Parmi les opérateurs monotones, il faut distinguer ceux que l'on qualifie de monotones maximaux. Ils possèdent une propriété de maximalité qui s'exprime en termes d'inclusion de graphe et qui leur donne des propriétés remarquables. Ainsi, pour un opérateur monotone , l'inclusion fonctionnelle
dans laquelle est un ensemble, a au plus une solution , alors que si monotone maximal, cette inclusion a une et une seule solution.
Si est un espace de Hilbert, la multifonction cône normal à un convexe : est un opérateur monotone. C'est un cas particulier du précédent, puisque le cône normal est le sous-différentiel de la fonction indicatrice de (une fonction convexe lorsque est convexe). Elle est monotone maximale si est fermé.
Si est un espace vectoriel, l'ensemble de ses parties hérite naturellement d'une loi externe et d'une addition (la somme de Minkowski), dont hérite à son tour l'ensemble des multifonctions de dans .
Opérateur monotone
Soit un espace préhilbertien dont le produit scalaire est noté et la norme associée .
Opérateurs monotones — Une multifonction est dite :
monotone si
;
strictement monotone si l'inégalité ci-dessus est stricte lorsque ;
fortement monotone de module si
.
Propriétés immédiates — Soit un opérateur monotone.
Si est un réel positif et , est monotone.
est monotone.
Si est monotone, alors est monotone.
On peut exprimer la propriété de monotonie en utilisant uniquement la norme associée au produit scalaire de [2]. Les opérateurs vérifiant cette propriété sur un espace normé sont dits accrétifs.
Monotonie et accrétivité — Pour une multifonction , les propriétés suivantes sont équivalentes :
est monotone,
est accrétif, c'est-à-dire : pour tout , pour tout et pour tout , on a
Par la propriété d'accrétivité, on voit que si est monotone, l'inclusion
Opérateur monotone maximal — On dit qu'un opérateur est monotone maximal s'il est monotone et s'il n'existe pas d'opérateur monotone tel que est strictement inclus dans . Une autre manière d'exprimer la maximalité d'un opérateur monotone est la suivante
Le résultat de cette implication est donc que , ce qui pourra parfois être interprété comme un résultat d'existence de solution d'inclusion ( est donné et il faut trouver ). Pour prolonger la remarque faite ci-dessus, si la monotonie de implique l'unicité de la solution de l'inclusion
la maximalité d'un opérateur monotone permet de montrer l'existence de solution de cette inclusion.
Propriétés immédiates — Si est un opérateur monotone maximal, alors
pour tout strictement positif, est monotone maximal,
est monotone maximal,
est fermé dans ,
pour tout , est un convexe fermé de ,
pour tout , est un convexe fermé de .
Pour la somme de deux opérateurs monotones maximaux, voir la section qui est consacrée à ce thème difficile.
Exemples
Soient un espace de Hilbert et une fonction convexeferméepropre. Alors l'application sous-différentiel est monotone maximale[3]. Le problème de trouver un tel que est équivalent à celui de trouver un point minimisant .
Soient un espace de Hilbert dont le produit scalaire est noté , un convexe fermé non vide de , est le cône normal à en et un opérateur univoque monotone (non nécessairement maximal) hémicontinu contenant dans son domaine. Alors est monotone maximal[4]. Le problème de trouver un tel que est équivalent à celui de trouver une solution du problème de l'inéquation variationnelle suivante :
Caractérisations
Voici des caractérisations bien utiles de la monotonie maximale d'un opérateur. On note l'opérateur identité.
Caractérisation — Soient un espace de Hilbert et un opérateur. Les propriétés suivantes sont équivalentes :
On note qu'un opérateur non expansif est nécessairement univoque[5]. La propriété équivaut à dire que pour tout , (c'est un singleton) ou encore que l'inclusion
a une (et une seule) solution .
