Idrissa Ouédraogo naît à Banfora[1], en 1954. Son enfance se déroule dans la ville de Ouahigouya, située dans la région nord de son pays natal. Il tournera ses films (aux décors africains) dans cette région. En 1976, il obtient un baccalauréat en arts. Dans l'espoir d'offrir à leur fils des perspectives meilleures, ses parents, agriculteurs de profession, l'envoient à Ouagadougou pour poursuivre ses études. Là-bas, il intègre l'Institut africain d'études cinématographiques (LAFEC), dont il achève le cursus en 1981, il sort major de sa promotion en obtenant une maîtrise. Il part ensuite suivre un stage au VGIK (Institut fédéral d'État du cinéma) de Moscou[2],[3] et séjourne à Kiev quelque temps. Puis il va en France suivre les cours à l'Institut des hautes études cinématographiques (Idhec-Fémis) et à la Sorbonne, Paris I. Il obtient un DEA de cinéma[4] en 1985.
Carrière
Pour son projet de film de fin d'études, Idrissa Ouédraogo crée la société de production "Les Films de l'Avenir", qui ultérieurement évolue sous le nom de "Les Films de la Plaine"[4]. Ce court-métrage de fiction, intitulé Poko[5], remporte le prix du meilleur court-métrage au Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (FESPACO). Dans la même période, il intègre le corps des fonctionnaires à la Direction de la Production Cinématographique du Burkina Faso, où il réalise plusieurs courts-métrages documentaires[4],[6]. Son premier court métrage est Pourquoi sorti en 1981.
Par la suite, Ouédraogo réalise une série de courts métrages, comprenant notamment Les Écuelles (1983), Les Funérailles du Larle Naaba (1984), Ouagadougou, Ouaga deux roues (1985) et Issa le tisserand (1985). Son ultime court métrage, Tenga (1985), parcourt le retour d'un villageois dans sa communauté d'origine après avoir vécu en ville[7].
En 1986, il réalise son premier long métrage, Yam Daabo (Le Choix). Deux ans plus tard, Yaaba voit le jour : ce film se voit décerner le prix de la critique au Festival de Cannes en 1989 ainsi que le prix du public au FESPACO la même année. En 1990, il réalise Tilaï, une adaptation d'une tragédie grecque dans le contexte africain contemporain, qui lui vaut le Grand Prix du Jury à Cannes en 1990[8], le Prix du meilleur long métrage au 1erFestival du cinéma africain de Milan en 1991, ainsi que l’Étalon de Yennenga la même année.
La production cinématographique d'Idrissa Ouédraogo suscite des critiques, qui soulignent une orientation trop marquée vers l'attrait du public en Afrique et en Occident. Françoise Pfaff, parmi d'autres observateurs, le qualifie de conteur préférant les décors ruraux africains atypiques, illustrés par des scènes telles que « des images monotones de femmes battant du millet ou du maïs. » Selon Pfaff, cette orientation aliène les spectateurs africains tout en ciblant principalement un public non africain[10]. En réponse à ces critiques, Sharon A. Russell plaide en faveur d'Idriss Ouédraogo, soulignant les contraintes auxquelles le réalisateur est confronté pour maintenir son activité cinématographique en Afrique. Russell insiste sur la nécessité pour Ouédraogo de répondre aux exigences de financement de ses projets futurs, tout en reconnaissant son talent pour réaliser des films dans des conditions souvent difficiles.
Fin de vie et décès
En février 2015, peu avant l'ouverture du 24e Fespaco, Idrissa Ouédraogo annonce son intention de réaliser "un film important" traitant de la colonisation étrangère en Afrique, de la lutte anticoloniale et des figures marquantes de ce mouvement. Dans les années précédant sa disparition, ses proches relèvent son désenchantement à l'égard du cinéma africain contemporain, attribuant cette déception à une présumée insuffisance de talents et de moyens de production[11].
Le 18 février 2018, vers 5 h 30 GMT, Idrissa Ouédraogo meurt à la clinique Bois à Ouagadougou à l'âge de 64 ans[12],[13]. Peu après son décès, le président burkinabé, Roch Marc Christian Kaboré, exprime le sentiment que son pays « a perdu un cinéaste d'un immense talent. » Le 20 février, il est inhumé au cimetière de Gounghin. En chemin, le cortège funèbre fait halte près de la place des Cinéastes, à proximité de l'hôtel de ville de Ouagadougou, où il est honoré par le maire de la ville. Le cortège marque également un arrêt devant la porte du Fespaco. Des personnalités politiques, religieuses et artistiques assistent à la procession funéraire, marquée par des honneurs militaires[14].
↑Écrans d'Afrique - Numéros 3 à 10 Pan-African Federation of Film-Makers, Centro orientamento educativo (Italie) - 2001 « L'épreuve qui le guette désormais, et à laquelle le film de Ouédraogo se confronte victorieusement, est de continuer de croître en qualité et en puissance (technique, financière, organisationnelle), sans se perdre, sans perdre sa particularité et ... »
↑Médias France intercontinents, Cinémas africains d'aujourd'hui : guide des cinématographies d'Afrique : MFI, Medias France intercontinents, Paris, Karthala : Radio France internationale, , 142 p. (ISBN978-2-84586-889-2, lire en ligne)