Brad Mehldau explique : « je ne me repose plus sur la structure des morceaux pour mes improvisation, comme c'est le cas dans l'approche classique du jazz basée sur thème et variation. À la place, j'utilise des morceaux de la mélodie comme des motifs à partir desquels je construis un schéma harmonique »[2]. On peut notamment entendre cette approche sur le Countdown de John Coltrane ou sur Smells Like Teen Spirit de Nirvana[2].
Le répertoire est pour une bonne constitué de morceaux emblématiques de la « génération X[2] » (Massive Attack, the Verve, Stone Temple Pilots, Radiohead, etc.), selon les termes du pianiste « une musique qui parle de la façon dont on se sent perdu et sans attache dans ce monde[2] ».
Pour choisir les morceaux, Mehldau a réécouté 40 concerts donnés en Europe entre 2004 et 2014, enregistrés par son ingénieur du son ou par les radios publiques (Radio Danoise, BBC et Radio France)[3]. Il a ensuite gardé des morceaux issus de 19 concerts[3], organisés en 4 parties, chacune racontant une histoire différente[4].
Nate Chinen (The New York Times) décrit l'album comme « un autoportrait ambitieux, trouvant d'infinies possibilités à travers une formule très simple », « qui figure parmi les enregistrements les plus impressionnants du pianiste[2] ».
Pour Matt Collar (AllMusic), « en son for intérieur, Mehldau est un philosophe et un poète, et sur cet album il plonge au plus profond de son inspiration[5] ».
Pour Xavier Prévost (Les Dernières Nouvelles du Jazz), « le voyage est envoûtant, vertigineux : c'est du grand piano de jazz, du grand piano tout court, bref de la grande musique au sens le plus œcuménique du terme[3] ».
Guillaume Bourgault-Côté (Le Devoir) affirme que l'album est « d’une clarté, d’une précision, d’une cohérence totales[7] ».
Doug Collette (Glide Magazine) souligne que « l'intensité de la concentration [de Mehldau] sur le clavier lui donne un contrôle extrêmement fin de la sonorité, […] les contrastes sonores s'équilibrent parfaitement à l'intérieur des morceaux ainsi que dans l'ensemble de l'album[10] ».
Structure de l'album
L'album est construit en 4 parties, chacune ayant sa personnalité et sa logique.
Part 1 Dark/Light
La première partie alterne entre des moments sombres (Dream Brother, Jigsaw Falling into Place, And I Love Her, My Favorite Things) et des moments lumineux (Blackbird, Meditation I – Lord Watch Over Me, This Here), comme Mehldau aime à le faire quand il conçoit la setlist de ses concerts[1]. Le répertoire est presque entièrement constitué de reprises, qu'il joue en donnant un nouvel éclairage[10].
Bien que les enregistrements soient d'origines variées, cette partie est conçue comme un concert en solo tel que Mehldau pouvait en jouer autour de 2010-2011[1],[10].
Cette partie emprunte son titre à l'avant-dernier mouvement de la Sonate pour piano no 3 de Johannes Brahms. « Rückblick » signifie « regard en arrière » : il s'agit de regarder ce qui a été fait avant d'aller vers le mouvement final. Il s'agit donc de retrouver de la musique enregistrée par Mehldau il y a plus de dix ans, tout en restant dans des formes relativement courtes telles que celles de Brahms dans ses Intermezzos[1].
La dernière partie peut se rapprocher de la première, Dark/Light, mais cette fois en mettant l'accent sur la tonalité de Mi, oscillant entre le mineur et le majeur, parfois en fort contraste, souvent en s'entremêlant[1].