Le président sortant Hassan Rohani ne peut se représenter, la constitution limitant la durée de la présidence à deux mandats consécutifs. Seuls sont autorisés à se présenter les candidats approuvés par le Conseil des gardiens de la Constitution, qui en exclut la plupart des candidats réformistes.
Le président de la république islamique d'Iran est le plus haut fonctionnaire élu au suffrage direct du pays, le chef du pouvoir exécutif et le deuxième poste le plus important après le guide suprême. Ses prérogatives sont similaires à celles des chefs de gouvernement d'autres pays, à l'exception du contrôle des forces armées, du système judiciaire, de la télévision d'État et de quelques autres organisations gouvernementales clés qui sont sous le contrôle du Guide de la Révolution.
La reprise des sanctions ainsi que la crise sanitaire provoquée par la pandémie de Covid-19 accentuent la crise économique de l'Iran dont la monnaie, le rial, voit sa valeur chuter de moitié depuis avril 2020, et de 90 % depuis la reprise des sanctions. L'inflation s'établit à 48 % sur l'année précédant le scrutin, tandis que le déficit budgétaire atteint 6 % du PIB national[4]. La récession conduit au déclenchement d'importantes manifestations antigouvernementales courant 2019 lorsque le régime décide une augmentation du prix du carburant, dans le contexte de manifestations de grande ampleur dans les pays voisins en Irak et au Liban. Après une répression violente qui voit la mort d'environ 1 500 individus et un arrêt du mouvement, les mensonges des autorités iraniennes au sujet du crash du vol 752 Ukraine International Airlines déclenchent une nouvelle vague de manifestations anti-régime en janvier 2020, plus restreintes et mobilisant essentiellement le milieu étudiant, dans le contexte de la crise américano-iranienne de 2019-2020[5],[6].
L'élection présidentielle de 2021 coïncide avec la reprise des négociations pour une remise en œuvre de l'accord, soutenue par l'ensemble des candidats[7]. Hassan Rohani espère ainsi pouvoir arriver à un compromis avant la passation de pouvoir à son successeur en août[8].
Tout citoyen iranien né en Iran, croyant en Dieu et en la religion officielle de l'Iran — l'Islam —, qui a toujours été fidèle à la Constitution et qui est âgé de plus de 21 ans peut s'inscrire comme candidat à la présidentielle. L'Agence de surveillance des élections (EMA), gérée par le Conseil des gardiens de la constitution, examine les candidatures et sélectionne ceux considérés comme aptes à se présenter aux élections. Le Conseil des gardiens n'annonce pas publiquement la raison du rejet de certains candidats, bien que ces raisons soient expliquées à chaque candidat individuellement. Les candidatures de femmes ont toujours été exclues par le Conseil[11],[12].
En 2021, 59 310 307 personnes sont inscrites sur les listes électorales.
Candidatures
Pour être effectives, les candidatures doivent être validées par le Conseil des Gardiens de la Constitution. Lors de l'élection de 2017, la liste des candidats définitifs avaient été rendues publiques en avril, pour une élection en juin. En 2021, le dépôt officiel des candidatures est ouvert entre le 11 et le 16 mai, pour une publication des candidatures le 26 mai[13],[14].
Le , le conseil des Gardiens autorise le principe de candidature de personnel militaire à l'élection présidentielle. En 2021, deux candidats, Hossein Dehghan et Said Mohammad sont ainsi issus du corps des Gardiens de la Révolution, organisation paramilitaire dépendant directement du Guide de la révolution[15].
Le 5 mai, le même conseil annonce une restriction des critères de validation des candidatures à l'élection présidentielle, face à un nombre croissant de personnes déposant un dossier. Les candidats doivent ainsi avoir entre 40 et 75 ans au moment de l'enregistrement de leur candidature, ainsi qu'un niveau minimum d'étude et d'expérience professionnelle et managériale. Cette modification des règles a notamment pour effet de disqualifier Mohammad-Javad Azari Jahromi(en), jeune ministre de l'information du gouvernement d'Hassan Rohani et potentiel candidat pour le camp réformateur[16],[17]. Ces nouvelles règles créent une forte polémique dans le pays, les réformistes contestant au Conseil des Gardiens la capacité à définir les critères d'admissibilité[18], ce qui conduit le président Rohani à ordonner au ministère de l'intérieur d'ignorer ces nouvelles règles[19].
Un total de 592 candidatures, dont quarante de femmes, sont enregistrés le 16 mai à l'issue de la période de déclaration des candidatures.
Candidatures validées
À l'issue du processus de sélection, le porte parole du Conseil des Gardiens annonce le 25 mai que seuls sept candidats ont été confirmés pour l'élection présidentielle[20]. Comme lors des précédents scrutins, plusieurs candidats se désistent le 16 juin, juste avant la tenue de l'élection : Alireza Zakani et Saïd Jalili au profit d'Ebrahim Raïssi ainsi que Mohsen Mehralizadeh au profit d'Abdolnaser Hemmati . Seuls quatre candidats restent ainsi en lice.
Les candidats validés sont repris dans le tableau suivant[21],[22].
Les candidats suivant se sont déclarés dans la presse ou auprès du conseil de gardiens de la révolution, mais leur candidature n'a pas été validée.
Candidats conservateurs
Mahmoud Ahmadinejad, homme politique iranien et ancien président de la République islamique d'Iran de 2005 à 2013, disqualifié par le Conseil des Gardiens lors de l'élection présidentielle de 2017[27].
Mostafa Kavakebian(en) est un ancien membre du Majlis (2016-2020) et (2008-2012). Il est le candidat dédié du Parti de la démocratie. Sa candidature a été annoncée le 19 février 2021[41].
