Nathaniel dit Nat Turner, né probablement le et mort pendu le , est un esclave et un prédicateurafro-américain. En 1831, il conduit une révolte dans le comté de Southampton en Virginie. Cette insurrection sanglante d'esclaves entraîne une répression, légale et illégale, encore plus sanglante, et déclenche dans les États du Sud, la promulgation de nouvelles dispositions durcissant encore plus les Codes de l'esclavage (Slave codes(en)). Dans les années 1960, Nat Turner devient une icône du mouvement du Black Power.
Biographie
Jeunesse et formation
Nat Turner[1],[2] naît dans le comté de Southampton dans l'État de Virginie où il restera toute sa vie. Il doit son nom au propriétaire de sa mère, Benjamin Turner qui est probablement son père. Benjamin Turner ou l'un de ses fils légitimes lui apprendra à lire, écrire et compter, tandis que sa mère Nancy lui transmet la fierté de ses origines africaines et la haine de l'esclavage[3],[4],[5]. Il entretient également des relations proches avec sa grand-mère paternelle, Bridget, issue de la communauté Kormantin, enlevée en Afrique (dans l'actuel Ghana) et déportée en Amérique à l'âge de 13 ans, qui lui transmettra sa foi chrétienne[6]. Il lit la Bible avec ferveur, et se persuade qu'il a un grand destin à accomplir au nom de Dieu[note 1],[7],[8].
En 1810, Benjamin Turner décède, Nat et sa mère deviennent par héritage la propriété de Samuel Turner ; ce dernier meurt en 1822, Nat Turner est acheté par un planteur Thomas Moore[9].
De la prédication à la rébellion
De 1825 à 1830, Nat Turner devient prédicateur baptiste, ce qui lui permet d'avoir l'autorisation de se déplacer pour se rendre dans les différentes églises afro-américaines jusqu'en Caroline du Nord[10].
En 1830, Thomas Moore meurt, et Nat par héritage appartient au fils de Thomas Moore, Putnam Moore[11]. Puis ils vivent avec la veuve de Moore et son nouveau mari, Joseph Travis, qui devient de ce fait le maître de Turner, qui va travailler sur ses terres[8],[9]. En février 1831, Turner a interprété une éclipse de soleil comme un signe attendu de Dieu qu'il devait mener une rébellion d'esclaves. Le , voyant en une éclipse annulaire de soleil le signe divin qu'il attendait, il décide de mener une action contre les propriétaires d'esclaves. Initialement prévue pour le 4 juillet, jour de fête nationale, la révolte est repoussée pour des raisons d'organisation. Un second événement stellaire intervient le [12], jour où le soleil se teinte d'une ombre verdâtre, sans doute due aux suites d'une éruption volcanique géante du mont Saint Helens[7] : Turner y voit un signe déclencheur et la révolte éclate une semaine plus tard, le .
Cette révolte dure deux jours, pendant lesquels sa bande, qui comporte jusqu'à 70 hommes, massacre une soixantaine de blancs, hommes, femmes ou enfants[13]. Une milice deux fois plus puissante que la faction d'esclaves révoltés finit par mettre fin à ses agissements.
Jugement et fin
Toutefois, Nat Turner n'est capturé que le . Il est jugé le dans la ville de Jerusalem (l'actuelle Courtland en Virginie depuis 1888) et pendu le [14] avec dix-huit de ses compagnons, son corps étant ensuite mutilé[7],[15].
Avant son exécution, l'homme de loi Thomas Ruffin Gray[16] l'interroge et recueille ses paroles dans un ouvrage ensuite publié sous le nom de Confessions de Nat Turner[17],[18] et qui constitue un document historique essentiel pour mieux comprendre le personnage de Turner.
Conséquences
Les craintes d'une révolte des esclaves comme celle de Saint-Domingue s'exacerbent au sein des élites esclavagistes du Sud et les relations inter-raciales se durcissent. Les autorités du Sud se montrent de plus en plus réticentes aux doctrines plus libérales des Nordistes vis-à-vis de l'esclavage, ce qui constitue une pierre d'achoppement importante dans les événements qui mèneront quelques décennies plus tard à la guerre de Sécession.
