Mouvement de TechouvaLe mouvement de techouva (« mouvement de repentance » ou de « retour ») est un phénomène mondial de retour au judaïsme ou à un judaïsme plus orthodoxe, parmi le peuple juif. Il a commencé vers le milieu du XXe siècle, quand un nombre important de Juifs auparavant hautement assimilés a décidé de se remettre à pratiquer le judaïsme. Le voyage spirituel et religieux de ceux qui ont choisi cette voie, les a menés vers toutes les sensibilités du judaïsme, certains allant même jusqu'à l'étape extrême du judaïsme orthodoxe et ses branches telles que le judaïsme Haredi et le judaïsme hassidique. Ce mouvement a continué jusqu'à nos jours et fait l'objet d'études par des chercheurs qui ont écrit des articles et des livres sur sa signification dans l'histoire juive moderne. En réponse à ce mouvement parmi le peuple juif, les différentes autorités religieuses et les rabbins des différents courants du judaïsme, libéral ou réformé, Massorti ou conservateur, mais plus spécialement ceux du judaïsme orthodoxe, essayent d'apporter des réponses spécifiques et des programmes d'assistance et d'aide. Les termes « kiruv » ou « kiruv rechokim » (« ramener les éloignés ») et « baal techouva » sont souvent associés pour indiquer aussi bien les Juifs retournant au judaïsme traditionnel que les efforts et les soutiens à ce phénomène. Le mouvement de techouva s'est développé partout où vivent des Juifs et pour différentes raisons D'après le New York Magazine:
Pour cette raison, le mouvement de techouva, en tant que version moderne des mouvements juifs nationaux et internationaux antérieurs, s'est étendu à toutes les cultures, tous les continents et toutes les communautés. Les Juifs de l'ancienne Union soviétique ont peu de choses en commun avec les hippies américains ou les maoïstes français, et les Israéliens ont peu de choses en commun avec les Juifs d'Afrique du Sud ou d'Australie, mais dans tous ces pays et dans leurs centres juifs, se sont développés des mouvements de techouva parmi toutes les professions et à tous les niveaux socioprofessionnels. . Ce mouvement de 'retour' et les conditions qui l'entourent ont attiré l'attention du président des États-Unis, Ronald Reagan, qui dans un discours en 1984 devant le B'nai B'rith, a dit en citant Irving Kristol:
Origines du mouvementAux États-UnisCe mouvement est apparu identifiable dans les années 1960, quand un nombre croissant de jeunes Juifs, élevés dans des familles juives américaines non pratiquantes, ont commencé à développer un fort intérêt dans la pratique du judaïsme, et parmi eux, beaucoup, en contradiction avec les attentes sociologiques, par la pratique du judaïsme orthodoxe. Le rabbin Yosef Blau, Mashgia'h rou'hani de l' université Yeshiva de New York explique:
Le mouvement de techouva n'a pas concerné uniquement le judaïsme orthodoxe, mais est un phénomène beaucoup plus large qui a été étudié et commenté par des sociologues, des historiens et des penseurs juifs depuis les années 1960. Le mouvement de techouva a été à l'origine amplement inspiré par la contreculture des années 1960 et 1970, par le mouvement hippie (le rabbin musicien Shlomo Carlebach a essayé et a en partie réussi à canaliser cette contreculture et la musique dans une direction juive au travers de sa musique et de son enseignement[4]), par le Festival de Woodstock, la sous-culture de la drogue, par le nouvel intérêt aux religions orientales, que le rabbin Aryeh Kaplan a essayé de canaliser vers la religion juive par ses écrits, et enfin par l'esprit de rébellion de la jeunesse qui envahissait les campus des lycées et universités américains. C'est en prenant connaissance de ce phénomène et pour y répondre que le Rabbi des Loubavitchs, Menachem Mendel Schneerson (1902-1994), envoya des émissaires, pour entrer en contact avec ces jeunes et les « recruter » pour le judaïsme. Alors que l'origine des premiers retours au judaïsme semble reliée en partie à l'atmosphère ambiante anti-establishment des années 1960, son extraordinaire développement est le résultat de l'envolée de la fierté juive à la suite de la victoire d'Israël en 1967 lors de la guerre des Six Jours: « On peut dire que l'inspiration provoquée par la guerre des Six Jours a alimenté les débuts du mouvement de techouva[5]». Les recherches effectuées par Janet Aviad suggèrent aussi que la victoire souvent proclamée miraculeuse d'Israël en 1967 a donné un élan au mouvement de techouva[6]. Bien que les effets de la Shoah et l'emprise du mouvement de contreculture aient conduit beaucoup à abandonner leur éducation religieuse, d'autres ont désiré expérimenter des styles de vie libérés alternatifs, et pour cela ont exploré la vie religieuse juive, avec la pratique du chabbat, les prières intensives et l'étude approfondie du Talmud et de la Torah. Beaucoup ont adopté la façon de vivre du judaïsme orthodoxe, bien que certains par la suite ont quitté le mouvement orthodoxe pour rejoindre le judaïsme conservateur ou libéral et qu'une petite minorité se sont orientés vers d'autres croyances.
