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Grand Prix automobile d'Italie 1952

Grand Prix d'Italie 1952
Tracé de la course
Données de course
Nombre de tours 80
Longueur du circuit 6,3 km
Distance de course 504 km
Conditions de course
Météo temps chaud et ensoleillé
Résultats
Vainqueur Drapeau de l'Italie Alberto Ascari,
Ferrari,
h 50 min 45 s 6
(vitesse moyenne : 177,091 km/h)
Pole position Drapeau de l'Italie Alberto Ascari,
Ferrari,
min 5 s 7
(vitesse moyenne : 180,430 km/h)
Record du tour en course Drapeau de l'Italie Alberto Ascari
Drapeau de l'Argentine José Froilán González,
Ferrari & Maserati,
min 6 s 1
(vitesse moyenne : 179,857 km/h)

Le Grand Prix d'Italie 1952 (XXIII° Gran Premio d'Italia), disputé sous la réglementation Formule 2 sur le circuit de Monza le , est la vingt-troisième épreuve du championnat du monde de Formule 1 courue depuis 1950 et la huitième manche du championnat 1952.

Contexte avant le Grand Prix

Le championnat du monde

Le Grand Prix d'Italie constitue la dernière épreuve du championnat du monde 1952, disputé sous la réglementation formule 2 (moteurs deux litres atmosphériques) à la suite du désengagement des principaux constructeurs de F1 à la fin de l'année précédente. La saison a été totalement dominée par la Scuderia Ferrari, qui a remporté toutes les épreuves à l'exception des 500 miles d'Indianapolis, la course américaine étant disputée suivant l'ancienne formule internationale (moteurs trois litres suralimentés ou quatre litres et demi atmosphériques). Vainqueur de cinq Grands Prix consécutifs au volant de la Ferrari 500 F2, Alberto Ascari est déjà assuré du titre mondial, quelle que soit l'issue de cette dernière course.

Le circuit

Autodromo Nazionale Monza
Vue aérienne de l'autodrome de Monza.

Créé en 1922 et entièrement rénové en 1948[1], le circuit de Monza est considéré comme le temple de la vitesse. En 1951, Juan Manuel Fangio avait franchi la barre des 200 km/h de moyenne lors des essais qualificatifs, au volant de son Alfetta de plus de 400 chevaux. Avec des formules 2 dont les plus affûtées (Ferrari, Maserati) développent à peine 180 chevaux, on en sera bien loin en 1952.

Monoplaces en lice

  • Ferrari 500 "Usine"
Ferrari 500 F2.
Avec Alberto Ascari, la Ferrari 500 F2 a dominé le championnat 1952.

Invaincue cette saison, la Scuderia Ferrari se doit de conclure l'année sur une victoire. Face à la menace Maserati, dont le moteur six cylindres est légèrement plus puissant, l'usine engage cinq Ferrari 500 F2 (à moteur quatre cylindres de 175 chevaux) pour ses pilotes habituels Alberto Ascari, Giuseppe Farina, Luigi Villoresi et Piero Taruffi, épaulés par le Français André Simon. Épaulant les monoplaces officielles, cinq autres Ferrari sont présentes : Louis Rosier pilote sa 500 personnelle, Charles de Tornaco celle de l'Écurie Francorchamps et Rudi Fischer celle de l'Écurie Espadon. Ces versions "clients", bridées à 6500 tr/min[2], sont moins puissantes que les voitures engagées par l'usine. L'Écurie Espadon a également engagé une 212 pour Hans Stuck, et le pilote britannique Peter Whitehead pilote sa Ferrari 125 personnelle.

  • Gordini T16 "Usine"

Le sorcier engage trois T16 (moteur six cylindres développant environ 150 chevaux) pour ses pilotes habituels Jean Behra, Robert Manzon et Maurice Trintignant. En cette fin de saison, le manque de préparation de ces monoplaces se fait sentir : à Monza les T16 vont courir avec des ponts arrière d'un ancien modèle, inadaptés à la puissance du moteur six cylindres, l'usine n'ayant pas terminé la fabrication des pièces de remplacement (les ponts avaient connu des casses répétées lors d'une course précédente[3]). Elles ne peuvent espérer inquiéter les Ferrari sur un circuit aussi rapide. Une quatrième Gordini est inscrite, il s'agit d'une ancienne T15 engagée à titre privé pour le pilote belge Johnny Claes.