Vie personnelle
En 1820, il épouse une esclave du nom de Cherry, ils auront trois enfants[19].
Notes et références
Notes
↑Le professeur Rothman interroge toutefois ce mysticisme en soulignant qu'il est difficile de décider si Turner s'est lui-même persuadé ou si ce messianisme n'a pas été largement provoqué par son entourage. Voir Teachinghistory.org, consulté le 11 novembre 2012.
Notices dans des encyclopédies et manuels de références
(en-US) Weigl & Jean Blackwell Hutson (dir.), African American Biography, volume 4 : S-Z, Detroit, Michigan, UXL, , 823 p. (ISBN9780810392342, lire en ligne), p. 733-736,
Suzanne Michele Bourgoin (dir.), Encyclopedia of World Biography, volume 16, Vitoria-Zworykin, Detroit, Michigan, Gale Research, , 512 p. (ISBN9780787622213, lire en ligne), p. 354,
(en-US) Rachel Kranz & Philip J. Koslow, The Biographical Dictionary of African Americans, New York, Facts on File, , 313 p. (ISBN9780816039043, lire en ligne), p. 237-239,
(en-US) John A. Garraty & Mark C. Carnes (dir.), American National Biography, Volume 22: Tunnicliff - Welk, New York, Oxford University Press, USA, (ISBN9780195128017, lire en ligne),
(en-US) R. Kent Rasmussen (dir.), The African American Encyclopedia, Volume 9 : Sui-Wil, New York, Cavendish Square Publishing, , 3006 p. (ISBN9780761472179, lire en ligne), p. 2540-2543,
(en-US) Patrick L. Mason (dir.), Encyclopedia of Race & Racism, volume 4 : S-Z, Detroit, Michigan, MacMillan Reference Library, , 548 p. (ISBN9780028661957, lire en ligne), p. 204-206,
(en-US) Henry Louis Gates Jr. (dir.), African American National Biography, volume 11 : Taborn-Wheeler, New York, Oxford University Press, USA, , 617 p. (ISBN9780199920778, lire en ligne), p. 267-269,
William Styron (trad. de l'anglais américain par Maurice-Edgar Coindreau), Les Confessions de Nat Turner, Paris, Gallimard, coll. « Du monde entier » (réimpr. 1982) (1re éd. 1 janvier 1969), 423 p. (OCLC300033439),
Anglophones
(en-US) William Styron, The Confessions of Nat Turner, New York, Random House (réimpr. 1992, 1994, 2010) (1re éd. 1 janvier 1967), 456 p. (ISBN9780394420998, lire en ligne)
(en-US) John W. Cromwell, « The Aftermath of Nat Turner's Insurrection », The Journal of Negro History, Vol. 5, No. 2, , p. 208-234 (27 pages) (lire en ligne),
(en-US) Seymour L. Gross & Eileen Bender, « History, Politics and Literature: The Myth of Nat Turner », American Quarterly, Vol. 23, No. 4, , p. 487-518 (32 pages) (lire en ligne),
(en-US) Mary Kemp Davis, « William Styron's Nat Turner as an Archetypal Hero », The Southern Literary Journal, Vol. 28, No. 1, , p. 67-84 (18 pages) (lire en ligne),
(en-US) Anthony Santoro, « The Prophet in His Own Words: Nat Turner's Biblical Construction », The Virginia Magazine of History and Biography, Vol. 116, No. 2, , p. 114-149 (36 pages) (lire en ligne),
(en-US) Michael Lackey, « Introduction to The Confessions of Nat Turner », The Mississippi Quarterly, Vol. 69, No. 1, , p. 3-8 (6 pages) (lire en ligne),
Articles connexes
Nat Turner, biographie en bande dessinée multi-primée réalisée par l'Américain Kyle Baker en 2005 ;