D'une superficie approximative de 4 000 km2 (100 × 40 km) pour sa partie sous le niveau global des océans, la dépression de l'Afar est majoritairement située dans l'est de l'Éthiopie mais couvre aussi le centre de l'Érythrée, le sud de Djibouti et l'extrême nord-ouest de la Somalie[2].
Il y a 40 Ma[5], la remontée active du manteauasthénosphérique, qui correspond à un panache mantellique venant s'écraser à la base de la lithosphère[Note 3], à l'aplomb de la région de l'Afar, est à l'origine du magmatisme, de l'extension, et de la dépression centrale due à la subsidence tectonique[6]. Cette remontée est associée à un volcanisme fissural de point chaud qui engendre il y a 30 Ma une épaisse série de trapps (trapps éthiopiens et trapps du Yémen). Cette série accumulée sur 2 500 m d'épaisseur et sur une superficie de 500 000 km2 (à peu près la superficie de la France), « précède l'effondrement, qui est à son tour suivi par l'émission de plusieurs séquences de coulées basaltiques très volumineuses (trapps du Dalha, 8–4 Ma ; basaltes stratoïdes de l'Afar, 3–1 Ma)[Note 4] et l'édification de très grands volcans centraux dans l'axe du système de rifts (Erta Ale, Oldoinyo Lengai) et sur ses marges (mont Kenya, Kilimandjaro)[7] ».
Les « chaines volcaniques axiales » de l'Afar sont de type « océaniques » (au plan tectonique et magmatique) et assurent le relais entre les vallées axiales de la mer Rouge et celles du golfe d'Aden, de sorte que la frontière des plaques entre l'Afrique et l'Arabie ne passe pas « en mer » par le détroit de Bab-el-Mandeb, mais à terre à travers l'Afar. La nature de la tectonique et du volcanisme de l'Afar se distingue ainsi de celle du rift africain, qui reste un « rift continental » n'ayant pas donné lieu à la génération de croûte océanique nouvelle.
Climat
La dépression de l'Afar est une des zones les plus chaudes, les plus arides et les plus stériles du globe. Les précipitations moyennes annuelles y sont très faibles et les températures moyennes très élevées, ce qui fait de cette région un désert, le désert Danakil. De plus, les sols sont relativement pauvres, surtout dans les parties basses de la dépression et dans les zones volcaniques, en raison de la présence de lave et d'eau de mer qui s'infiltre et s'évapore en laissant des dépôts de sels.
Site paléontologique
Les eaux de ruissellement en provenance des hauts plateaux et les sources hydrothermales consécutives aux éruptions volcaniques, ont contribué à la formation de nombreux lacs dans la vallée du Grand Rift et l'Afar, favorisant une faune de bord de lac venant s'abreuver. Ce milieu de sédimentation rapide facilite la fossilisation et les couches de basalte marquant chaque éruption volcanique, permettent de dater ces fossiles. « Les couches de sédiments accumulées depuis plusieurs millions d’années ont constitué un « piège à fossiles » très efficace, que les mouvements tectoniques ont ensuite basculé par endroits, amenant en surface des ossements qui, sans cela, n’auraient probablement jamais été découvert », ce qui fait de ce rift « un terrain de chasse rêvé pour les paléontologues[11] ». Le grand nombre de sites fossilifères dans la région témoigne de crues qui auraient charrié de nombreux cadavres avant de les recouvrir de sédiments, expliquant la concentration de fossiles en un même site[12]. Au sein du rift, l'Afar reste une région d’intérêt majeur pour les paléontologues travaillant sur l’évolution des hominidés. De nombreux fossiles y ont été découverts, dont des spécimens d'Ardipithecus ramidus et d'Ardipithecus kadabba ; le crâne d'hominidé appelé crâne de Gawis(en) ; des outils en pierre parmi les plus anciens du monde. Hadar, le site de Lucy, spécimen fossilisé d'Australopithecus afarensis, et Dikika, le site de l'enfant fossilisé Selam, un hominine également de l'espèce Australopithecus afarensis, se trouvent dans la dépression de l'Afar[13].
Volcanologie
La dépression de l'Afar est étudiée par Haroun Tazieff dès la fin des années 1960 et il en sort un ouvrage intitulé L'Odeur du soufre et sous-titré Expéditions en Afar.
Histoire
Les différences environnementales entre les hauts plateaux éthiopiens et la dépression « définissent approximativement une frontière traditionnelle économique, politique et culturelle entre deux mondes que tout semble séparer : l’Abyssinie agraire, sédentarisée, étatisée, christianisée ; l’Afar pastoral, nomade[Note 5], clanique, islamisé[14] ».
Notes et références
Notes
↑Carte topographique et structurale de la dépression de l'Afar, tirée de (en) Ian D. Bastow, Adam D. Booth, Giacomo Corti, Derek Keir, Craig Magee, Christopher A.-L. Jackson, John Warren, Jason Wilkinson, Matteo Lascialfari, « The Development of Late-Stage Continental Breakup: Seismic Reflection and Borehole Evidence from the Danakil Depression, Ethiopia », Tectonics, vol. 37, no 9, , p. 2848-2862 (DOI10.1029/2017TC004798).
↑Carte topographique, déduite d'un modèle numérique de terrain, tirée de (en) Paolo Billi, Landscapes and Landforms of Ethiopia, Springer, , p. 215. Légende : AA Aleyu– Amoissa ; Ado Ado Ale; AnBF Ankober border fault ; BG Borkena graben; Bo Borama; D Dabbahu ; Da Dallol ; De Der'Ela graben ; DG Dobi graben; EAR Erta Ale range; GG Gaddale graben; HG Hanle graben; IG Immino graben; MH Manda–Hararo ; MI Manda-Inakir rift; TG Tendaho graben.
↑D'un diamètre initial de 700 km, ce panache se serait développé au contact de la lithosphère continentale pour atteindre près de 1 500 km de diamètre entre 30 Ma et 20 Ma, et déplacé avec la plaque arabo-africaine depuis au moins 20 Ma. Il est actuellement centré sous le lac Abbe. Il induit le réchauffement de la lithosphère, produisant un halo thermique d'environ 500 km. Cf Jean-Renaud Boisserie, « Évolutions tectonique, environnementale et humaine dans le triangle afar », Annales d'Éthiopie, vol. 25, no 1, , p. 119 (DOI10.3406/ethio.2010.1410).
↑(en) Thomas Redfield, W.H. Wheeler, Morten Often, « A kinematic model for the development of the Afar Depression and its paleogeographic implications », Earth and Planetary Science Letters, vol. 216, no 3, , p. 383-398 (DOI10.1016/S0012-821X(03)00488-6).
↑(en) Alebachew Beyene, Mohamed G.Abdelsalam, « Tectonics of the Afar Depression: A review and synthesis », Journal of African Earth Sciencesl, vol. 41, nos 1–2, , p. 41-59 (DOI10.1016/j.jafrearsci.2005.03.003).
↑Gilles Chazot, René Charles Maury, Jean-François Lénat, Arnaud Agranier, Olivier Roche, Volcanologie, De Boeck Supérieur, , p. 79.