Share to: share facebook share twitter share wa share telegram print page

 

Préretraite

La préretraite est une période d'inactivité rémunérée située entre la cessation d'activité professionnelle et la retraite proprement dite. Dans les pays possédant une assurance retraite répandue, le financement est généralement partagé par les collectivités publiques et les entreprises.

La préretraite est utilisée par certaines entreprises comme un outil de renouvellement ou de réduction de personnel : elle est souvent moins risquée pour l'image de l'entreprise qu'un plan de licenciements et moins contraignante sur un plan administratif. La préretraite peut faire partie d'un plan social afin d'atténuer le nombre de licenciements et de reclassements à effectuer.

La préretraite signifie aussi, notamment en Amérique du Nord, l'état d'une personne en pleine possession de ses moyens qui jouit d'une indépendance financière lui permettant de choisir la fréquence et l'intensité de ses activités professionnelles.

Préretraite en France

Historique en France

Origines des préretraites (années 1960-1970)

Après les Trente Glorieuses, la France entre dans une période marquée par une hausse du chômage structurel et des mutations industrielles. Les entreprises cherchent des solutions pour gérer les effectifs, notamment les départs des salariés âgés. Elles commencent à mettre en place des péréquations internes pour proposer des départs anticipés aux salariés, souvent sans cadre légal précis. Leur but est de faciliter le remplacement des salariés seniors par des jeunes, dans une optique de gestion de l'emploi.

Institutionnalisation des préretraites (années 1970 et 1980)

Avec l’accord national interprofessionnel du , un dispositif de garantie de ressources est mis en place pour les chômeurs âgés de plus de 60 ans et licenciés, assurant au bénéficiaire 70 % de son dernier salaire brut. Dès lors, avec cette garantie de ressources licenciement (GRL) le départ anticipé cesse d'être exceptionnel et s'étend à l'ensemble d'une classe d'âge[1]. Par accord paritaire en juin 1977, cette garantie est également ouverte aux démissionnaires âgés, avec la garantie de ressources démission (GRD). Ces dispositifs sont utilisés par les grandes entreprises industrielles pour réduire ou redéployer leurs effectifs[2]. Contrairement aux retraites rattachées à l'assurance vieillesse, ces régimes de préretraites relèvent de l'assurance chômage. Par conséquent, le montant versé est calculé selon les gains des trois derniers mois, contrairement aux dix meilleures années pour les retraites[3].

Avec l'abaissement de l'âge légal de la retraite à 60 ans en 1982 par une des ordonnances Auroux, les inactifs sont progressivement transférés de l'UNEDIC vers les caisses de retraites, ce qui signifie la fin de la garantie de ressources. Toutefois, cela se traduit par une baisse des revenus en raison du dispositif plus favorable dans le cadre de la garantie de ressources que le régime des retraites[4]. Néanmoins, la création des contrats de solidarité préretraite permet aux salariés de 55 à 59 ans d'effectuer un départ volontaire en préretraite avec 70 % du salaire brut, à condition que l'entreprise s'engage contractuellement à les remplacer par des nouvelles embauches du même nombre. Par ailleurs, un dispositif supplémentaire dans le cadre du Fonds National pour l’Emploi permet une préretraite pour les licenciés économiques à partir de l'âge de 56 ans[1].

L’âge d’or des préretraites (années 1980-1990)

Le chômage des jeunes atteint des niveaux préoccupants. Les préretraites deviennent un outil privilégié pour libérer des postes et atténuer les tensions sur le marché du travail. Les années 1980 voient une explosion des dispositifs, financés principalement par les entreprises, mais souvent soutenus par l’État (Préretraite fonds national de l'emploi (FNE), Préretraite progressive, Préretraite AS-FNE,...). Le nombre de préretraités atteint son apogée, avec environ 500 000 personnes concernées[5].

Réformes restrictives (années 1990-2000)

Les années 1990 marquent un tournant. La priorité de l’État n’est plus de réduire l’emploi des seniors, mais au contraire de les maintenir dans l’emploi pour assurer l’équilibre des régimes de retraite et réduire les dépenses sociales. Des restrictions sont apportées sur les dispositifs de préretraite :

  • La loi de 1993 (réforme Balladur) commence à limiter les conditions d’accès à la préretraite, notamment en augmentant l’âge minimal.
  • En 1998, le gouvernement Jospin introduit des restrictions supplémentaires, tout en incitant au temps partiel senior.

Réforme des retraites de 2003 : quasi-fin des préretraites d’État

La Loi Fillon du 21 août 2003 réforme les retraites et met fin à la plupart des dispositifs publics de préretraite. Elle a pour objectif d'encourager les seniors à travailler plus longtemps en introduisant des décotes pour les départs précoces. Les préretraites deviennent essentiellement des préretraites "maison", financées par les entreprises dans le cadre de plans sociaux. La fiscalité sur ces dispositifs est alourdie pour en limiter l'usage.

Les dispositifs actuels (années 2010 à aujourd'hui)

Les préretraites deviennent marginales. Avec l’allongement de la durée de cotisation pour les retraites (réformes de 2010 et 2014), les dispositifs de préretraite se font de plus en plus rares. L'État privilégie des dispositifs comme le Cumul emploi-retraite ou la retraite progressive pour maintenir les seniors dans l’emploi. En 2022, le Cercle de l'Epargne estimait le nombre de préretraité en France à moins de 60 000 personnes[6].

