Théobald Chartran est le fils de Lazare Chartran, conseiller à la Cour d'appel de Besançon (originaire de Saint-Pierre en Martinique) et de Clémentine Dillon (originaire de Strasbourg). Il est élève au lycée Victor-Hugo de Besançon où il se signale déjà par son talent de caricaturiste, qu'il exerce surtout à l'égard de ses professeurs. D'abord destiné à la magistrature, il découvre sa vocation de peintre en s'essayant à copier les tableaux du musée des beaux-arts de Besançon. À l'âge de dix-huit ans, il est admis à l'école des beaux-arts de Paris où il étudie dans l'atelier d'Alexandre Cabanel et obtient en 1877 le grand prix de Rome sur le sujet de La Prise de Rome par les Gaulois.
Chartran connaît rapidement le succès et reçoit de nombreuses commandes, notamment des portraits de personnages de la haute société. Il réalise les portraits du président Sadi Carnot, de Sarah Bernhardt, du pape Léon XIII, du président Roosevelt, etc.
Le , il obtient, pour 40 000 francs, la commande de la décoration de l'escalier d'honneur de la Sorbonne. Il termine son travail en 1889 après avoir mené des recherches historiques approfondies, pour lesquelles il demanda une carte de lecteur permanent de la Bibliothèque Nationale. Il réalise neuf panneaux à l'huile sur toile, marouflés en place, représentant des épisodes de l'histoire des sciences. Il participe également à la décoration de l'hôtel de ville de Paris et peint le plafond de la salle des fêtes de l'hôtel de ville de Montrouge.
Il habite à Paris un hôtel particulier, 3bisplace des États-Unis où, avec sa femme Sylvie, il reçoit artistes, gens de lettres et hommes politiques[2].
« Ses intimes, rapporte André de Fouquières, [l']appelaient « Tib », ce qui était un prénom moins affichant [que Théobald]. Il avait un physique de mousquetaire, sous le grand chapeau qu'affectionnaient les peintres de l'époque. Mme Sylvie Chartran était jolie et élégante. Leur salon était le rendez-vous, non seulement des artistes en vogue, mais des gens de lettres et des hommes politiques. On y honorait la musique et, pour que rien ne vînt distraire les hôtes des plaisirs de l'audition, la maîtresse de maison faisait, autour du piano, une obscurité quasi totale. Dans un silence religieux, s'élevaient alors les chants du compositeur qu'on avait élu ce soir-là. Le plus souvent, c'était Isidore de Lara, qui interprétait lui-même ses mélodies. Quand il avait distillé toute la nostalgie du Rondel de l'Adieu : « Partir, c'est mourir un peu... », Mme Chartran supposait que l'atmosphère était devenue propice aux grandes évasions. Alors elle faisait apporter un phonographe acquis en Amérique et dispensait à l'assemblée le désir des ailleurs encore mystérieux en leur faisant entendre les premiers negro-spirituals. Car les Chartran partageaient leur temps entre la France et les États-Unis où le peintre était l'enfant choyé de la société milliardaire. Il fit le portrait de Mme et de MlleThéodore Roosevelt, de Mgr Corrigan, archevêque de New York, du millionnaire James Hazen Hyde avec qui il était intimement lié, et de la plupart des notabilités de la Cinquième Avenue – toutes commandes évidemment fort bénéfiques qui lui permirent plus tard d'aller s'installer, beaucoup plus somptueusement, à Neuilly. C'est alors qu'il fit, en 1906, le portrait de mon ami le Maharadjah de Kapurthala »[3].
Sur un îlot du lac Léman, l'île de Salagnon[4], situé à Clarens, dont il fait l'acquisition en 1900, il demande à un architecte du nom de Lauzanne, puis à Louis Villard[5], de dessiner les plans d'une villa de style florentin à deux étages avec grand escalier et petit port. Il fait surélever les murs qui entourent l'île qu'il remblaie à l'aide de terre de Savoie amenée par bateau. Il donne dans cette propriété des réceptions grandioses, où l'on tire de magnifiques feux d'artifice et où se pressent des hommes politiques français tels qu'Alexandre Millerand ou Louis Barthou, des milliardaires américains comme Henry Clay Frick et de nombreux artistes.
En janvier 1904, il est élu à l'Académie de Besançon. Après sa mort en 1907, sa ville natale inaugure en août 1910 un monument en son honneur : une statue en bronze due au sculpteur Victor Segoffin. ; à cette occasion, un poème en l'honneur de l'artiste écrit par MmeDaniel Lesueur avait été dit par MlleSegond-Weber, sociétaire de la Comédie-Française. La statue est fondue par l'occupant allemand durant la Seconde Guerre mondiale, et remplacée sur la promenade Granvelle après la Libération par un buste en bronze dû au sculpteur franc-comtois Laethier.
Le Cierge, 1881, huile sur toile, H. 2,52 × L. 1,57, Caen, musée des Beaux-Arts de Caen (œuvre détruite en 1944)
Décoration peinte de la Salle Péristyle de la Sorbonne, neuf panneaux, huile sur toile marouflée, 1886-1889, dimensions totales : H. 4,20 × L. 35,00, Paris, Sorbonne :