Les origines de la brigade Piron se trouvent dès 1940, parmi les militaires belges qui sont parvenus à se réfugier en Grande-Bretagne après l'évacuation de Dunkerque. Il s'agit principalement de militaires belges qui ont refusé de déposer les armes le 28 mai 1940. Le premier noyau de militaires belges doit imposer son existence au gouvernement belge qui estime que la Belgique doit sortir du conflit après l'armistice entre la France et l'Allemagne. C'est après avoir menacé de rejoindre les forces de la France Libre de Gaulle qu'ils parviennent à faire entrendre leurs voix[1]. Un commandement du camp militaire belge de regroupement, sous la direction du lieutenant-général Baron van Strydonk de Burkel, est créé en Grande-Bretagne, à Tenby, le 25 mai 1940, trois jours avant la capitulation de la Belgique. Le lieutenant général van Strydonk devient commandant des forces belges de Grande-Bretagne en juin 1940 et, le même mois, le ministre Jaspar appelle tous les Belges à le rejoindre en Grande-Bretagne pour continuer le combat.
Fin juillet 1940, on trouve 462 hommes dans les forces belges de Grande-Bretagne. L’arrivée de nombreux Belges permet la création de plusieurs unités militaires terrestres. Les troupes sont entraînées en Grande-Bretagne et au Canada, et l’année 1942 voit l’arrivée en Écosse du majorJean-Baptiste Piron, qui entre rapidement dans l’état-major des forces terrestres, et reçoit la mission de parfaire l’entraînement de ces troupes. Les forces belges de Grande-Bretagne sont officiellement mises à la disposition des Alliés le 4 juin 1942, et la fin de l’année voit la restructuration des forces terrestres avec la création du premier groupement belge mieux connu sous l'appellation 1st Belgian Group, placé sous le commandement du major Piron, promu lieutenant-colonel en avril 1943. Ce groupement de taille un peu supérieure à un bataillon, est conçu comme une infanterie mécanisée autonome avec son génie, son artillerie et son escadron de blindés de reconnaissance. L’entraînement des troupes se poursuit en 1943 et des exercices de débarquement sont effectués début 1944.
Une unité luxembourgeoise de 70 volontaires est affectée en mars à la brigade qui devient donc belgo-luxembourgeoise (43 nouveaux volontaires luxembourgeois rejoignent la brigade en septembre 1944)[2]. En raison de l’appel aux Belges du monde entier, on y parle trente-trois langues. Une force plus importante aurait pu être formée avec les Belges qui combattaient au sein des armées alliées et dans la Légion étrangère française. Plusieurs des officiers belges de la campagne victorieuse d'Abyssinie ont d'ailleurs rejoint l'Angleterre pour pouvoir continuer la lutte en Europe. D'autre part, des commandos et des parachutistes composés de Belges et d'Anglais ont opéré en Yougoslavie, en Belgique et aux Pays-Bas (et plus d'une centaine d'aviateurs belges ont participé aux opérations de la RAF depuis 1940).
Le 1st Belgian Group en Normandie
Le débarquement du 6 juin 1944 se déroule sans le Groupement belge, à la grande déception des 2 200 hommes qui le composent, mais les Britanniques préfèrent les réserver pour la libération de la Belgique. Le colonel Piron fait pression sur le gouvernement belge en exil, qui lui-même sollicite le gouvernement britannique pour faire envoyer les troupes belges au front, le moral de ces troupes déclinant sérieusement.
Les blindés rejoignent le reste du groupement le 26 août à Conteville et Foulbec, jour où il passe sous le commandement de la 49e division britannique.
Le 29 août, traversée de la Seine et marche sur Le Havre le surlendemain. L’attaque est sur le point de commencer quand l'unité est subitement retirée du front. Cette décision est imposée au commandant de la 49e division britannique en raison de l'insistance du gouvernement belge de voir les troupes de Piron participer à la libération de la Belgique[6].
Le 2 septembre ordre est donné d’arriver le plus vite possible à Bruxelles, l’état-major britannique ayant l’intention de prendre la capitale le lendemain. Les troupes belges passent la frontière le 3 septembre après avoir roulé toute la nuit et entrent dans Bruxelles le lendemain.
Le passage des Belges en Normandie, sur la Côte Fleurie, a laissé de nombreuses traces (stèles commémoratives, noms de voiries[7], tombes) et une mémoire encore vivante.
Durant la Campagne de Normandie (16 août 1944 au 26 août 1944)[8], 27 hommes de la Brigade Piron perdent la vie.
Les Belges entrent en Belgique le par Rongy et arrivent à Bruxelles le . Au cours de leur progression en Belgique, la population, incrédule à l'idée d'être libérée par des compatriotes, les prend parfois pour des Canadiens francophones.
Une anecdote : des cadreurs belges qui accompagnaient les troupes alliées se trouvèrent soudain en pointe (imprudemment, car la Wehrmacht n'était pas loin), alors qu'ils roulaient sur la « chaussée de Mons ». Passant en face du laboratoire cinématographique Labor Ciné situé à l'entrée de la commune bruxelloise d'Anderlecht, que certains d'entre eux connaissaient pour en avoir été les clients avant la guerre, l'idée leur vint d'y entrer. Or, le laboratoire avait été réquisitionné par l'armée allemande qui, peu auparavant, y avait encore fait développer des négatifs. Et c'est dans les bains de développement qui avaient reçu les dernières images allemandes de l'occupation de la Belgique que furent développées quelques-unes des premières images de la libération du pays tournées par des cadreurs belges.