Les différents dispositif de préretraite en France

Le dispositif de préretraite amiante (ACAATA)[7]

Le dispositif de préretraite amiante (ACAATA) concerne les salariés exposés à l’amiante dans le cadre de leur activité professionnelle. Les salariés doivent être inscrits sur une liste officielle d’établissements ou de métiers à risque et avoir atteint un âge d’entrée dans le dispositif en fonction de l’âge de la retraite à taux plein. Il permet de bénéficier d'une allocation spécifique financée par le Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (FCAATA) et de compenser le manque à gagner jusqu’à l’âge légal de la retraite.

La retraite anticipée pour carrières longues

Ce dispositif de retraite anticipée pour carrières longues[8] concerne les salariés ayant commencé à travailler jeune et ayant cotisé un nombre suffisant de trimestres. Les salariés doivent avoir débuté leur activité avant un certain âge (16, 18 ou 20 ans) et valider la durée d’assurance requise. Il permet de partir à la retraite jusqu’à deux ans avant l’âge légal.

Allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA)

L’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) en cas d’arrêt anticipé. Ce dispositif concerne les salariés proches de l’âge de la retraite et sans ressources suffisantes. Elles doivent avoir une résidence stable et régulière en France ainsi que des ressources inférieures à un plafond annuel fixé. Ce n'est pas à proprement dit un régime de préretraite, mais il garantit un minimum de ressources jusqu’à l’âge légal de la retraite. Au décès du bénéficiaire, les allocations sont récupérées sur sa succession si l’actif net successoral est au moins égal au seuil de recouvrement[9].

Les préretraites "maison"

Des dispositifs de préretraite peuvent être mis en place par l’employeur dans le cadre d’une décision unilatérale ou d’un accord collectif. Il consiste en une suspension ou une rupture de contrat de travail accompagnée d'une allocation financée par l’entreprise. Depuis la loi du 21 août 2003, ces dispositifs sont soumis à une taxation importante pour l’employeur, notamment en cas de rupture de contrat.

Dispositifs similaires à l’international

Le dispositif de préretraite existe également dans d’autres pays, bien que les modalités diffèrent.

Préretraite en Belgique

En Belgique, la convention de reclassement collectif (RCC) permet aux salariés âgés de quitter le marché du travail avant l'âge légal de la retraite sous certaines conditions d'âge minimal (généralement 60 ans, mais parfois dès 58 ans dans des cas spécifiques (métiers lourds, restructuration) et d'un Accord collectif ou plan social. Le salarié reçoit une indemnité complémentaire financée par l'employeur, en plus des allocations de chômage. Il reste disponible pour le marché du travail mais n’a pas l’obligation de chercher activement un emploi.

Préretraite au Canada

Au Canada, la retraite anticipée est à options flexibles. La préretraite est possible via des régimes privés ou des dispositifs publics de pension anticipée. Elle est conditionnée à un âge minimal de 60 ans (dans le cadre du Régime de pensions du Canada - RPC). Le salarié peut recevoir une pension réduite s'il décide de partir avant l'âge de 65 ans. Les employeurs proposent parfois des régimes de retraite anticipée dans le cadre de négociations collectives.

Notes et références

  1. a et b Guillemard, Anne-Marie, et Alain Touraine. « Chapitre 3 - Vieillesse et emploi. L’explosion des préretraites », , Le Déclin du social. Formation et crise des politiques de la vieillesse, sous la direction de Guillemard Anne-Marie, Touraine Alain. Presses Universitaires de France, 1986, pp. 217-291.
  2. Jean-Luc Heller, « La retraite anticipée : choix ou contrainte ? », Economie et Statistique, vol. 193, no 1,‎ , p. 97–109 (DOI 10.3406/estat.1986.2522, lire en ligne, consulté le )
  3. « Préretraite ou retraite à soixante ans : les inconséquences du mélange des genres. », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  4. François Lenormand et Gérard Magnier, « Le développement des dispositifs de cessation anticipée d'activité : aspects sociaux et conséquences financières », Travail et emploi, no 15,‎ (lire en ligne)
  5. https://www.securite-sociale.fr/files/live/sites/SSFR/files/medias/CCSS/2011/FICHE_ECLAIRAGE/CCSS-FICHE_ECLAIRAGE-SEPTEMBRE_2011-L-EVOLUTION_DE_L-EMPLOI_DES_SENIORS_DEPUIS_1975.pdf?utm_source=chatgpt.com
  6. https://cercledelepargne.com/la-preretraite-un-dispositif-en-desuetude?utm_source=chatgpt.com
  7. https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F2110
  8. https://www.xn--cfdt-retraits-mhb.fr/IMG/pdf/2003-05-13_releve-decisions-retraites.pdf
  9. https://www.xn--cfdt-retraits-mhb.fr/23-Allocation-de-solidarite-aux-personnes-agees-ASPA

Bibliographie

  • La préretraite progressive, Emmanuel Lefevre, Editeur Liaisons (Editions), (ISBN 2-87880-222-5)
  • Guide juridique et pratique de la retraite et de la préretraite, par Bénédicte Desmarais, De Vecchi Editions 2002, (ISBN 9782732808932)

Articles connexes

Prefix: a b c d e f g h i j k l m n o p q r s t u v w x y z 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9

Portal di Ensiklopedia Dunia

Kembali kehalaman sebelumnya