Marc-Antoine Mathieu est né en 1959 à Antony. Il grandit à Angers où il suit les cours de l'école des beaux-arts. Il travaille le graphisme et la scénographie dans l'atelier « Lucie Lom »[2]. Il commence par publier dans différentes revues telles que Marcel, Le Banni et Morsures. Son premier livre paraît aux éditions Futuropolis en 1988.
En 1990, il publie L'Origine chez Delcourt, premier tome de sa série Julius Corentin Acquefacques, prisonnier des rêves. Le héros de l'histoire, Julius Corentin Acquefacques travaille au ministère de l'Humour. Un jour il reçoit une lettre qui contient la planche no 4 d'une bande dessinée nommée l'origine, qui figure au début du récit. Julius commence alors à se questionner sur le sens de son monde, sur le destin, sur l'existence d'un être supérieur…
Cet album reçoit l'Alph-Art Coup de Cœur à Angoulême 1991[3]. Six tomes supplémentaires ont suivi jusqu'à ce jour : La Qu…, Le Processus (Meilleur scénario à Angoulême 1994[3]), Le Début de la fin, La 2,333e Dimension, Le Décalage et L'Hyperrêve.
En paraît Les Sous-sols du Révolu - Extraits du journal d'un expert.
En , sort S.E.N.S VR[5], l'adaptation vidéoludique de la bande dessinée éponyme[6] ainsi que Otto, l'homme réécrit dans lequel il livre une réflexion sur la conscience de soi et le libre-arbitre[7].
Dans plusieurs de ses albums (notamment dans la série Julius-Corentin Acquefacques), Marc-Antoine Mathieu joue avec le livre-objet avec des expérimentations telles que l'anti-case (espace vide au milieu d'une planche), un album à double-sens de lecture, la 3D.
Il est l'artiste résident de l'Université de Tours pour l'année 2010-2011. Autour de différents colloques, il mène un laboratoire avec une quinzaine d'étudiants qui aboutit en avril 2011 à une exposition qui a pour thème le détournement d'images publicitaires.
Le format est également une source d'expérimentation : dans Otto, l’homme réécrit, il utilise un format à l'italienne et seulement deux cases par page. « J’ai choisi de confronter des images muettes, et un texte sans images. J’utilise, comme dans plusieurs de mes livres, le zoom. Cela amène une lecture en profondeur, tout en cassant la linéarité. Je peux aussi créer des parenthèses verticales dans un déroulé horizontal. »[7]
Analyse
L'œuvre de Marc-Antoine Mathieu regorge de « prouesses conceptuelles » et d'expérimentation sur la matérialité même du livre. C'est un « dynamiteur du langage de la bande dessinée ». On retrouve ainsi pêle-mêle dans son œuvre une multitude de formats d'ouvrages, des cases découpées, l'irruption de la troisième dimension, des collages, des récits qui s'entrecroisent, un abandon de l'illustration de couverture, etc. De même, dans son œuvre principale Julius Corentin Acquefacques, prisonnier des rêves, la bande dessinée devient en elle-même, par sa matérialité livresque et le dessin qui la composent, l'origine des péripéties et des rebondissements du héros et de ses compagnons (disparition du point de fuite et de la perspective, anti-case, apparition d'une troisième dimension, intrigue qui n'apparait pas aux protagonistes, etc.). Il participe de l'évolution actuelle de la bande dessinée vers le roman graphique[8].
D'une manière plus générale, le livre en tant qu'objet et en tant que symbole est omniprésent dans l'œuvre de Mathieu. Ainsi, dans nombre de ses ouvrages, le livre joue un rôle auprès des protagonistes. Dans Les sous-sols du Révolu, un registre est transmis de main en main ; dans Dieu en personne, Dieu est un auteur de best-seller ; dans L'Ascension, le héros est un moine bibliothécaire avec un journal ; dans Mémoire morte, le héros se rend à la « très grand bibliothèque » ; dans SENS, le héros découvre un livre vierge ; etc.[8].
Influences
Ses sources d'inspiration sont, entre autres, Franz Kafka et son atmosphère absurde et angoissante, Winsor McCay (auteur de Little Nemo in Slumberland) et Fred (auteur de Philémon). Ainsi, le personnage de son œuvre principale, Julius Corentin Acquefacques – dont le nom même est phonétiquementKafka inversé – chute au bas de son lit au commencement de chaque album, situation très fréquemment vécue par Little Nemo en clôture de ses aventures[8].
Paris-Mâcon, avec son frère Jean-Luc Mathieu (leur nom est repris au pluriel avec un x sur l'album : Mathieux[9]) (éditions Futuropolis, collection X, 1988)
Répertoire professionnel de la bande dessinée francophone 1998/1999 (éditions Musée de la bande dessinée, 1997) (ISBN2907848119) - Dessins de couverture et flipbook étendu sur toutes les pages à partir de la page 5 jusqu'à la page 175.
Coffret Kafka / Fiches rassemblant des dessins de Marc-Antoine Mathieu avec les Fiches de Zürau (aphorismes de Zürau) de Franz Kafka (traduits par Robert Kahn), des lectures de textes par Denis Lavant, et des créations musicales et vidéos de Wilfried Wendling - éditions Nous et La Muse en Circuit, 2024 (ISBN9782370841438)
↑ a et bThierry Groensteen et collectif, Primé à Angoulême : 30 ans de bande dessinée à travers le palmarès du festival, Éditions de l'An 2, (ISBN2-84856-003-7)
↑« Grand Prix BD de Sierre, Marc-Antoine Mathieu tire son succès d'un mystérieux dessin », Le Temps, (lire en ligne, consulté le )
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
Mélanie Lamarche-Amiot, « Spirales et anneaux de Möbius dans Le processus et Le début de la fin de Marc-Antoine Mathieu », Tangence, Rimouski, Canada, (lire en ligne, consulté le )
Dany Rasemont, Julius Corentin Acquefacques, par-delà la bande et le dessin, GRIT, , 156 p. (lire en ligne)
Sylvain Lemay, « L’Origine de Marc-Antoine Mathieu, ou Le surcroît de l’œuvre », MEI, Université du Québec en Outaouais, no 26 « Poétiques de la bande dessinée », (lire en ligne)
(de) Frank Leinen, « Spurensuche im Labyrinth. Marc-Antoine Mathieus Bandes dessinées zu Julius Corentin Acquefacques als experimentelle Metafiktion », Bilderwelten – Textwelten – Comicwelten. Romanistische Begegnungen mit der Neunten Kunst, Martin Meidenbauer, Munich, , p. 229-263 (ISBN978-3-89975-099-7)
Thierry Groensteen, « Marc-Antoine Mathieu, la bande dessinée au défi », Revue 303, no 144 « Bandes dessinées »,
Antoine Guillot, « Marc-Antoine Mathieu », Beaux-Arts Magazine, hors-série : Qu'est-ce que la BD aujourd'hui ?, , p. 82-83 (ISSN0757-2271)