Après la révolution d'Octobre, le gouvernement bolchevik entend, conformément au programme énoncé par Lénine, sortir de la « guerre impérialiste ». L'armée allemande vient de remporter une victoire à Riga en septembre alors que l'armée russe, minée par les mutineries, est totalement désorganisée. Le nouveau régime proclame la démocratisation de l'armée et l'élection des officiers.
Le , le gouvernement bolchevik signe un armistice avec l'Allemagne qui prend effet le 15 et, le , ouvre des pourparlers de paix. Le , Léon Trotski proclame le retrait de la Russie du conflit et cherche à lancer une politique de « Ni guerre ni paix » qui permettrait de propager la révolution en Europe. Le , Nikolaï Krylenko, simple lieutenant chargé des affaires militaires au Conseil des commissaires du peuple, annonce la dissolution de l'armée.
Le , les Allemands signent un traité de paix avec les indépendantistes de la République populaire ukrainienne. Le même jour, la délégation allemande à Brest-Litovsk présente à Trotski, chef de la délégation soviétique, un ultimatum du Kaiser lui enjoignant d'accepter les conditions proposées sous peine d'une reprise des hostilités : le lendemain, à la stupeur de la délégation allemande, Trotski annonce que les Soviétiques quittent les pourparlers tout en se retirant du conflit. Lénine, à Petrograd, tente vainement de faire accepter au Comité central les conditions de l'ultimatum allemand tandis que Erich Ludendorff, quartier-maître général de l'armée allemande, mène les préparatifs d'une reprise de l'offensive contre la Russie à l'expiration de l'ultimatum, le [1].
Le général Max Hoffmann, chef de la délégation allemande à Brest-Litovsk, note dans son journal :
« C'est la guerre la plus comique que j'aie jamais vu. Nous mettons une poignée de fantassins avec des mitrailleuses et un canon sur un train et nous l'envoyons à la gare suivante ; ils la prennent, font des prisonniers parmi les bolcheviks, ramassent quelques troupes supplémentaires et continuent. En tout cas, le procédé a le charme de la nouveauté. »[2]
Le soir du , Lénine convoque deux réunions successives du Comité central pour le convaincre d'accepter les conditions allemandes et obtient, non sans mal, le ralliement de Trotski : à minuit, le Comité envoie un télégramme à Berlin pour annoncer son acceptation tandis que les troupes allemandes continuent d'avancer. Le gouvernement envisage d'évacuer Petrograd, directement menacée, tandis que les ouvriers de la ville, non payés, se mettent à piller les entrepôts publics. Lénine promulgue un décret sur « La patrie socialiste en danger ». Le , Lénine et Trotski tiennent une nouvelle réunion du Comité central pour le convaincre de demander l'aide de l'Entente. Le , alors qu'il est de plus en plus évident que l'armée russe n'est pas en état de combattre, les Allemands envoient leurs nouvelles conditions, plus dures que les précédentes, qui prévoient la cession de l'Ukraine et des pays baltes. Malgré l'opposition de Boukharine puis des socialistes-révolutionnaires, Lénine parvient à faire accepter ces conditions par le Soviet suprême par 116 voix contre 85[3].
Des sources soviétiques tardives mentionnent une contre-attaque menée le par Evgueni Iskritski(en) : considérée après coup, dans une réécriture de l'histoire à des fins de propagande, comme « la première opération de l'Armée rouge », elle est l'origine de la fête soviétique du « Jour du défenseur de la patrie ».
Au sud, le groupe d'armées von Linsingen disperse les restes du Front du Sud-Ouest, entre à Jitomir le et à Kiev le . La veille, les indépendantistes ukrainiens de la Rada centrale avaient pris possession de la ville. L'appropriation des richesses agricoles et minières de l'Ukraine constitue un des principaux buts de guerre des Allemands. Le gouvernement bolchevik de la république soviétique d'Ukraine, proclamé à Kharkiv les 24-, contrôle pour sa part le nord-est de l'Ukraine.
Après le bombardement de Petrograd par des avions allemands, Lénine décide le transfert du gouvernement bolchevik à Moscou. Avec la majorité du gouvernement (Grigori Zinoviev, Lev Kamenev, Joseph Staline, etc.), il rompt avec la politique de Trotski et accepte de rouvrir les négociations.
Conséquences
Le , le gouvernement bolchevik signe le traité de Brest-Litovsk, acceptant les nouvelles clauses, plus dures que celles proposées par les Allemands en décembre. L'Estonie et la Lettonie passent sous l'administration militaire allemande des territoires de l'Est (Ober Ost) avant de devenir des républiques indépendantes sous tutelle allemande ; cependant, les Allemands ne tarderont pas à écarter les gouvernements provisoires, d'inspiration social-démocrate, pour les remplacer par un régime conservateur dominé par les grands propriétaires germano-baltes.
Les légions tchécoslovaques, formées de prisonniers austro-hongrois d'origine tchèques et slovaques capturés par les Russes et engagés aux côtés de la Russie, sont l'une des rares unités de l'armée russe encore capable de combattre. Menacées de capture par les Austro-Allemands, elles obtiennent de se retirer vers l'Est à l'issue de la bataille de Bakhmatch (8-). Mais elles ne sont pas bolchéviques et prendront parti pour les armées blanches dans la guerre civile russe.
La fin des opérations sur le front de l'Est, malgré le maintien de troupes d'occupation importantes, permet à l'Allemagne de déplacer une grande partie de ses forces vers le front de l'Ouest, de les nourrir grâce aux céréales ukrainiennes (moisson de l'été 1918) et de mener une série d'offensives contre les Franco-Britanniques, mais trop tard pour empêcher la défaite des empires centraux.
Personnalités
Personnalités civiles et militaires liées à l'opération Faustschlag