Si vous disposez d'ouvrages ou d'articles de référence ou si vous connaissez des sites web de qualité traitant du thème abordé ici, merci de compléter l'article en donnant les références utiles à sa vérifiabilité et en les liant à la section « Notes et références ».
André Dumortier naît à Comines (commune frontalière du Hainaut Occidental, en Belgique) en 1910, dans un milieu ouvert à la musique (sa mère est professeur de piano). En 1919, conséquence des vicissitudes de la guerre[1], la famille s'installe à Tournai. André Dumortier intègre alors en qualité de choriste la Maîtrise de la cathédrale Notre-Dame — pour y découvrir le répertoire de la musique sacrée —, ainsi que le Conservatoire de la ville — où il est l'élève de Jules Detournay[2] (classe de piano).
Ses études sont couronnées par un Premier Prix (1927), puis par un Diplôme de Virtuosité (1931).
En 1935, au Conservatoire de Paris, il accompagne le jeune violoniste Arthur Grumiaux dans un récital qui suscite l'enthousiasme du directeur de l'établissement, Henri Rabaud. À Paris encore, André Dumortier approfondit la musique de Bach auprès de la claveciniste polonaise Wanda Landowska, perfectionne son jeu pianistique avec Yves Nat, noue des contacts avec le compositeur Francis Poulenc.
À plusieurs reprises, il siège en qualité de membre du jury au Concours International Reine Élisabeth de Belgique.
Concertiste
Brillant virtuose au répertoire très étendu, André Dumortier s'illustre par le récital dans de nombreux pays européens (Belgique, France, Hollande, Royaume-Uni, Portugal, Italie, Suisse, Suède), voire au-delà (Congo belge, URSS). Ses qualités de chambriste sont également appréciées : durant de nombreuses années, il sera le pianiste du Quatuor belge de Londres (fondé durant la seconde guerre mondiale par le violoniste Maurice Raskin).
C'est d'ailleurs à Londres qu'André Dumortier enregistre ses premiers disques.
Le pédagogue
Interprète de classe internationale, André Dumortier choisit pourtant de consacrer la plus grande part de sa vie professionnelle à l'enseignement. Héritier de la tradition lisztienne[6], disciple de José Sévenants, la question de la transmission lui est essentielle. Une transmission de type humaniste où les références à la philosophie, la spiritualité et les arts dans leur globalité rejoint l'exigence de la technique instrumentale, celle-ci passant par une prise de conscience corporelle que résume la Septologie (processus qu'il conçoit et définitit) :
Dans un corps assemblé, immuablement centré mais détendu complètement, sentir, en cours de jeu, le parcours des surfaces articulaires convexes et concaves.
Au départ d'un dos présent, une gestique rationnelle qui préserve l'idée d'une ligne droite imaginaire joignant le sommet de l'épaule au bout du doigt et utiliser l'énergie de la pression émanant des membres inférieurs.
Une main-outil qui appartient en permanence au clavier tout en exerçant la préhension et l'extraction du son.
L'initiative d'un délié digital tridimensionnel à l'attache du métacarpe, délié, qui concilie cercle et droite et pénètre au cœur du son.
En fonction de la qualité du matériau-son que requiert l'œuvre à interpréter, considérer le positionnement global du corps et la part du contact pulpeux.
Assurer la concordance des sensations auditives et des sensations tactiles, la respiration du texte et la conscience affective des volumes sonores.
Perfectionner la qualité du sensible, dépasser le vouloir et aspirer à l'état d'aperception, à l'état musical proprement dit[7].
Le Conservatoire Royal de Bruxelles
En 1946, il devient professeur au Conservatoire Royal de Bruxelles. Durant une trentaine d'années (jusqu'en 1977), il forme une pléiade de pianistes venus de tous horizons : Belgique, France, Luxembourg, Espagne, Allemagne, Japon, Canada, Mexique, États-Unis. À l'image de leur maître, certains participeront à des concours internationaux : Claude Coppens (Lauréat du Concours Reine Élisabeth), George Deppe[8] (Lauréat du Concours Tchaïkovsky), Anh Triet Lam Duy (Lauréat du Concours de Monza), Christian Parent[9] (Lauréat des Concours Tchaïkovsky et de Leeds, en Angleterre).
