un peu de poids en lui disant qu' « un visage fin est plus séduisant. » Elle commence alors un régime recommandé par le magazine Harper's Bazaar, qu'elle suivra durant vingt-cinq ans[5].
La Columbia Pictures ne lui trouvant aucun rôle, elle repart pour Broadway et incarne Patricia Stanley dans la pièce au succès critique et commercial, The Male Animal (1940). Brooks Atkinson écrit dans The New York Times : « Tierney resplendit dans la meilleure performance qu'elle ait jamais donnée. »[6] Elle devient ainsi la sensation de Broadway avant son vingtième anniversaire.
Finalement engagée par la Fox, Gene Tierney devient une des principales stars de la firme, qui compte également à l'époque des actrices comme Linda Darnell, Debra Paget (qui occupent des emplois exotiques semblables à ceux de Tierney), la flamboyante Maureen O'Hara, Jeanne Crain ou encore Anne Baxter.
Elle débute sous les auspices de Fritz Lang dans un western (Le Retour de Frank James) avec Henry Fonda, puis travaille avec John Ford et Henry Hathaway. Elle trouve son premier rôle important dans Shanghaï (1941) de Josef von Sternberg et devient la partenaire de Tyrone Power dans le film d'aventures Le Chevalier de la vengeance (1942). Malgré un personnage quelque peu en retrait, Le ciel peut attendre (1943), comédie fantastique d'Ernst Lubitsch, impose durablement sa beauté émouvante et distante à la fois ; durant le tournage, une forte dispute avec le réalisateur apprend à Lubitsch à la respecter[7]. Juvénile et raffinée, elle peut incarner aussi un modèle américain idéal, comme Grace Kelly, autre star issue d'un milieu bourgeois, mais avec une fragilité supplémentaire.
Elle effectue son retour, ce sera sa dernière apparition notable, en 1962 grâce à son mentor Otto Preminger dans Tempête à Washington. Elle interprète encore quelques autres films. Par la suite, elle se contente de deux apparitions télévisées et se retire entre-temps avec son mari Howard Lee.
Vie privée
Gene Tierney épouse le costumier et styliste Oleg Cassini, le .
En , alors enceinte de sa première fille, elle contracte la rubéole au cours de son unique visite à l'Hollywood Canteen. Daria naît prématurément, le , à Washington, ne pesant qu'un kilogramme et demi et nécessitant une complète transfusion sanguine. Du fait de la rubéole de sa mère, Daria est également sourde, partiellement aveugle, et handicapée mentalement. Le désarroi de Tierney la mènera à des années de dépression, et semble avoir déclenché son syndrome maniaco-dépressif[7]. À cette époque, Howard Hughes, un vieil ami, veille à ce que Daria reçoive les meilleurs soins possibles, payant pour toutes les dépenses médicales. Tierney n'oubliera jamais la générosité de Hughes. Cet aspect douloureux de sa vie a partiellement inspiré la romancière Agatha Christie, qui a repris, dans son roman Le miroir se brisa, le thème de l'actrice célèbre anéantie au sommet de sa gloire par les conséquences tragiques de cette maladie. Ces faits sont évoqués presque à l'identique dans le roman, la tragédie de l'actrice ayant été médiatisée depuis des années.
Elle se sépare de Cassini, vivant mal l'état de sa fille handicapée. Pendant cette séparation, Tierney se lie à Tyrone Power avec qui elle partage l'affiche de Le Fil du rasoir (The Razor's Edge). Cette liaison prend fin au printemps 1946. La même année, pendant le tournage du Château du Dragon (Dragonwyck), elle rencontre le jeune John F. Kennedy en visite sur le plateau. Leur idylle s'achève l'année suivante lorsque Kennedy lui avoue qu'il ne pourrait jamais l'épouser du fait de ses ambitions politiques[8]. Tierney se réconcilie alors avec Cassini, et ils ont une seconde fille, Christina « Tina », le ; ils divorcent tout de même le .
Sa liaison sérieuse avec le prince Ali Khan prend fin lorsque le père de celui-ci, Aga Khan III, s'oppose formellement à leur mariage : en tant qu'autorité morale et religieuse, Ali Khan, déjà divorcé de Rita Hayworth, ne peut épouser deux stars de Hollywood. Internée une première fois de son propre chef, elle l'est à nouveau à la suite d'une intervention de la police qui la trouve au bord du 14e étage de son immeuble[7].
En 1958, elle rencontre le baron du pétrole texan W. Howard Lee, marié à Hedy Lamarr de 1953 à 1960. Tierney et Lee se marient à Aspen le et s'établissent à Houston. Elle aime la vie texane avec Lee et devient une joueuse experte de bridge. Après l'élection présidentielle de 1960, elle envoie à Kennedy un message de félicitations pour sa victoire, bien qu'elle ait ultérieurement admis avoir voté pour Richard Nixon, pensant qu'il ferait un meilleur président. En 1962, la 20th Century Fox annonce qu'elle jouera le premier rôle dans Les lauriers sont coupés (Return to Peyton Place), mais sa grossesse l'écarte du projet. Elle fait néanmoins une fausse couche.
Mort
Le , son mari Lee meurt d'une longue maladie. Gene Tierney meurt le à Houston, peu avant son 71e anniversaire, des suites d'un emphysème[9]. Elle avait commencé à fumer après la projection de son premier film, pour rendre sa voix plus grave car « Ma voix était celle d'une Minnie en colère ». Elle fuma beaucoup, ce qui a pu contribuer à sa mort. Elle est enterrée aux côtés de son mari au cimetière Glenwood de Houston.
Dans son autobiographie, Mademoiselle, vous devriez faire du cinéma (Self-Portrait, 1979), elle évoque simplement sa vie, sa carrière et ses souffrances mentales.
↑HERVÉ GUIBERT, « Rennes, paris, new-york etienne daho, le chanteur cow-boy », Le Monde, (lire en ligne, consulté le ).
Voir aussi
Bibliographie
Gene Tierney, Mademoiselle, vous devriez faire du cinéma (Self-portrait, 1979), Hachette, Paris, 1985, traduction de Françoise Caetano ; Ramsay poche, 1991, réimpression en poche dans la même collection en 2006.