Dans l'ancienne Union soviétiqueLe mouvement de techouva est apparu aussi dans les territoires de l'ancienne Union soviétique, qui avait presque totalement sécularisé sa population juive. L'essor de la fierté juive est apparu en réponse au développement de l'État d'Israël, à la politique pro-arabe et antisioniste de l'URSS et en réaction à l'antisémitisme en URSS. La victoire d'Israël lors de la guerre des Six Jours, en 1967 a enflammé le cœur des Juifs soviétiques et plus particulièrement de Russie. Soudainement des centaines de milliers de Juifs ont désiré s'installer en Israël, bien qu'ils n'osaient pas exprimer leur désir ouvertement. Plusieurs milliers ont fait des demandes de visa pour Israël et ont été instantanément frappés d'ostracisme par les organisations gouvernementales y compris par le KGB. Plusieurs centaines deviennent alors des refuzniks (otkazniks en russe), prêts à être internés pour démontrer leur sionisme. En plus, parmi la population juive, apparaît un nouvel intérêt pour l'étude et la pratique du judaïsme, un désir que le gouvernement communiste avait depuis longtemps essayé d'éradiquer. De nombreux Juifs russes commencèrent à étudier les textes juifs qu'ils arrivaient à se procurer. Des rabbins étrangers vinrent les visiter afin de leur enseigner comment apprendre la Torah et comment observer les lois juives. Les objets rituels juifs comme les téfilines, les mezouzot, les siddourim, et même la matza, étaient envoyés illégalement en Russie. Après la chute du régime communiste, de nombreux textes religieux ont été imprimés en russe et envoyés aux Juifs russes vivant en Russie, mais également à ceux vivant aux États-Unis et en Israël. Le mouvement de retour au judaïsme a été un mouvement spontané venant de la base qui a alimenté le mouvement refuznik; Il a pris par surprise les autorités soviétiques et même la communauté juive en dehors de l'Union soviétique et a contribué à l'aliyah des Juifs des États de l'ex-Union soviétique après la chute du communisme. De jeunes leaders sont apparus tels que Yosef Mendelevich, Eliyahu Essas (qui est devenu rabbin), Herman Branover, et Yitzchok Kogan, qui tous ont émigré en Israël et sont actuellement très actifs auprès des émigrés russes en Israël, ainsi que Kogan qui dirige une communauté à Moscou. En IsraëlPendant les années 1960, est apparu un mouvement parmi les Juifs israéliens séculiers qui correspondait à une recherche de spiritualité. À cette époque, la majorité des parents israéliens étaient des sionistes séculaires. Cette quête spirituelle a entraîné certains Israéliens à rechercher des réponses dans la tradition juive. Le rabbin Aharon Feldman observe que:
En Israël, des écoles spéciales ont été créées pour les nouveaux religieux, consacrées à l'étude intensive de la Torah, des textes classiques et aux commentaires rabbiniques anciens. Ces écoles se sont ouvertes principalement à Jérusalem à partir du début des années 1970. Les deux plus significatives sont la yechiva Aish HaTorah ("Le feu de la Torah"), dirigée par le rabbin Noach Weinberg, et la Yechiva Ohr Somayach ("Joyeuse lumière") dirigée par le rabbin Nota Schiller[9]. Ces deux rabbins sont diplômés d'universités américaines et sont capables de discuter avec la tournure d'esprit du monde moderne. Les Hassidim avec de nombreuses maisons de prières d'un bout à l'autre d'Israël et des programmes de yechiva destinés aux Israéliens, aux Russes, aux Français et aux Américains réussissent à atteindre des milliers de personnes. Leurs adeptes se rassemblent au Mur des Lamentations, à l'aéroport international David-Ben-Gourion, ainsi qu'en d'autres lieux publics pour mettre les téfilines et pour distribuer le vendredi des bougies de chabbat. Le rav Amnon Yitzhak prétend pouvoir ramener plus de 1 million de Juifs vers la Torah. En FranceLe phénomène de téchouva est aussi perceptible en France. Dans les années 1960, de nombreux étudiants d'origine juive militent dans des mouvements gauchistes, trotskistes ou maoïstes. Ils furent parmi les leaders du mouvement étudiant de mai 68, comme Alain Geismar, Alain Krivine, Daniel Cohn-Bendit. Dans les années qui suivirent ces événements, certains ont continué à militer dans des mouvements d'extrême gauche (Krivine), d'autres ont continué à faire de la politique, mais de façon plus modérée (Cohn-Bendit rejoignit le mouvement des écologistes), d'autres abandonnèrent complètement la politique. Enfin certains ont fait techouva, retrouvant leurs origines juives et la pratique religieuse de leurs ancêtres. Un des exemples les plus marquants est celui du philosophe Benny Lévy (1945-2003), maoïste, fondateur et dirigeant de la Gauche prolétarienne, qui devint le secrétaire particulier de Jean-Paul Sartre. Après la mort de Sartre, il part étudier la Torah à la yechiva des étudiants de Strasbourg, avant d'émigrer en Israël où il écrira entre autres, un traité sur le messianisme juif moderne. Challenges, critiques et difficultésComme tout mouvement social, il y a des controverses et des critiques. Des chercheurs ont étudié le taux de personnes quittant ce mouvement et les raisons[10], ainsi que les nouveaux challenges qui apparaissent:
En dépit des barrières et des challenges, le mouvement de techouva n'a perdu ni sa force ni son élan, et continue de croître spontanément parmi les Juifs de tous secteurs et de toutes classes, dans le monde entier. Cependant, bien que ce mouvement ait un grand impact, il a aussi ses limites:
Voir aussiRéférences
Liens externes
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