  • Maserati A6GCM "Usine"

Après une longue période de développement, la mise au point des A6GCM semble maintenant aboutie, et l'usine engage trois de ces modèles pour José Froilán González (c'est la première apparition en championnat du pilote argentin cette saison), Felice Bonetto et Franco Rol. Si le moteur six cylindres, désormais équipé d'une culasse double allumage[4], produit 180 chevaux[5], une puissance légèrement supérieure à celle du quatre cylindres Ferrari, le châssis est toutefois moins évolué, faisant appel à un pont arrière rigide. L'équipe brésilienne fait également courir trois A6GCM, pour Gino Bianco, Chico Landi et Eitel Cantoni. Enrico Platé a amené deux Maserati-Platé (dérivées de l'antique 4 CLT/48) pour Emmanuel de Graffenried et Alberto Crespo.

  • HWM 52 "Usine"

La petite équipe britannique HWM a engagé deux modèles 52 à moteur quatre cylindres Alta d'environ 145 chevaux[5] pour Lance Macklin et Peter Collins, pilotes officiels de la marque. À leurs côtés, l'Australien Tony Gaze pilote son HWM personnelle, identique aux modèles usine.

  • Connaught A "Usine"

Après des débuts encourageants en championnat lors du Grand Prix de Grande-Bretagne, Connaught engage trois modèles A pour Kenneth McAlpine, Dennis Poore et Stirling Moss. Ces monoplaces sont équipées d'un moteur quatre cylindres Lea Francis, d'une puissance de l'ordre de 145 chevaux[5].

  • Cooper T20

L'Ecurie Richmond, représentant l'usine, a amené deux Cooper T20 pour Eric Brandon et Alan Brown. Agiles et très légères, ces petites monoplaces sont équipées du six cylindres Bristol, développant environ 130 chevaux[5]. L'ancien pilote moto Leslie Hawthorn engage un modèle identique pour son fils Mike, auteur d'une très belle saison sur une voiture magnifiquement préparée, avec un moteur Bristol bénéficiant d'un réglage spécial permettant l'utilisation de nitrométhane : cet additif au carburant autorise un gain d'environ 20 chevaux[6]. Une quatrième T20 est présente, engagée par la Scuderia Franera pour Ken Wharton.

  • OSCA 20

Le pilote français Élie Bayol a engagé son O.S.C.A. F2 personnelle, avec laquelle il a réalisé une prestation honorable au Grand Prix du Comminges avant d’être disqualifié. Sa performance au Grand Prix de la Baule (septième à huit tours d'Ascari) fut toutefois moins convaincante. Cette monoplace, construite par les frères Maserati, est équipée d'un moteur six cylindres donné pour 170 chevaux, chiffre qui semble toutefois optimiste[5].

  • Aston NB41

Le pilote-constructeur Bill Aston, malgré des résultats peu convaincants lors du Grand Prix d'Allemagne, est présent au volant de la monoplace de sa conception. Équipée d'un moteur boxer 4 cylindres refroidi par air d'environ 140 chevaux, l'Aston ressemble beaucoup à la Cooper T20 dont elle est inspirée[5].

  • Cisitalia

Italien mais vivant en Argentine, Piero Dusio a engagé sa Cisitalia personnelle, une ancienne D46 adaptée pour la formule 2, mais cette monoplace n'apparaîtra pas aux essais.