Le groupement belge libère d'autres villes et entre aux Pays-Bas le , pendant que des éléments motorisés de l'armée belge en voie de reconstitution libèrent une partie du Limbourg et Maaseik. La campagne de Hollande dure jusqu'au , date à laquelle le groupement est relevée du front et part au repos à Louvain.
Dans cette ville, les effectifs sont portés à ceux d'une brigade d'infanterie à trois bataillons par l'incorporation de 2 400 volontaires. Le 1st Belgian Group devient alors la Première Brigade d'infanterie. Mais cette nouvelle brigade perd son caractère d'unité intégrée avec le départ de ses blindés, de son artillerie et de son génie.
Ensuite, c'est le retour aux Pays-Bas entre le et début .
Dans la petite ville néerlandaise de Thorn, un pont porte son nom en honneur de sa libération le .
Sept hommes de la Brigade Piron perdent la vie durant la Campagne de Belgique (10 septembre au 27 septembre 1944) et 46 autres durant la Campagne de Hollande (25 septembre 1944 au 29 avril 1945)[9].
La 1st Belgian Brigade en Allemagne occupée
À partir du [10], la Première Brigade d'infanterie occupe en Rhénanie-du-Nord-Westphalie un secteur de la zone britannique, et ce jusqu'au .
Après-Guerre
La Première Brigade d'infanterie est à la base de la nouvelle armée belge qui occupa, durant toute la guerre froide, un créneau de l'OTAN s'étendant de la frontière belge au rideau de fer. Elle fut renommée Brigade Libération et fut stationnée finalement à la caserne de Bourg-Léopold.
Documentation
Films
La brigade Piron, le pont de l'union, réalisé par Vincent Pouchain, France Télévisions - RTBF, 2020, 52 minutes.
Vidéo
La Brigade Piron, Bruxelles, SID, DEFENS (Bibliothèque Défense), 40 minutes.
Anonyme, Vers l’Avenir - I. L'entraînement en Angleterre et la campagne de Normandie. - II. La campagne de Belgique, 10-11 juin 1976.
A., H., La Dernière Heure, Ce que nous dit le général de Brigade sir Alexander B.G. Stanier (Trente ans après. "Ca m'est arrivé à la libération..."), 3 septembre 1974
Henri Demaret, La brigade Piron, 39-45 Magazine, No 71, 1992, p. 38-46
Yves Aublet, La Brigade Piron, l’Athéna sur la Toucques, numéro spécial juin/septembre 1994, numéro 120/121, Association des amis du musée de Trouville et du Passé Régional. Occupation et Libération de Trouville-Deauville et alentours. p. 100-105.
Hugues Wenkin, Les moutons noirs de Piron! : la brigade Piron de la Normandie au cœur du Reich, Neufchâteau, Weyrich, , 247 p. (ISBN978-2-87489-408-4).
Hugues Wenkin, La brigade Piron en Normandie, Heimdal, 2024 (ISBN978-2-84048-621-3).
(nl) Inge Huygebaert, Jean-Baptiste Piron, de man achter de Brigade, Koninklijke Militaire School Brussel. Alle Wapens Afdeling, 2004, 123 feuilles.
Pierre Musschoot, l’unité de ravitaillement de la « Brigade Piron. Un essai historique, Hamois-en-Condroz, Editions Vezham, 1999, 35 pages.
Roland Breyne, La Brigade Piron, Louvain-la-Neuve, Université Catholique de Louvain, Séminaires d'histoire contemporaine consacrés à la vie quotidienne pendant la Seconde Guerre mondiale en Brabant wallon, Hainaut et Namurois, 1985, 78 pages.
Jacques Wanty, Combattre avec la Brigade Piron; Bruxelles (coll. 'Vécu par les Belges'), 1985.
(nl) Louis Wuyts, De ontscheping in Normandië. Een hel van tachtig eindeloze dagen. Frans Jacobs uit Peutie bevocht de Duitsers als soldaat van Brigade Piron, Zondagnieuws, 11 juin 1984.
Jacques Dollar et Robert Kayser, Histoire de la "Luxembourg Battery", Impr. Centrale, Soc. Anonyme, (OCLC643200897).
Guy Weber, Des hommes oubliés : histoire et histoires de la Brigade Piron, L. Musin, (OCLC464714738).
Michael Demarets, (dessins), Carnet de Campagne. La Brigade Piron en Normandie, Editions Erel, Ostende, 1946, 56 pages.
René Didisheim, Histoire de le Brigade Piron, Editions PIM, Liège, 1946, 174 pages.
Guy Weber, Maurice Poncelet (1904-1985), le cerveau de la Brigade Piron, S.N.S.1., date inconnue, 97 feuilles.
André Charlier, Brigade Piron : 1944 d'un jour à l'autre, Édité à compte d'auteur, Relate la campagne de la brigade en Normandie au jour le jour.
(nl) Hans Rombaut, La Biographie du Général Victor van Strydonck de Burkel, Nationaal Biografisch-Woordenboek 22, Bruxelles, 2016.
Une édition à compte d’auteur de Charles Albert Houtart et d’Anita Gatto-van Strydonk de Burkel d’un recueil de documents dont des inédits (titre, van Strydonck de Burkel) consultable à la Bibliothèque royale de Belgique – section des éditions privées sous la lettre H (de Houtart), Bruxelles, 2020, 153 pages.
Notes et références
↑Hugues Wenkin, Les moutons noirs de Piron! la brigade Piron de la Normandie au cœur du Reich!, Weyrich, (ISBN978-2-87489-408-4)