Hassan Sobhani(en) est ancien membre de l'Assemblée consultative islamique (1996–2008). Il est économiste et se présente à l'élection présidentielle de 2017 mais n'est pas approuvé. Il annonce sa candidature le 13 février 2021[48],[49].
Mohammad Gharazi est ancien ministre de l'information et des communications et de la technologie (1985–1997) et ancien ministre du pétrole (1981–1985). Candidat à l'élection présidentielle de 2013 durant laquelle il a remporté 446 000 voix, il annonce sa candidature le 15 février 2021[50].
Mohammad Abbassi(en), ancien ministre des Sports et de la Jeunesse (2011-2013). Il annonce sa candidature le 29 mars 2021[51].
Ramin Mehmanparast(en), ancien ambassadeur d'Iran en Pologne (2014 - 2018) et porte-parole du Ministère des Affaires étrangères d'Iran (2009 - 2013). Il annonca sa candidature le 30 mars 2021[52].
Abbas Nabavi, directeur de l'Institut de Civilisation et de Développement Islamique[53].
Mohammad Djavad Zarif, ministre des Affaires étrangères (depuis 2013), a annoncé en 2018, 2019 et 2021 qu'il ne se présenterait pas aux élections[56],[57],[58]. En mai 2021, Etemad(en), un journal réformiste, le place néanmoins en tête d'une liste de 14 candidats potentiels pour le camp réformiste[59]. Le 12 mai, il confirme par un post sur Instagram qu'il ne sera pas candidat[60].
Mohammad Ghalibaf, homme politique iranien et président de l'Assemblée iranienne depuis mai 2020, avait annoncé qu'il ne se présenterait pas si Ebrahim Raïssi le faisait. Il a renoncé quand ce dernier a annoncé sa candidature[61],[62].
Campagne
Une victoire du candidat conservateur Ebrahim Raïssi est attendue, celui-ci étant pressenti pour succéder au Guide de la RévolutionAli Khamenei. L'absence des principaux candidats réformistes, exclus du scrutin, devrait par ailleurs amener à un record d'abstention[63],[64],[65].
Le premier débat télévisé entre les sept candidats se déroule le 5 juin. Aucun candidat n'en sort clairement vainqueur, les échanges portant davantage sur des invectives et accusations personnelles que sur des propositions élaborées[66],[67]. Si les sujets tels que l'économie, le bilan du gouvernement Rohani sont abordés, les enjeux écologiques, et notamment la problématique de l'eau, sont absents des échanges[68],[69].
Le second débat télévisé a lieu le 8 juin[70], et le dernier débat le 12 juin[71]. Aucun candidat ne s'oppose formellement aux négociations en cours pour un retour à l'accord de Vienne sur le nucléaire iranien (aussi appelé JCPOA). L'adhésion de l'Iran aux normes anticorruption du Groupe d'action financière (ou FATF) fait l'objet d'un débat plus important. Le respect de ces normes est un des préalables à la réinsertion des banques du pays au sein du système monétaire international, et donc, dans l'hypothèse d'un retour à l'accord sur le nucléaire iranien, à la fin de l'isolement économique du pays. Ebrahim Raissi, le favori du scrutin, adopte une position prudente, affirmant que le pays les respectera « uniquement dans l'hypothèse où cela est bénéfique pour le pays », tandis qu'Alireza Zakani se positionne contre et Saeed Jalili indique que le respect de ces normes est pour lui « inutile »[34].
En matière économique, les candidats s'accordent aussi sur le fait que l'inflation et la corruption soient parmi les tout premier sujets de préoccupation pour les Iraniens[34]. En avril 2021, l'inflation sur un an était supérieure à 50 %[72].
Par ailleurs, à l'occasion des trois débats de nombreux candidats promettent aussi d'augmenter les aides financières aux foyers les plus pauvres, sans en préciser néanmoins le financement[34].
La campagne prend fin le mercredi 16 juin, deux jours avant le scrutin[74].
Sondages
Participation
Les sondages avant le scrutin suggèrent une participation exceptionnellement faible, autour de 40%[75],[76], dans un contexte d'incapacité du gouvernement Rohani à mettre en œuvre les améliorations économiques promises au début de son deuxième mandat, et où les décisions du Conseil des Gardiens ne permettent pas de disposer d'un panel de candidats représentatifs (notamment avec le blocage de la candidature de Ali Larijani). Conscient que la légitimité du système politique iranien repose notamment sur cette participation, les autorités communiquent fortement dans les dernières semaines avant le scrutin pour inciter les électeurs à aller voter[77].
Le vote est ouvert le 18 juin de 7 h du matin à minuit dans l'ensemble des bureaux de vote du pays, ainsi que dans plusieurs ambassades et consulats[78],[79].
Comme attendu, Ebrahim Raïssi l'emporte dès le premier tour avec plus de 72 % des voix. Les trois autres candidats reconnaissent un à un leur défaite dès l'annonce des résultats le lendemain du scrutin. Seuls un peu moins de 49 % des électeurs se sont rendus aux urnes, soit le taux de participation le plus bas de l'histoire de la république islamique[83],[84],[85]. Cette situation est alors sans précédent pour le régime, qui a toujours mis en avant des taux de participation élevés pour asseoir sa légitimité.
Ebrahim Raïssi prend ses fonctions le , et forme son gouvernement. Hassan Rohani ne parvient finalement pas à conclure un nouvel accord sur le nucléaire avant la passation de pouvoir.
↑Madjid Zerrouky, « Iran : le candidat réformateur Abdolnaser Hemmati peine à mobiliser pour la présidentielle », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le ).
↑« Présidentielle en Iran : l’élection d’Ebrahim Raïssi, une très mauvaise nouvelle pour la société civile iranienne », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )