Fils de Charles Édouard Masse (1850-1920), originaire de Strasbourg, et de Sarah Lucie Simon (1855-1942), née à Montpellier, Pierre Masse est Docteur en droit, puis premier secrétaire de la Conférence des avocats en 1906[réf. nécessaire][1].
En 1917, Paul Painlevé l'appelle dans son nouveau gouvernement. Il est sous-secrétaire d'État à la Guerre chargé de la justice militaire du au dans le premier gouvernement Paul Painlevé.
En 1919, il abandonne la vie parlementaire pour se consacrer à sa carrière professionnelle. Devenu l'un des plus grands civilistes de sa génération et un éminent avocat d'assises[réf. nécessaire], il siège au conseil de l'Ordre de 1928 à 1934.
L'année 1939 voit son retour en politique : il est élu sénateur de l'Hérault et adhère au groupe de la gauche démocratique. Le à Vichy, il tente vainement, avec Jean Boivin-Champeaux, d'obtenir de Pierre Laval l'inscription dans la nouvelle Constitution de la garantie des libertés individuelles et vote finalement en faveur des pouvoirs constituants pour le maréchal Pétain.
En , lors de la parution de la loi chassant de l'Armée les officiers d'origine israélite, Pierre Masse envoie au maréchal Pétain une lettre de protestation lui demandant s'il doit aller enlever leurs galons à son frère (officier, tué à Douaumont en 1916), à son gendre et son neveu (officiers, tués en mai 1940), s'il peut laisser la médaille militaire à son frère (mort à Neuville-Saint-Vaast), si son fils (officier, blessé en juin 1940) peut garder son galon[2] et si « on ne retirera pas rétrospectivement la médaille de Sainte-Hélène à son arrière-grand-père »[3]. Peu de temps après, il accepte d'être l'avocat de l'auteur dramatique, Henri Bernstein, grossièrement diffamé pour ses origines juives par Alain Laubreaux, critique de théatre du journal Je suis partout, dans un article de [4],[5],[6]. Sa brillante plaidoirie lui fait une publicité redoutable[7]. Condamné pour diffamation en par défaut, Laubreaux fit opposition au jugement et devait être à nouveau jugé en juin 1940 mais ni Bernstein, réfugié à New York, ni Laubreaux, emprisonné, ne vinrent à l'audience. Il est jugé une nouvelle fois, en , et se défend sans avocat. Il est acquitté[8].
En , Pierre Masse reçoit une circulaire adressée à tous les parlementaires leur demandant de préciser s'ils sont d'ascendance juive. Dans une seconde lettre adressée au maréchal Pétain, il exprime avec vigueur son refus d'être traité en « Français de la deuxième catégorie »[7].
Il est arrêté à son domicile par la police française, sur ordre des Allemands, le [7] en compagnie d'autres confrères, tous juifs et parmi les plus célèbres du barreau de Paris, Jean Weill, Théodore Valensi, Maurice Azoulay, Albert Ulmo, Gaston Crémieux et Edmond Bloch[9]. Il est ensuite séquestré au camp de Drancy, puis à Compiègne. Un quotidien collaborationniste, Paris-Soir, publie un reportage antisémite consacré à Masse et ses collègues sous le titre « Je les ai vus, ces juifs millionnaires, ex-célébrités du barreau parisien internés dans un camp proche de notre capitale »[10].
Dans l'un et l'autre camp, sa préoccupation première est d'aider ses camarades de captivité, consolant les uns, partageant avec les autres les quelques colis qui lui parviennent. Il collabore pour cela avec Annette Monod, une assistante sociale relevant de la Croix-Rouge qui a organisé un service social dans le camp et parvient à entrer et sortir du camp avec des messages ou des colis. Pour essayer de le soustraire à cette antichambre de la déportation, des amis ingénieux imaginent de toutes pièces un prétendu abus de blanc-seing dont se serait rendu coupable Pierre Masse. Leur but, gagner du temps en suscitant une enquête approfondie, est partiellement atteint : il est ramené à la prison de la Santé et incarcéré comme détenu administratif[réf. nécessaire]. Mais le non-lieu prononcé par le procureur de l'État Maurice Gabolde le renvoie à Drancy, puis à Compiègne[7]. Le maréchal Pétain adresse, tardivement, une demande de libération aux autorités d'occupation. Celles-ci donnent une fin de non recevoir en s'étonnant que le cabinet civil du maréchal s'inquiète du sort d'un « Juif particulièrement dangereux… ». Le , il est déporté à Auschwitz, par le convoi no 39[11], où il meurt, probablement au cours du mois d'octobre[12].
Marié avec Marie Arrault, le couple a trois enfants : Jacques (1910-2002), Marie-Thérèse et Philippe.
↑Florent Georgesco, « Anne Sinclair : « Je n’avais pas d’archives familiales, alors je suis partie à l’enquête » », Le Monde, (lire en ligne)
↑Robert Aron (avec Georgette Elgey), Histoire de Vichy – 1940-1944, éd. Fayard, coll. « Les grandes études contemporaines », Paris, 1954, 766 p., p. 232-232.
↑Jean-Jacques Bernard, Le camp de la mort lente, Editions Le Manuscrit, coll. « Témoignages de la Shoah », , 334 p. (ISBN978-2-7481-6931-7, lire en ligne), p. 318