Le chef d'orchestre et compositeur Pierre Bartholomée compte également parmi ses disciples.
À la fonction de professeur au Conservatoire Royal de Bruxelles, André Dumortier ajoute, en 1954, celle de directeur du Conservatoire Communal de Tournai (fonction dans laquelle il succède au compositeur André Collin et qu'il conserve jusqu'en 1977). Il organise de nombreuses manifestations musicales, en particulier consacrées aux œuvres du compositeur Jean Absil.
À Tournai, sa ville d'adoption, André Dumortier apporte également son soutien moral (et musical) à d'autres institutions musicales et culturelles. Parmi celles-ci, citons l'Académie de Musique Saint-Grégoire[10], la Maîtrise de la Cathédrale, La Chapelle Musicale de Tournai[11], le Cercle Choral Tornacum, la Maison de la Culture.
Devenu un retraité actif, André Dumortier organise, à dater de 1988, les classes de maître de Tournai destinées aux jeunes pianistes prometteurs de nationalités diverses.
En 1977, un documentaire a été réalisé sur André Dumortier par la télévision locale tournaisienne NoTélé.
En 2001, à l'initiative de Bruno Lestarquit, un livre intitulé Entretiens avec André Dumortier est publié (avec la collaboration de la Maison de la Culture de Tournai)[12].
Bibliographie
Thierry Bouckaert : Le rêve d'Élisabeth - Cinquante ans de Concours Reine Élisabeth, Complexe Eds, 2001.
Le Conservatoire de Tournai, plaquette publiée à l'occasion du 175e anniversaire de la création de l'établissement, 2004.
Pierre Delhasse : Musique et Passion. Le Concours Reine Élisabeth des origines à aujourd'hui, Bruxelles, Le Cri/Vander, 1985. (ISBN2871060088 et 9782871060086).
Stéphane Detournay : Jean Absil, in : Le Courrier de Saint-Grégoire n°93, revue de l'AMSG, 2020-21/VI.
Stéphane Detournay : André Dumortier, architecte et poète du clavier, in : Le Courrier de Saint-Grégoire n°98, revue de l'AMSG, 2021-22/III[13].
Stéphane Detournay : Saint-Grégoire : un anniversaire et une histoire (2e partie), in : Le Courrier de Saint-Grégoire n°8, revue de l'AMSG, 2017-18/II.
Richard de Guide : Jean Absil, vie et œuvre, Casterman, 1965.
Bruno Lestarquit : Entretiens avec André Dumortier, Tournai, Maison de la Culture, 2001.
Charles Philippon : Douze Lauréats pour un Concerto, La Vie du Concours Reine Élisabeth, G. Carré, 1985.
Michel Stockhem : La Chapelle Musicale Reine Elisabeth, Paris-Louvain-la-Neuve, Duculot, 1993. (ISBN2-8011-1063-9)
↑Ce concours a été organisé pour la première fois en 1937 pour le violon. Face au succès rencontré auprès du public, une épreuve dédiée au piano a été organisée en 1938.
↑Il participe en qualité d'interprète aux Matinées de Saint-Grégoire organisées par le chanoine Abel Delzenne. En 1987, à l'occasion de la reconnaissance de l'Académie de Musique Saint-Grégoire par la Communauté française de Belgique, il intègre de Pouvoir Organisateur de l'établissement.
↑Jackyy Legrain, « Une chapelle musicale a tournai », Le Soir, (lire en ligne, consulté le ).
↑Bruno Lestarquit " Entretiens avec André Dumortier " 2001 éditions Culture ref. D/2001/4102/2