Gégène est un terme de l'argotmilitaire français, désignant un générateur électrique portatif dont l'utilisation première est d'alimenter les radiotéléphones portatifs de campagne. La gégène fut utilisée pour torturer des personnes en leur appliquant les électrodes afin de faire circuler un courant électrique entre diverses parties du corps.
Étymologie
Gégène est l'abréviation de groupe électrogène avec redoublement, pour faire jeu de mots avec Gégène, forme populaire du prénom Eugène[1].
Histoire
La torture à l'électricité a très souvent été utilisée depuis l'apparition des premiers générateurs. La gégène n'est qu'une variante « portative » de cette dernière.
Elle fut utilisée dès les années 1930 par la Sûreté générale indochinoise entre autres chargée de la répression des mouvements nationalistes vietnamiens[2]. Elle fut ensuite utilisée durant la guerre d'Algérie, par les militaires français, notamment durant la bataille d'Alger, sur les membres présumés du Front de libération nationale (FLN), pour leur soutirer des informations[3], tels que les emplacements de bombes à retardement.
Technique
Le générateur se présente comme une dynamo électrique manuelle à manivelles, destinée à alimenter une radio portative de 67 à 135 volts et de basse intensité[4].
Dans le cas des tortures à l'électricité, le principe était de placer les électrodes à différents endroits du corps, afin que le courant électrique – un courant continu de basse tension – traverse celui-ci. La plupart du temps une électrode était placée sur une oreille et l'autre sur les parties génitales, ce qui permettait, selon l'intensité et la durée d'utilisation, de dépasser le seuil de douleur d'électrisation propre à chaque individu, dans le but d'obtenir des renseignements.
Malachi Farrell a réalisé une œuvre intitulée La Gégène. Il s'agit d'une association de machines et écrans, diffusant des extraits de documentaires sur la guerre d'Algérie, des automates et qui « reproduit » le déroulement d'un acte de torture. Cette œuvre appartient à la collection permanente du Musée d'art contemporain du Val-de-Marne[6].
Dans la chanson Le bruit des bottes (1975) de Jean Ferrat, la gégène est mentionnée : "À coup d'interrogatoires, de carotte et de bâton, de plongeon dans la baignoire, de gégène et de tison[7]".
Notes et références
↑Alain Rey, Dictionnaire culturel en langue française, t. II, Le Robert, (ISBN978-2-84902-177-4), p. 1293.
↑Pierre Brocheux et Daniel Hémery, Indochine, la colonisation ambiguë, Paris, éditions la découverte, , 447 p. (ISBN2-7071-3412-0), p. 112