Dans l'Espagne du début des années 1980, entre la mort de Franco (1975) et la tentative de putsch militaire du 23 février 1981, deux policiers aux méthodes et au tempérament opposés sont envoyés depuis Madrid dans les marais du Guadalquivir pour enquêter sur l'assassinat sauvage de deux adolescentes pendant les fêtes locales d'un village andalou. Braconnage, contrebande, trafic de drogue, meurtres en série de jeunes filles naïves, déviation sexuelle et collusion entre potentat local et police constituent un écheveau aussi tortueux que les chemins du marais. S'y ajoute pour ce couple de policiers la difficulté d'associer leurs deux tempéraments : le subordonné, Pedro, jeune et sur le point d'être père, tourné vers l’avenir démocratique de son pays et d'une rigueur intransigeante, et le chef, Juan, vieux de la vieille, fin connaisseur de la pâte humaine quelque peu alcoolique, adepte de la séduction et des méthodes musclées voire border-line, dont l'apparente assurance est minée par son passé franquiste.
Au cœur des marécages de cette région de riziculture très pauvre, fortement ancrée dans les vestiges de la société agrarienne pré-républicaine et dominée par la loi du silence, ils vont devoir associer leurs différences pour démasquer le tueur et faire justice[3].
Finesse de l'analyse psychologique :
5,0 Publiée le 23 juillet 2015
"L’intelligence du réalisateur est d’explorer la part d’ombre de chaque protagoniste avec une habileté déconcertante."
"La Isla Minima, un film inspiré sur la transition post-franquiste : note : 5,0 Publiée le 27 juillet 2015
« La isla minima » est une réussite quasi-totale. Un polar de Grande qualité, de la première à la dernière image, tant sur la forme que sur le fond. Les paysages andalous, souvent filmés de haut et à la verticale, sont incroyables, vus d’avion, et ressemblent à des cerveaux humains, des peintures abstraites d'une grande complexité, c’est très beau et ça donne d’entrée le ton de cette réflexion sur la difficulté espagnole à survivre au franquisme. Alberto Rodriguez maitrise de bout en bout son film, utilisant la musique de manière minimaliste au profit des bruits naturels (d’oiseaux notamment), et filmant les scènes d’action et notamment l’affrontement final, de manière réaliste, ramassée et tendue. (...)
Ce qui donne au film un relief particulier, c’est qu’il se situe dans cet entre-deux qui sépare la dictature et la démocratie, situation bâtarde et instable qui donne au film sa couleur particulière. Officiellement le franquisme est mort, en réalité il est encore partout : les portraits de Franco sont encore sur beaucoup de murs, jusque dans les lieux publics. Il n’y a pas eu de purge dans l'administration, et spécialement dans la Police. L’armée, omniprésente, arrogante, fait encore peur. Et la pauvreté domine. En 1980 l'Andalousie est plus que jamais une terre d’émigration, les gros propriétaires terriens payent leur journaliers une misère, la société est à cran, et la pression monte dans ce pays renfermé sur lui-même depuis plus de trente ans."
Autour du film
Itinéraire touristique
À la suite du succès du film, et pour diversifier l'économie locale, la province de Séville a aménagé une route touristique dite de La Isla Mínima à travers les marais du Guadalquivir[6].
↑"Isla Minima" est le nom précis du lieu - réel - où se situe l'action. Il s'agit d'un secteur des marais côtiers situés dans l'ancien estuaire du Guadalquivir en Espagne, provinced'Andalousie. La riziculture en est la principale activité, voir Francis Fourneau, « La riziculture dans les Marismas del Guadalquivir : Isla Minima », . L'organisation des routes, canaux, sentiers marécageux de ce parc naturel à l'écosystème d'une grande richesse, constitue un dédale complexe qui participe à l'intrigue du film.