Vierge de ferUne vierge de fer, également appelée vierge de Nuremberg, est un instrument de torture ayant la forme d'un sarcophage en fer ou en bois, garni en plusieurs endroits de longues pointes métalliques qui transpercent lentement la victime placée à l'intérieur lorsque son couvercle se referme. Son existence en tant que réel instrument de torture historique est toutefois très sujette à caution :
— Remy de Gourmont, Promenades littéraires[1] Principes similaires durant l’AntiquitéOn trouve dans l'Antiquité des méthodes de torture analogues : Si l'on en croit saint Augustin, le consul romain Marcus Atilius Regulus aurait été supplicié à Carthage en -250 à l'aide d'un appareil ayant le même principe que la vierge de fer[2] :
— Saint Augustin, La Cité de Dieu[3] Nabis, dernier tyran de Sparte (de -205 à -192), connu pour sa cruauté, aurait fait construire une statue de ce genre qu'il appelait « La reine Apega », du nom de son épouse, à qui il livrait les citoyens réticents à payer leurs impôts[4]. Attributions contemporaines douteuses à des époques antérieuresOn ne trouve aucune trace d'un tel instrument de torture dans les documents antérieurs à la fin du XVIIIe siècle[5]. Il existe par contre beaucoup de récits postérieurs, basés sur des on-dit ou des légendes, qui relatent la présence de tels mécanismes :
— Antoine Jean-Baptiste d'Aigueperse, Œuvres archéologiques et littéraires[6] L'emploi par la comtesse Élisabeth Báthory (1560-1614) d'une vierge de fer pour saigner ses victimes afin de prendre des bains dans leur sang, est une fabulation contemporaine inspirée par le roman noir de l'écrivaine surréaliste Valentine Penrose, Erzsébeth Bathory : la comtesse sanglante (1962). L'existence d'un tel instrument de torture n'est mentionnée nulle part dans les archives relatives à la comtesse[7]. En outre, s'agissant des bains de sang, « cette accusation est absente des procès-verbaux et des correspondances » et n'est soutenue par aucune preuve, ni aucun témoin lors de son procès[8],[9]. Sans plus de preuves, la présence de vierges de fer dans de nombreux châteaux et prisons d'Europe a été avancée par des auteurs du XIXe siècle :
— F. Nork, Les mœurs et usages des Allemands et des peuples voisins[10]
— Georges Verdène, La torture, les supplices et les peines corporelles et afflictives dans la justice allemande[11] Origine du mytheLes historiens ont établi que le mythe avait été créé en 1793 par le philosophe allemand Johann Philipp Siebenkees (1759-1796) à partir d'une prétendue mention figurant dans une chronique de Nuremberg datée du XVIe siècle, stipulant l'érection dans cette ville d'une vierge de fer (eiserne Jungfrau) qui déchirait les mécréants avec de petites épées, les morceaux de chair étant ensuite donnés en pâture aux poissons. Siebenkees s'est probablement inspiré des manteaux de la honte (Schandmantel) médiévaux, parfois appelés « vierges », qui étaient faits de bois parfois doublé d'étain, mais ne contenaient pas de pointes[5]. Il s'agissait d'un moyen de punition, courant à partir du XIIIe siècle, comparable dans ses effets au pilori. La version anglaise, plus tardive, de cet instrument était la cape d'ivrogne (Drunkards Cloak), également appelé manteau espagnol, constitué par un tonneau percé de trous qui servait à punir les ivrognes au XVIIIe siècle.
À partir du XIXe siècleLa vierge de NurembergLe dispositif le plus célèbre est la vierge de fer de Nuremberg. On n'en trouve pas de trace avant 1802, elle a donc été fabriquée au XIXe siècle sur la base de la légende créée par Siebenkees et se présentait ainsi :
L'original a été détruit dans les bombardements alliés de Nuremberg de 1944 et début 1945. Une copie en avait été achetée en 1890 par J. Ichenhauser de Londres pour le comte de Shrewsbury[13] avec d'autres instruments de torture. Elle a été présentée à l'exposition universelle de 1893 de Chicago avant d'entreprendre une tournée en Amérique[14]. Cet exemplaire a été vendu aux enchères au début des années 1960 et est maintenant exposé au Musée de la criminalité au Moyen Âge de Rothenburg ob der Tauber en Allemagne. La Mater dolorosa de MadridUn Français, ancien surveillant du palais de l'Inquisition de Madrid sous le règne de Joseph Bonaparte, (de 1808 à 1813), a raconté avec force détails en 1835 à Liège, avoir vu dans ledit palais une machine représentant la Vierge Marie et dénommée Mater dolorosa qui enserrait les accusés dans ses bras garnis de poignards pour obtenir leurs aveux. Ce récit, très marqué par le romantisme morbide de l'époque, est extrêmement suspect « Car aucun narrateur de l'inquisition n'a jamais dit un seul mot de l'emploi d'un instrument semblable, et l'officier français qui prit de force le Palais de l'inquisition de Madrid ne savait rien de cette mystérieuse Vierge décrite par le surveillant[15]. » La vierge de fer de BagdadSelon deux articles publiés par le magazine américain Time en 2003, on aurait retrouvé au siège de la fédération olympique d'Irak, une vierge de fer qui aurait été utilisée par Oudaï Hussein, le fils aîné du dictateur irakien Saddam Hussein, pour punir les athlètes aux performances insuffisantes[16],[17]. Exemplaires existantsOn trouve des modèles de vierges de fer exposés dans les musées suivants, évidemment aucune n'est authentique : « Dans certains musées d'antiquités, on peut voir cette mystérieuse Vierge, mais il semble bien que cet instrument n'ait été construit que pour les besoins de la cause et, qu'en réalité, il n'a jamais servi[15] ». Il en est d'ailleurs de même pour la quasi-totalité des instruments présentée dans ces musées, comme l'a établi Wolfgang Schild, professeur d'histoire du droit pénal à l'université de Bielefeld[18].
Dans la culture populaireL’aspect et le principe de la vierge de fer sont assez impressionnants pour avoir inspiré divers films et le nom d’un groupe de musique. MusiqueLa groupe de heavy metal britannique Iron Maiden, actif depuis 1975, porte le nom de la vierge de fer en anglais. Cinéma et télévision
Notes et références
AnnexesBibliographie
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