La résolvante d'un opérateur monotone maximal est l'application non expansive (donc univoque) suivante
La résolvante est définie sur tout entier. De plus, si l'on introduit l'opérateur univoque , on a
Si la somme de deux opérateurs monotones est un opérateur monotone, la somme de deux opérateurs monotones maximaux n'est pas nécessairement un opérateur monotone maximal, ne fût ce que parce que l'intersection de leur domaine peut être vide (auquel cas le domaine de leur somme est vide). On a le résultat suivant[6], dans lequel désigne l'intérieur d'une partie , désigne son adhérenceforte et est dit localement borné en s'il existe un voisinage de dont l'image est bornée.
Somme de deux opérateurs monotones maximaux — Soient un espace de Banach réflexif et , deux opérateurs monotones maximaux vérifiant l'une des deux conditions équivalentes suivantes :
,
il existe un point de en lequel est localement borné.
Alors est monotone maximal.
Résolution d'inclusion monotone
Soit un opérateur monotone maximal. Cette section décrit quelques algorithmes de résolution de l'inclusion monotone
Il s'agit de trouver tel que l'ensemble de contienne l'élément nul. Les descriptions sont brèves et renvoient aux articles dédiés aux algorithmes correspondants.
l'article « Algorithme proximal (optimisation) » pour le cas particulier où est le sous-différentiel d'une fonction convexe fermée propre.
Algorithme de Douglas-Rachford
Il s'agit d'un algorithme adapté à la recherche d'un zéro de la somme de deux opérateurs monotones maximaux et . On cherche donc tel que
L'algorithme est bien adapté au cas où les points proximaux et d'un point donné peuvent se calculer aisément.
Algorithme de Douglas-Rachford[7] — On se donne un itéré initial et un scalaire . L'algorithme définit une suite d'itérés , jusqu'à ce qu'un test d'arrêt soit satisfait. Il passe de à par les étapes suivantes :
,
,
, où .
On montre que la suite générée par cet algorithme converge faiblement vers un point , si a un zéro et les amortisseurs sont tels que
dans ce cas est un zéro de .
Opérateur monotone d'un espace de Banach dans son dual topologique
Soit un espace de Banach et son dual topologique. Pour et , on pose :
.
Un opérateur (non nécessairement linéaire) de dans est dit monotone si[8] :
.
Annexes
Notes et références
↑Ce résultat est dû à G. J. Minty (1964) si est un espace vectoriel topologique et est convexe, finie et continue. Il est dû à R. T. Rockafellar (1966, 1970b) lorsque est un espace de Banach et est convexe, propre et semi-continue inférieurement.
(en) H. H. Bauschke et P. L. Combettes, Convex Analysis and Monotone Operator Theory in Hilbert Spaces, Springer, 2011
(en) J. M. Borwein et Q. J. Zhu, Techniques of Variational Analysis, Société mathématique du Canada, Springer Science+Business Media, Berlin, 2010
Haïm R. Brezis, « Les opérateurs monotones », Séminaire Choquet — Initiation à l'analyse, t. 5, no 2 (1965-1966), , article no 10 (lire en ligne)
(en) J. Douglas et H. H. Rachford, « On the numerical solution of heat conduction problems in two and three space variables », Translations of the American Mathematical Society, vol. 82, 1956, p. 421-439
(en) G. J. Minty, « Monotone (nonlinear) operators in Hilbert space », Duke Math. J., vol. 29, 1962, p. 341-346
(en) G. J. Minty, « On the monotonicity of the gradient of a convex function », Pac. J. Math., vol. 14, 1964, p. 243-247
J. J. Moreau, « Proximité et dualité dans un espace hilbertien », Bull. Soc. Math. Fr., vol. 93, 1965, p. 273-299
(en) R. R. Phelps, Convex Functions, Monotone Operators and Differentiability, coll. « Lecture Notes in Mathematics » (n° 1364), Springer-Verlag, Berlin, 1993
(en) R. T. Rockafellar, « Characterization of the subdifferentials of convex functions », Pac. J. Math., vol. 17, 1966, p. 497-510
(en) R. T. Rockafellar, « On the maximality of sums of nonlinear monotone operators », Translations of the American Mathematical Society, vol. 149, 1970, p. 75-88
(en) R. T. Rockafellar, « On the maximal monotonicity of subdifferential mappings », Pac. J. Math., vol. 33, 1970b, p. 209-216.