Longue de plus de 8 kilomètres, cette caverne est l'une des plus grandes grottes ornées d'Europe. Malheureusement de nombreux visiteurs de l'époque moderne avaient depuis le XVIIIe siècle superposé leurs graffitis à ces œuvres inestimables[3].
Les recherches ont permis d'identifier d'innombrables traces de griffes et de bauges laissées par les ours des cavernes avant l'intervention humaine.
Art
Il y a environ 13 000 ans (Magdalénien), ces galeries furent ornées de 158 mammouths associés à des rhinocéros laineux, des bisons, des chevaux et des bouquetins. Les figures sont profondément gravées ou peintes en noir. Quatre figurations humaines et des signes tectiformes sont également présents.
La grotte est connue depuis plusieurs siècles et a été décrite en 1575 par François de Belleforest[7]. Le chanoine Jean Tarde la mentionne également au XVIIe siècle, déclarant y avoir vu « des peintures en plusieurs lieux, montrant des vestiges de toutes sortes de bétail »[8]. En 1674, Louis Moreri mentionne la Grotte dans son tome V de son Le Grand Dictionnaire historique, ou Le mélange curieux de l'histoire sacrée et profane; lettre MI-R; à "Miremont" : "MIREMONT. Bourg de France dans le Périgord [...] remarquable par la caverne de Cluseau, qui va fort loin sous terre. Les gens du pays prétendent qu'il y a de grandes salles, des peintures et des autels [...][9]".
La grotte de Rouffignac est connue sous d'autres noms, utilisés par le passé : la grotte de Miremont, le Cro des Cluzeau, le Cro de Granville[11] - ce dernier toponyme toujours utilisé, ainsi que Cro de Rouffignac[12].
Les dessins de la frise des rhinocéros sont (re)découverts par le Spéléo-Club de Périgueux. Ils apparaissent derrière une tente de leur campement photographié par Bernard Pierret lors d'une expédition en 1948[13]. Cette photo est publiée en 1951 dans Le Périgord souterrain de B. Pierret. Informé par les spéléologues, Séverin Blanc (directeur de la circonscription préhistorique) conclut à « des dessins faits par le maquis »[14].
L'ancienneté des peintures et gravures de la grotte est remise au premier plan après une revue du [8] par Louis-René Nougier, titulaire de la chaire de Préhistoire de l'Université de Toulouse, et Romain Robert de la Société Préhistorique de l'Ariège[14].
Une vive polémique relatée dans l'ouvrage La Guerre des Mammouths surgit entre ceux qui croient en l'authenticité des œuvres d'art et ceux qui en doutent. Un comité pluridisciplinaire et de composition internationale entreprit des observations, ce qui permet de déterminer l'authenticité des dessins laissés. Ainsi, ce même comité se pencha sur l'homogénéité stylistique, les thèmes animaliers ainsi que les détails anatomiques particulièrement précis ou encore le niveau de conservation des tracés[15]. La conclusion ferme et définitive est donnée en septembre 1956, après les expertises de l'abbé Henri Breuil, du professeur Paolo Graziosi (université de Florence) et de Martin Almagro (université de Madrid)[16]. Auparavant il y a eu les grands débats sur l'art pariétal découvert à la grotte Chabot (1878), Altamira (1879), Pair-non-Pair (1883), grotte de la Mouthe[8] (1895)[17], la grotte du Figuier[18]… et bien d'autres. Le terrain est donc déjà largement préparé pour une reconnaissance de l'ancienneté de l'art de Rouffignac.
Au XXIe siècle ce sont les tracés digités présents sur les parois de la grotte qui font l'objet d'étude, menées notamment par Leslie Van Gelder et Kevin J. SHarpe. Ces derniers y mettent en évidence les comportements symboliques des enfants au paléolithique à travers la création de tectiformes[19].
La grotte est ouverte au public depuis 1959, du au . La visite se fait en train électrique, qui fait parcourir 4 kilomètres aller-retour dans les galeries principales.
Comme il y a un quota de visiteurs par jour, et qu'on ne peut pas réserver par téléphone, ni même sur place pour le lendemain, il faut y être en début de matinée en juillet/août pour avoir une chance d'avoir une place le jour même.
Parmi les sites naturels de la région Nouvelle-Aquitaine, le site se classe huitième en termes de fréquentation touristique en 2018 avec 60 724 visiteurs[22].
En 2006 a été célébré le 50e anniversaire de la découverte scientifique des peintures et gravures.
↑(en) K. Sharpe & L. Van Gelder, « Children and Paleolithic 'art': Indications from Rouffignac Cave, France », International Newsletter on Rock Art, vol. 38, , p. 9-17.
↑[Chermette 1975] Alexis Chermette, « L'ancienne mine de manganèse de Romanèche (Saône-et-Loire) (Encart) », Publications de la Société Linnéenne de Lyon, vol. 44, no 3, , p. 1-11 (lire en ligne [sur persee]).
↑[Belleforest 1575] François de Belleforest, Cosmographie universelle de tout le monde, vol. 198, Paris, Michel Sonnius, , 390 p., sur books.google.fr (lire en ligne), p. 198. Cité dans Roussot 1990, p. 34.
Le passage sur la grotte commence par :
« Près de Miramont aussi [...] se voit une caverne ou grottesque, que les naturels du pays appellent Cluzeau, de laquelle ceux qui y sont entrez racomptent grandes merueilles, la disans aller en longueur sous terre de 5 à 6 lieues, & que là-dedans il y a de belles sales… ».
↑[Delluc & Delluc 2009] Brigitte Delluc et Gilles Delluc, « Les découvertes d’art pariétal en Dordogne depuis un demi-siècle (1947-2000) », Spelunca, no 34, , p. 33-64 (Rouffignac : p. 35-37) (lire en ligne [PDF] sur paleosite.free.fr, consulté en ). Photo de 1948 de la frise des rhinocéros derrière la tente avec Bernard Pierret et M. Latour.
↑[Gély 2005] Bernard Gély, « De Chabot à Chauvet ; 130 années de découvertes d'Art paléolithique dans les gorges de l'Ardèche », Publications du musée des Confluences, no 3 « 150 ans de Préhistoire autour de Lyon », , p. 117-122 (lire en ligne [sur persee]), p. 118.
↑« Les 10 sites touristiques naturels les plus visités en Nouvelle-Aquitaine en 2018 », Sud Ouest, , p. 3.
↑« Le top des sites touristiques de Dordogne », Sud Ouest édition Dordogne, , p. 11.
Voir aussi
Bibliographie
Frédéric Plassard, La grotte de Rouffignac, toujours connue, longtemps méconnue, dans Archéologia, n°619,avril 2023, p. 46-53.
Jean Plassard et Marie-Odile Plassard, Visiter la grotte de Rouffignac, Éditions Sud Ouest, réédition 2022. 32 p..
Catherine Cretin, Stéphane Madelaine (dir), Mémoire de mammouth, catalogue de l'exposition du musée national de Préhistoire, Les Eyzies, édition musée national de Préhistoire, 2018.
Patrick Paillet, Qu'est-ce que l'art préhistorique, Paris, Éditions CNRS, 2018.
[Beck et al. 2012] Lucile Beck, Hélène Rousselière, Jacques Castaing, Adrian Duran, Matthieu Lebon, Sophia Lahlil et Frédéric Plassard, « Analyse in situ des dessins préhistoriques de la grotte de Rouffignac par fluorescence X et diffraction X portable », Varia, no 3, , p. 139-152 (lire en ligne [sur journals.openedition.org], consulté le ).
[Chevillot et al. 2020] Christian Chevillot, Frédéric Plassard, Eneko Hiriart et Vincent Geneviève, « Rouffignac, une grotte-sanctuaire du IIe âge du Fer », Documents d'archéologie et d'histoire périgourdines, vol. 34, , p. 117 (lire en ligne [sur hal.archives-ouvertes.fr], consulté le ).
[Igarashi 2010] Jannu Igarashi, « Chronologie de la réalisation d'une frise de mammouths dans la grotte de Rouffignac (Dordogne, France) », dans Jean Clottes (dir.), L’art pléistocène dans le monde, Bulletin de la Société Préhistorique Ariège-Pyrénées, n° LXV-LXVI, 2010-2011 (lire en ligne [PDF]), p. 355-376.
[Leroi-Gourhan 1988 (posth.)] André Leroi-Gourhan, « Rouffignac », dans Dictionnaire de la Préhistoire, Paris, Presses universitaires de France, , p. 959-960.
[Nougier & Robert 1957] Louis-René Nougier et Romain Robert, Rouffignac ou La Guerre des Mammouths, Paris, éd. la Table Ronde, , sur gallica (lire en ligne).
[Plassard 1999] Jean Plassard, Rouffignac. Le sanctuaire des mammouths, Paris, éd. Le Seuil, coll. « Arts rupestres », , 99 p..
[Roussot 1990] Alain Roussot, « Les premières découvertes d'art pariétal », Paléo, no hors-série « Une histoire de la préhistoire en Aquitaine », , p. 34-35 (lire en ligne [sur persee]).