Share to: share facebook share twitter share wa share telegram print page

 

Calligrammes

Calligrammes
Guillaume Apollinaire en 1911
Format
Langue
Auteur
Guillaume Apollinaire
Sujets
Poésie, littérature, littérature française, L’Esprit nouveau et les poètes (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Date de création
Date de parution
1918
Pays
Éditeur
Le Mercure de France

Calligrammes, sous-titré Poèmes de la paix et de la guerre 1913-1916, est un recueil de poésie de Guillaume Apollinaire publié le 15 avril 1918 aux éditions Mercure de France et contenant de nombreux calligrammes.

Composition

Les poèmes de Calligrammes sont composés entre 1912 et 1916. Apollinaire les organise en six parties[1] sur base chronologique : Ondes ; Étendards ; Case d'Armons ; Lueurs des Tirs ; Obus couleur de Lune ; La Tête étoilée[2].

La première partie (Ondes) rassemble des poèmes écrits avant la guerre : poèmes-conversations, qui fonctionnent comme des enregistrements ; poèmes simultanés, d'inspiration cubiste ; « idéogrammes lyriques » (rebaptisés par la suite calligrammes)[2].

Les poésies de la seconde partie (Étendards) ont été écrites entre la déclaration de guerre[3] et le départ d'Apollinaire pour le front (avril 2015)[2]. Cette section contient de nombreux calligrammes typographiques ou manuscrits.

La troisième partie (Cases d'Armons) est écrite dans les tranchées et Apollinaire la publie pour ses camarades, dans des conditions artisanales, en juin 1915[2]. Elle contient contient aussi de nombreux calligrammes typographiques ou manuscrits.

La quatrième partie (Lueurs des Tirs) date de la période septembre-décembre 1915, à l'exception des sept premiers poèmes, écrits à la demande de Marie Laurencin, à qui Apollinaire les fait parvenir le 20 août 19015 (sous le titre Le Médaillon toujours fermé)[2]. Cette partie ne contient aucun calligramme.

Les poèmes de la section suivante (Obus couleur de lune), écrits entre août 1915 et février 1916, sont présentés sans ordre chronologique[2]. Elle contient quelques calligrammes typographiques.

Enfin, la dernière partie (La Tête étoilée), comporte trois poèmes écrits après la blessure d'Apollinaire à la tempe[2]. Elle ne contient que cinq calligrammes typographiques regroupés sur la même page, sous le titre Éventail de Saveurs.

Genèse et publication

Certains poèmes voient le jour avec Calligrammes, mais avant que l'ensemble ne paraisse, en avril 1918, au Mercure de France, de nombreux textes le composant ont été publiés dans des revues littéraires. Outre les publications ponctuelles, Apollinaire en fait paraître un large extrait dans Le Mercure de France le 1er juillet 1916 sous le titre Lueurs des Tirs — Aux armées 1915-1917. En novembre 1917, il publie dans La Grande Revue un ensemble de treize poèmes, intitulé Poèmes de Guerre et d'Amour[2].

La première édition contient en frontispice la reproduction d'un portrait représentant Apollinaire signé Pablo Picasso. Le recueil est dédié à René Dalize, ami d'enfance d'Apollinaire, mort à la guerre, à qui il rend hommage dans sa dédicace: « À la mémoire / du plus ancien de mes camarades / René Dalize / mort au champ d’honneur / le 7 mai 1917 ».

Apollinaire l'évoque dans les calligrammes La Colombe poignardée et le Jet d'eau :

« Où sont Raynal Billy Dalize
O mes amis partis en guerre
Dont les noms se mélancolisent »

Préface inédite

Apollinaire avait prévu pour cet ouvrage un « Avertissement de l’auteur » resté inédit[4],[5].

« Voici la plus grande partie de mes poèmes de guerre jusqu’au moment où j’ai été grièvement blessé. Je les adressais à mes amis dans des lettres d’où ceux-ci ont bien voulu les tirer. Il m’en manque encore beaucoup. J’ai laissé de côté pour ne la publier que plus tard ma production poétique d’avant la guerre. Les idéogrammes lyriques qui ouvrent le recueil avaient été faits peu de temps avant que n’éclatât le grand conflit et allaient paraître sous le titre d’Et moi aussi je suis peintre, lorsque la mobilisation fut décidée. L’édition disparut dans la tourmente… »

— Guillaume Apollinaire, Préface à Case d'armons (opuscule resté inédit)

C'est également dans cette préface que le poète précise les conditions artisanales qui ont présidé à la publication, sur le front, de Case d'Armons, recueil de ses 21 poèmes d'artilleur, reprographié à la gélatine, en 25 exemplaires, au bureau de sa batterie[5].

Les calligrammes

Le recueil se distingue par la présence de nombreux poèmes ou strophes « calligrammatiques » qui font intervenir le plus souvent la typographie (parfois l'intervention manuscrite) pour conférer au texte une dimension visuelle supplémentaire, figurative ou non, souvent poétique ou sensuelle, quelquefois humoristique. Les césures inattendues imposées par la forme ouvrent en outre la porte à de nouvelles lectures du texte[6].

Cette innovation s'inscrit dans une réflexion déjà ancienne sur la disposition typographique en poésie (Goncourt, Baudelaire, Gide, Mallarmé en France, les futuristes et leurs « mots en liberté » en Italie). Apollinaire avait d'ailleurs annoncé, courant 1914, la parution d'un recueil d'« idéogrammes lyriques » dédié à son frère Albert et intitulé Et moi aussi, je suis peintre !, opuscule-manifeste d'un « art de synthèse qui [serait] l'Art unique »[2][7].

Dans une lettre à André Billy, Apollinaire, se défendant de tout projet destructeur du vers classique, explique :

« Quant aux Calligrammes, ils sont une idéalisation de la poésie vers-libriste et une précision typographique à l'époque où la typographie termine brillamment sa carrière, à l'aurore des moyens nouveaux de reproduction que sont le cinéma et le phonographe[8] »

Extraits

« Ah Dieu ! que la guerre est jolie
Avec ses chants ses longs loisirs
Cette bague je l'ai polie
Le vent se mêle à vos soupirs


Adieu ! voici le boute-selle
Il disparut dans un tournant
Et mourut là-bas tandis qu'elle
Riait au destin surprenant »

— Guillaume Apollinaire, L'Adieu du Cavalier - Calligrammes - Lueurs des Tirs

« La mère de la concierge et la concierge laisseront tout passer
Si tu es un homme tu m'accompagneras ce soir
Il suffirait qu'un type maintînt la porte cochère
Pendant que l'autre monterait

Trois bec de gaz allumés
La patronne est poitrinaire
Quand tu auras fini nous jouerons une partie de jacquet
Un chef d'orchestre qui a mal à la gorge
Quand tu viendras à Tunis je te ferai fumer du kief

Ça a l'air de rimer

Des piles de soucoupes des fleurs un calendrier
Pim pam pim
Je dois fiche près de 300 francs à ma probloque
Je préférerais me couper le parfaitement que de les lui donner

Je partirai à 20 h. 27
Six glaces s'y dévisagent toujours
Je crois que nous allons nous embrouiller encore davantage

Cher monsieur
Vous êtes un mec à la mie de pain
Cette dame a le nez comme un ver solitaire
Louise a oublié sa fourrure
Moi je n'ai pas de fourrure et je n'ai pas froid
Le Danois fume sa cigarette en consultant l'horaire
Le chat noir traverse la brasserie

Ces crêpes étaient exquises
La fontaine coule
Robe noire comme ses ongles
C'est complètement impossible
Voici monsieur
La bague en malachite
Le sol est semé de sciure
Alors c'est vrai
La serveuse rousse a été enlevée par un libraire

Un journaliste que je connais d'ailleurs très vaguement

Écoute Jacques c'est très sérieux ce que je vais te dire

Compagnie de navigation mixte

Il me dit monsieur voulez-vous voir ce que je peux faire
d'eaux fortes et de tableaux
Je n'ai qu'une petite bonne

Après déjeuner café du Luxembourg
Une fois là il me présente un gros bonhomme
Qui me dit
Écoutez c'est charmant
À Smyrne à Naples en Tunisie
Mais nom de Dieu où est-ce
La dernière fois que j'ai été en Chine
C'est il y a huit ou neuf ans
L'Honneur tient souvent à l'heure que marque la pendule La quinte major »

— Guillaume Apollinaire, Lundi rue Christine, poème-conversation - Calligrammes - Ondes

Commentaires

alternative textuelle
La Colombe poignardée et le Jet d’eau

Selon Laurence Campa, l'accueil du recueil a été mitigé lors de sa première publication : l'innovation formelle est mal comprise et les poèmes paraissent tantôt trop légers tantôt pas assez critiques vis-à-vis de la Première Guerre mondiale[9],[10].

Michel Butor, a préfacé les éditions de 1966, 1994 et 1995[11].

Notes et références

  1. En 1917, un bulletin de souscription n'évoque que quatre parties (Ondes ; Étendards ; Case d'Armons ; La Tête étoilée).
  2. a b c d e f g h et i Marcel Adéma et Michel Décaudin, « Notes », dans Guillaume Apollinaire, Œuvres poétiques, Paris, NRF - La Pléiade, , 1267 p. (ISBN 2-07-010015-4), p. 1074-1109
  3. Le premier poème (La Petite Auto) évoque le retour vers Paris, en compagnie d'André Rouveyre, à l'annonce de la mobilisation. Les deux amis étaient en déplacement à Deauville pour un reportage.
  4. Une page mise en vente à Drouot, le 22 octobre 2024 par la maison Magnin Wedry, avec une estimation de 3 000/ 4 000 €. Provenant de la collection privée de Bernard Poissonnier (1898-1993).
  5. a et b Bertrand Galimard Flavigny, « La préface inédite de Calligrammes », sur Actu-Juridique, (consulté le )
  6. (en) Kim Sichel, Making Strange: The Modernist Photobook in France, Yale University Press, (ISBN 978-0-300-24618-6, lire en ligne)
  7. « Histoire de la poésie : les calligrammes », sur France Culture, (consulté le )
  8. « Cercle Gallimard de l'enseignement/Calligrammes », sur cercle-enseignement.com (consulté le ).
  9. Campa, p. 14.
  10. « Apollinaire, un poète en guerre », LExpress.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  11. « Michel Butor (1926-2016) - Auteur - Ressources de la Bibliothèque nationale de France », sur data.bnf.fr (consulté le ).

Annexes

Sur les autres projets Wikimedia :

Bibliographie

  • Laurence Campa, Poèmes à Lou de Guillaume Apollinaire, Paris, Gallimard, coll. Foliothèque, vol. CXXVII, .
  • Bernard Holtzmann, « Calligramme », Encyclopædia Universalis, consulté le 25 novembre 2018. (lire en ligne

Liens externes

Prefix: a b c d e f g h i j k l m n o p q r s t u v w x y z 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9

Portal di Ensiklopedia Dunia

Kembali kehalaman sebelumnya