Coureurs inscrits

Liste des pilotes inscrits[7]
no  Pilote Écurie Constructeur Châssis Moteur Pneumatiques
2 Robert Manzon Equipe Gordini Gordini Gordini T16 Gordini L6 E
4 Maurice Trintignant Equipe Gordini Gordini Gordini T16 Gordini L6 E
6 Jean Behra Equipe Gordini Gordini Gordini T16 Gordini L6 E
8 André Simon Scuderia Ferrari Ferrari Ferrari 500 Ferrari L4 P
10 Giuseppe Farina Scuderia Ferrari Ferrari Ferrari 500 Ferrari L4 P
12 Alberto Ascari Scuderia Ferrari Ferrari Ferrari 500 Ferrari L4 P
14 Piero Taruffi Scuderia Ferrari Ferrari Ferrari 500 Ferrari L4 P
16 Luigi Villoresi Scuderia Ferrari Ferrari Ferrari 500 Ferrari L4 P
18 Rudi Fischer Écurie Espadon Ferrari Ferrari 500 Ferrari L4 P
20 Hans Stuck Écurie Espadon Ferrari Ferrari 212 Ferrari V12 P
22 Felice Bonetto Officine Alfieri Maserati Maserati Maserati A6GCM Maserati L6 P
24 Franco Rol Officine Alfieri Maserati Maserati Maserati A6GCM Maserati L6 P
26 José Froilán González Officine Alfieri Maserati Maserati Maserati A6GCM Maserati L6 P
28 Kenneth McAlpine Connaught Engineering Connaught Connaught A Lea Francis L4 D
30 Dennis Poore Connaught Engineering Connaught Connaught A Lea Francis L4 D
32 Stirling Moss Connaught Engineering Connaught Connaught A Lea Francis L4 D
34 Élie Bayol Privé O.S.C.A. OSCA 20 O.S.C.A. L6 P
36 Eric Brandon Ecurie Richmond Cooper Cooper T20 Bristol L6 D
38 Alan Brown Ecurie Richmond Cooper Cooper T20 Bristol L6 D
40 Ken Wharton Scuderia Franera Cooper Cooper T20 Bristol L6 D
42 Mike Hawthorn Leslie Hawthorn Cooper Cooper T20 Bristol L6 D
44 Piero Dusio Privé Cisitalia Cisitalia D46 BPM L4 P
46 Gino Bianco Escuderia Bandeirantes Maserati Maserati A6GCM Maserati L6 P
48 Chico Landi Escuderia Bandeirantes Maserati Maserati A6GCM Maserati L6 P
50 Eitel Cantoni Escuderia Bandeirantes Maserati Maserati A6GCM Maserati L6 P
52 Lance Macklin HW Motors HWM HWM 52 Alta L4 D
54 Peter Collins HW Motors HWM HWM 52 Alta L4 D
56 Tony Gaze Privé HWM HWM 52 Alta L4 D
58 Alberto Crespo Enrico Platé Maserati-Platé Maserati-Platé Maserati L4 P
60 Emmanuel de Graffenried Enrico Platé Maserati-Platé Maserati-Platé Maserati L4 P
62 Louis Rosier Écurie Rosier Ferrari Ferrari 500 Ferrari L4 P
64 Bill Aston WS Aston WS Aston Aston NB41 Butterworth F4 D
66 Johnny Claes Vicomtesse de Walkiers Simca-Gordini Simca-Gordini T15 Gordini L4 E
68 Peter Whitehead Privé Ferrari Ferrari 125 Ferrari V12 D
70 Charles de Tornaco Écurie Francorchamps Ferrari Ferrari 500 Ferrari L4 E

Qualifications

Les séances qualificatives se déroulent les vendredi et samedi précédant la course. Sur les trente-cinq pilotes inscrits, seuls les vingt-quatre plus rapides seront admis au départ de la course. Ce sont à nouveau les Ferrari 500 qui dominent les essais, Alberto Ascari obtenant la pole position devant ses coéquipiers Luigi Villoresi et Giuseppe Farina. Maurice Trintignant réalise une belle performance au volant de sa Gordini nettement moins puissante que les machines italiennes, à seulement une seconde et demie du temps d'Ascari. Quatrième, il complète la première ligne, devançant la Maserati de José Froilán González. Profitant de l'aspiration de la Ferrari d'Ascari[5], Stirling Moss a réussi le neuvième temps des essais sur sa Connaught, une performance étonnante pour la modeste monoplace britannique. La nouvelle O.S.C.A. effectue des débuts encourageants, Élie Bayol s'étant qualifié en dixième position. Déception en revanche pour les HWM, ni les monoplaces d'usine de Peter Collins et de Lance Macklin, pas plus que la voiture privée de Tony Gaze n'ont pu se qualifier. Pire encore pour la Cisitalia de Piero Dusio, qui n'a pu effectuer un seul tour chronométré.
Ascari a effectué son meilleur tour à un peu plus de 180 km/h de moyenne. En se référant à la pole position réalisée l'année précédente par Juan Manuel Fangio (200 km/h de moyenne avec l'Alfetta), c'est donc 20 km/h que les formules 2 rendent aux F1 sur ce circuit rapide.

Résultats des qualifications
Pos. no  Pilote Écurie Temps Écart
1 12 Alberto Ascari Ferrari 2 min 05 s 7  
2 16 Luigi Villoresi Ferrari 2 min 06 s 6 + 0 s 9
3 10 Giuseppe Farina Ferrari 2 min 07 s 0 + 1 s 3
4 12 Maurice Trintignant Gordini 2 min 07 s 2 + 1 s 5
5 26 José Froilán González Maserati 2 min 07 s 6 + 1 s 9
6 14 Piero Taruffi Ferrari 2 min 07 s 8 + 2 s 1
7 2 Robert Manzon Gordini 2 min 08 s 2 + 2 s 5
8 8 André Simon Ferrari 2 min 09 s 1 + 3 s 4
9 32 Stirling Moss Connaught-Lea Francis 2 min 09 s 8 + 4 s 1
10 34 Élie Bayol O.S.C.A. 2 min 10 s 6 + 4 s 9
11 6 Jean Behra Gordini 2 min 10 s 8 + 5 s 1
12 42 Mike Hawthorn Cooper-Bristol 2 min 11 s 2 + 5 s 5
13 22 Felice Bonetto Maserati 2 min 11 s 6 + 5 s 9
14 18 Rudi Fischer Ferrari 2 min 11 s 8 + 6 s 1
15 40 Ken Wharton Cooper-Bristol 2 min 12 s 2 + 6 s 5
16 24 Franco Rol Maserati 2 min 12 s 7 + 7 s 0
17 62 Louis Rosier Ferrari 2 min 12 s 7 + 7 s 0
18 16 Chico Landi Maserati 2 min 13 s 0 + 7 s 3
19 30 Dennis Poore Connaught-Lea Francis 2 min 14 s 0 + 8 s 3
20 36 Eric Brandon Cooper-Bristol 2 min 14 s 0 + 8 s 3
21 38 Alan Brown Cooper-Bristol 2 min 15 s 0 + 9 s 3
22 28 Kenneth McAlpine Connaught-Lea Francis 2 min 15 s 1 + 9 s 4
23 50 Eitel Cantoni Maserati 2 min 15 s 9 + 10 s 2
24 46 Gino Bianco Maserati 2 min 17 s 1 + 11 s 4
25 70 Charles de Tornaco Ferrari 2 min 17 s 5 + 11 s 8
26 58 Alberto Crespo Maserati 2 min 17 s 8 + 12 s 1
27 60 Emmanuel de Graffenried Maserati 2 min 18 s 4 + 12 s 7
28 54 Peter Collins HWM-Alta 2 min 18 s 6 + 12 s 9
29 68 Peter Whitehead Ferrari 2 min 18 s 8 + 13 s 1
30 56 Tony Gaze HWM-Alta 2 min 20 s 3 + 14 s 6
31 64 Bill Aston WS Aston-Butterworth 2 min 20 s 7 + 15 s 0
32 52 Lance Macklin HWM-Alta 2 min 21 s 0 + 15 s 3
33 20 Hans Stuck Ferrari 2 min 22 s 8 + 17 s 1
/ 44 Piero Dusio Cisitalia-BPM Pas de temps
/ 66 Johnny Claes Simca-Gordini Pas de temps

Grille de départ du Grand Prix

Grille de départ du Grand Prix et résultats des qualifications[8]
1re ligne Pos. 1 Pos. 2 Pos. 3 Pos. 4

Ascari
Ferrari
2 min 05 s 7

Villoresi
Ferrari
2 min 06 s 6

Farina
Ferrari
2 min 07 s 0

Trintignant
Gordini
2 min 07 s 2
2e ligne Pos. 5 Pos. 6 Pos. 7 Pos. 8

González
Maserati
2 min 07 s 6

Taruffi
Ferrari
2 min 07 s 8

Manzon
Gordini
2 min 08 s 2

Simon
Ferrari
2 min 09 s 1
3e ligne Pos. 9 Pos. 10 Pos. 11 Pos. 12

Moss
Connaught
2 min 09 s 8

Bayol
O.S.C.A.
2 min 10 s 6

Behra
Gordini
2 min 10 s 8

Hawthorn
Cooper
2 min 11 s 2
4e ligne Pos. 13 Pos. 14 Pos. 15 Pos. 16

Bonetto
Maserati
2 min 11 s 6

Fischer
Ferrari
2 min 11 s 8

Wharton
Cooper
2 min 12 s 2

Rol
Maserati
2 min 12 s 7
5e ligne Pos. 17 Pos. 18 Pos. 19 Pos. 20

Rosier
Ferrari
2 min 12 s 7

Landi
Maserati
2 min 13 s 0

Poore
Connaught
2 min 14 s 0

Brandon
Cooper
2 min 14 s 0
6e ligne Pos. 21 Pos. 22 Pos. 23 Pos. 24

Brown
Cooper
2 min 15 s 0

McAlpine
Connaught
2 min 15 s 1

Cantoni
Maserati
2 min 15 s 9

Bianco
Maserati
2 min 17 s 1

Déroulement de la course

Maserati A6GCM.
Après un développement tardif, la Maserati A6GCM (ici lors d'une course historique) est désormais en passe de menacer les Ferrari.

Pour cette course de plus de 500 km, les équipes Maserati et Gordini ont prévu un ravitaillement en carburant à mi-distance[3], les autres concurrents partant avec des réservoirs pleins. Le départ est donné par temps chaud et ensoleillé. Profitant de sa voiture allégée en carburant, José Froilán González (Maserati) jaillit de la deuxième ligne pour s'emparer immédiatement de la tête de la course. Il aborde le premier virage suivi par Maurice Trintignant (Gordini). Depuis la première ligne, les Ferrari, pénalisées par leur surcharge d'essence, se sont fait déborder : Alberto Ascari est troisième, devançant les Gordini de Robert Manzon et Jean Behra, tandis que Luigi Villoresi et Giuseppe Farina ont perdu cinq places. À la fin du premier tour, Ascari parvient à prendre le meilleur sur Trintignant, s'emparant de la seconde place, mais compte déjà plus d'une seconde de retard sur González qui tourne à un rythme extrêmement rapide. Alors qu'Ascari et Trintignant se disputent la seconde place, Villoresi regagne rapidement du terrain : il dépasse Behra au second tour, puis Manzon au troisième, le voila en quatrième position. Au passage suivant, il profite des ennuis de Trintignant (soupapes) pour prendre la troisième place, alors que González, qui vient de réaliser le record du tour à près de 176 km/h de moyenne, a accru son avance sur Ascari. Ce dernier est peu après rejoint par Villoresi, tous deux vont se livrer une intense bataille pour la seconde place, à distance respectable du leader qui compte déjà une quinzaine de secondes d'avance au dixième tour, ayant égalé son temps des essais. Manzon est alors en quatrième position (précédant de très peu les Ferrari de Simon, Taruffi et Farina et la Maserati de Bonetto) mais les deux autres Gordini officielles sont déjà écartées de la lutte en tête : Trintignant a abandonné après cinq tours, et Behra a été longuement retardé, également victime d'ennuis de moteur.

À ce rythme, González semble en mesure de se constituer un capital suffisant pour préserver sa position lors de son ravitaillement, et démontre le potentiel de la Maserati six cylindres. Toutefois, commençant à s'alléger, les Ferrari retrouvent leur équilibre et, si l'écart continue à augmenter, Ascari et Villoresi, roulant de concert, améliorent nettement leur cadence : après vingt tours leur retard est de vingt secondes. Malgré une attaque permanente (nouveau record au vingt-cinquième tour à plus de 179 km/h de moyenne), le pilote argentin ne parvient pas à prendre assez de marge sur ses poursuivants immédiats. Son coéquipier Bonetto est le premier à ravitailler, au trente-quatrième tour, chutant en septième position, laissant Manzon et Farina en découdre pour la quatrième place. Au trente-septième tour, le leader ravitaille à son tour, faisant également remplacer ses pneus arrière : l'opération lui coûte plus d'une minute. Lorsqu'il repart enfin, en cinquième position, González compte plus de cinquante-cinq secondes de retard sur Ascari, qui est parvenu à se détacher de Villoresi. Manzon est alors troisième derrière les deux Ferrari, mais il doit également ravitailler au tour suivant. Son arrêt est également très long, les bougies devant être remplacées, et le pilote français perd le bénéfice de son beau début de course.

À mi-distance, trois Ferrari sont donc en tête. Ascari compte près de six secondes d'avance sur Villoresi, Farina troisième comptant quarante-six secondes de retard. González est neuf secondes plus loin, mais réduit rapidement l'écart sur la troisième Ferrari. Bonetto, cinquième, est beaucoup plus loin, à près d'un tour de la voiture de tête. Au quarante-cinquième tour, González s'empare de la troisième place, et continue d'attaquer pour revenir sur les hommes de tête. S'il ne parvient pas à réduire l'écart sur Ascari qui a également adopté un rythme de qualification (tous deux vont établir le même temps record), il se rapproche de Villoresi qui paraît en difficulté. Ce dernier semble toutefois en mesure de conserver sa position, mais au soixante-deuxième tour il doit effectuer un bref arrêt au stand, qui permet au pilote argentin de s'assurer la seconde place. Inaccessible, Ascari remporte une sixième victoire consécutive, terminant avec plus d'une minute sur la Maserati de González, et plus de deux minutes sur ses coéquipiers Villoresi et Farina. Confirmant la compétitivité de la nouvelle Maserati, Bonetto termine cinquième, trente secondes devant la Ferrari d'usine de Simon.

Classements intermédiaires

Classements intermédiaires des monoplaces aux premier, troisième, cinquième, dixième, vingtième, trentième, quarantième et soixantième tours[9].

Classement de la course

Les Ferrari 500 d'Alberto Ascari et Luigi Villoresi en formation en début de course, à la poursuite de la Maserati de González.
Pos no  Pilote Écurie Tours Temps/Abandon Grille Points
1 12 Drapeau de l'Italie Alberto Ascari Ferrari 80 2 h 50 min 45 s 6 1 8,5
2 26 Drapeau de l'Argentine José Froilán González Maserati 80 2 h 51 min 47 s 4 (+ 1 min 01 s 8) 5 6,5
3 16 Drapeau de l'Italie Luigi Villoresi Ferrari 80 2 h 52 min 49 s 8 (+ 2 min 04 s 2) 2 4
4 10 Drapeau de l'Italie Giuseppe Farina Ferrari 80 2 h 52 min 57 s 0 (+ 2 min 11 s 4) 3 3
5 22 Drapeau de l'Italie Felice Bonetto Maserati 79 2 h 51 min 46 s 3 (+ 1 tour) 13 2
6 8 Drapeau de la France André Simon Ferrari 79 2 h 52 min 18 s 4 (+ 1 tour) 8  
7 14 Drapeau de l'Italie Piero Taruffi Ferrari 77 2 h 51 min 42 s 8 (+ 3 tours) 6  
8 48 Drapeau du Brésil Chico Landi Maserati 76 2 h 51 min 04 s 5 (+ 4 tours) 18  
9 40 Drapeau du Royaume-Uni Ken Wharton Cooper-Bristol 76 2 h 52 min 33 s 3 (+ 4 tours) 15  
10 62 Drapeau de la France Louis Rosier Ferrari 75 2 h 51 min 53 s 5 (+ 5 tours) 17  
11 50 Drapeau de l'Uruguay Eitel Cantoni Maserati 75 2 h 52 min 36 s 6 (+ 5 tours) 23  
12 30 Drapeau du Royaume-Uni Dennis Poore Connaught-Lea Francis 74 + 6 tours 19  
13 36 Drapeau du Royaume-Uni Eric Brandon Cooper-Bristol 73 + 7 tours 20  
14 2 Drapeau de la France Robert Manzon Gordini 71 + 9 tours 7  
15 38 Drapeau du Royaume-Uni Alan Brown Cooper-Bristol 68 + 12 tours 21  
Abd. 32 Drapeau du Royaume-Uni Stirling Moss Connaught-Lea Francis 60 Suspension 9  
Abd. 46 Drapeau du Brésil Gino Bianco Maserati 46 Moteur 24  
Abd. 6 Drapeau de la France Jean Behra Gordini 42 Moteur 11  
Nc. 42 Drapeau du Royaume-Uni Mike Hawthorn Cooper-Bristol 38 Non classé 12  
Abd. 24 Drapeau de l'Italie Franco Rol Maserati 24 Moteur 16  
Abd. 4 Drapeau de la France Maurice Trintignant Gordini 5 Moteur 4  
Abd. 28 Drapeau du Royaume-Uni Kenneth McAlpine Connaught-Lea Francis 4 Suspension 22  
Abd. 18 Drapeau de la Suisse Rudi Fischer Ferrari 3 Moteur 14  
Abd. 34 Drapeau de la France Élie Bayol O.S.C.A. 0 Boîte de vitesses 10  
Nq. 70 Drapeau de la Belgique Charles de Tornaco Ferrari   Non qualifié -  
Nq. 58 Drapeau de l'Argentine Alberto Crespo Maserati   Non qualifié -  
Nq. 60 Drapeau de la Suisse Emmanuel de Graffenried Maserati   Non qualifié -  
Nq. 54 Drapeau du Royaume-Uni Peter Collins HWM-Alta   Non qualifié -  
Nq. 68 Drapeau du Royaume-Uni Peter Whitehead Ferrari   Non qualifié -  
Nq. 56 Drapeau de l'Australie Tony Gaze HWM-Alta   Non qualifié -  
Nq. 64 Drapeau du Royaume-Uni Bill Aston WS Aston   Non qualifié -  
Nq. 52 Drapeau du Royaume-Uni Lance Macklin HWM-Alta   Non qualifié -  
Nq. 20 Drapeau de l'Allemagne Hans Stuck Ferrari   Non qualifié -  
Nq. 44 Drapeau de l'Italie Piero Dusio Cisitalia-BPM   Non qualifié -  
Nq. 66 Drapeau de la Belgique Johnny Claes Simca-Gordini   Non qualifié -  

Légende :

  • Abd.= Abandon

Pole position et record du tour

Évolution du record du tour en course

La progression du meilleur tour en course reflète l'intensité de la lutte en tête, González ayant égalé son temps de qualification à son dixième passage[9], l'améliorant ensuite à plusieurs reprises.

Tours en tête

Classement final du championnat

  • attribution des points : 8, 6, 4, 3, 2 respectivement aux cinq premiers de chaque épreuve et 1 point supplémentaire pour le pilote ayant accompli le meilleur tour en course (signalé par un astérisque). Le point du record du tour est partagé entre Alberto Ascari et José Froilán González au Grand Prix d'Italie.
  • Seuls les quatre meilleurs résultats sont comptabilisés. Alberto Ascari doit donc décompter les neuf points acquis aux Pays-Bas et les huit points et demi acquis en Italie, totalisant trente-six points effectifs pour cinquante-trois points et demi marqués. De même, Giuseppe Farina doit décompter les trois points acquis en Italie, totalisant vingt-quatre points effectifs pour vingt-sept points marqués.
Classement des pilotes
Pos. Pilote Écurie Points
SUI

500

BEL

FRA

GBR

ALL

NL

ITA
1 Alberto Ascari Ferrari 36 (53,5) - - 9* 9* 9* 9* (9*) (8,5*)
2 Giuseppe Farina Ferrari 24 (27) - - 6 6 - 6 6 (3)
3 Piero Taruffi Ferrari 22 9* - - 4 6 3 - -
4 Rudi Fischer Ferrari 10 6 - - - - 4 - -
Mike Hawthorn Cooper 10 - - 3 - 4 - 3 -
6 Robert Manzon Gordini 9 - - 4 3 - - 2 -
7 Troy Ruttman Kuzma 8 - 8 - - - - - -
Luigi Villoresi Ferrari 8 - - - - - - 4 4
9 José Froilán González Maserati 6,5 - - - - - - - 6,5*
10 Jim Rathmann Kurtis Kraft 6 - 6 - - - - - -
Jean Behra Gordini 6 4 - - - - 2 - -
12 Sam Hanks Kurtis Kraft 4 - 4 - - - - - -
13 Ken Wharton Frazer Nash 3 3 - - - - - - -
Duane Carter Lesovsky 3 - 3 - - - - - -
Dennis Poore Connaught 3 - - - - 3 - - -
16 Alan Brown Cooper 2 2 - - - - - - -
Art Cross Kurtis Kraft 2 - 2 - - - - - -
Paul Frère HWM 2 - - 2 - - - - -
Maurice Trintignant Gordini 2 - - - 2 - - - -
Eric Thompson Connaught 2 - - - - 2 - - -
Felice Bonetto Maserati 2 - - - - - - - 2
22 Bill Vukovich Kurtis Kraft 1 - 1* - - - - - -

Statistiques

  • 8e victoire en championnat du monde pour Alberto Ascari ;
  • 6e victoire en championnat du monde pour Ferrari en tant que constructeur ;
  • 6e victoire en championnat du monde pour Ferrari en tant que motoriste ;
  • unique apparition de Piero Dusio en championnat du monde (non qualifié) ;
  • unique apparition d’Alberto Crespo en championnat du monde (non qualifié) ;
  • unique apparition de l'écurie Cisitalia en championnat du monde. (non qualifié) ;
  • le système de chronométrage ne permet pas de départager Alberto Ascari et José Froilán González qui se partagent le point attribué pour le meilleur tour en course.

Notes et références

  1. (en) Adriano Cimarosti, The complete History of Grand Prix Motor racing, Aurum Press Limited, , 504 p. (ISBN 1-85410-500-0)
  2. Alan Henry, Ferrari : Les monoplaces de Grand Prix, Editions ACLA, , 319 p. (ISBN 2-86519-043-9)
  3. a et b Christian Huet, Gordini Un sorcier une équipe, Editions Christian Huet, , 485 p. (ISBN 2-9500432-0-8)
  4. L'année automobile 1953 - éditeur : Edita S.A., Lausanne
  5. a b c d e f et g (en) Mike Lawrence, Grand Prix Cars 1945-65, Motor racing Publications, , 264 p. (ISBN 1-899870-39-3)
  6. Chris Nixon, Mon Ami Mate, Éditions Rétroviseur, , 378 p. (ISBN 2-84078-000-3)
  7. (en) Bruce Jones, The complete Encyclopedia of Formula One, Colour Library Direct, , 647 p. (ISBN 1-84100-064-7)
  8. (en) Mike Lang, Grand Prix volume 1, Haynes Publishing Group, , 288 p. (ISBN 0-85429-276-4)
  9. a et b Edmond Cohin, L'historique de la course automobile, Editions Larivière, , 882 p.



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