Le SO-4050 Vautour est un avion multirôle biréacteur français conçu par la SNCASO au début des années 1950. Il a été construit à 140 exemplaires, dont 30 exportés vers Israël. Les derniers Vautour ont été retirés du service à la fin des années 1970.
Conception
Au début des années 1950, l'armée de l'air émet une demande pour un chasseur lourd propulsé par deux réacteurs SNECMA Atar. Ayant travaillé sur un projet de bombardier finalement abandonné, le SNCASO SO.4000, Jean-Charles Parot de la SNCASO en propose un dérivé de taille inférieure avec les réacteurs installés sous les ailes, une soute ventrale pour l'emport d'armement, quatre canons de 30 mm, des missiles Matra R511 (uniquement pour le Vautour IIN), une très bonne autonomie et une vitesse maximale supérieure à 1 000 km/h.
Le projet est accepté en 1952 et trois versions demandées :
Vautour II N : chasseur tous temps (biplace en tandem doté d'un radar) ;
Vautour II B : bombardier (biplace avec un navigateur/bombardier installé à l'avant du nez vitré). Le IIB est dépourvu de cannon.
Le premier prototype, un Vautour II N, fait son vol inaugural le avec des réacteurs Atar 101 B. En , il reçoit des Atar 101 C et dépasse le mur du son en piqué. Le prototype du Vautour II A décolle lui pour la première fois le , et celui du Vautour II B le . Ces prototypes sont suivis par 6 exemplaires de présérie équipés de réacteurs Atar 101 D puis Atar 101 E.
Carrière
Après quelques modifications, la production en série est lancée à Saint-Nazaire (Loire-Atlantique) et le premier Vautour livré officiellement en . La commande initiale de 300 exemplaires est finalement réduite à seulement 140 fin 1958. L'Armée de l'air réalise rapidement qu'elle n'a pas besoin du Vautour II A et, après les avoir utilisés pour l'entraînement de ses pilotes, les propose à l'exportation.
Une partie des Vautour II B français est modifiée pour être également capable d'effectuer des missions de reconnaissance (Vautour II BR) et une autre pour la guerre électronique (Vautour II GE). Une soixantaine d'avions sont révisés et modernisés (opération Jouventour) entre 1967 et 1971. Les derniers Vautour sont retirés du service en , seuls quelques exemplaires restant utilisés pour le remorquage de cible ou des essais de radar, ces derniers au sein du Centre d'Essais en Vol.
En , Israël achète 19 Vautour II A, 4 Vautour II N et 8 Vautour II B. Ces avions sont livrés entre et . Les Vautour israéliens reçoivent plusieurs modifications durant leur carrière, dont en particulier l'adaptation d'un certain nombre d'entre eux à des missions de reconnaissance. Ils sont retirés du service en 1971 pour la plupart, certains restant utilisés encore quelques mois en 1972.
Engagements
Armée de l'air israélienne
Israël a engagé ses Vautour lors de la guerre des Six Jours (1967), principalement dans des missions de bombardement, ainsi que dans diverses opérations de moindre importance.
Lors du premier jour de l'offensive israélienne, le , toutes les bases aériennes égyptiennes avaient été neutralisées et l’aviation égyptienne détruite au sol dès la fin de matinée. Seule restait intacte la base égyptienne de Ras Banas, très au sud, au bord de la Mer Rouge, où plusieurs avions égyptiens avaient trouvé refuge hors de portée des Dassault Mirage III-CJ israéliens, à 900 kilomètres de leurs bases. À 18 heures, des Vautour israéliens, opérant à la limite de leur rayon d’action, parvinrent à la neutraliser[1].
Au total, six avions furent abattus par la défense anti-aérienne ou l'aviation adverse. Un Vautour a abattu un Hawker Hunter de la force aérienne irakienne, unique victoire aérienne de ce type d'appareil. Les Hunter ayant eux abattu deux Vautour aux canons de 30 mm[2].
France
Les Vautour ont également été utilisés à partir de 1960 lors des essais nucléaires français en Algérie française[3] et en Polynésie française : ils servaient à récupérer les particules présentes dans l'air. Le prélèvement s'effectuait par des sondes fixées sous les ailes, lors du passage dans le nuage radioactif, en vue d'analyse radio-chimique. En 1975, après avoir participé à huit campagnes de tirs nucléaires atmosphériques, les Vautour utilisés pour ces missions connaissent des destins variés[4] :
Les cinq les plus contaminés sont immergés par plusieurs centaines de mètres de fond (avions nos 317, 604, 607, 611 et 625) ;
Quatre autres sont mis à la ferraille (avions nos 4, 309, 313 et 323) ;
Un dernier Vautour, le no 302, fut conservé en exposition statique sur l'atoll de Hao, près de l'ancienne escale aérienne militaire. Il a été démonté au début de l'année 2000, et certaines parties de l'aéronef, notamment un réacteur et la cellule, ont été ramenées en métropole.
Variantes
La production totale s'élève à 149 avions :
Prototypes : 3 ;
Pré-production : 6 ;
Vautour II A d'attaque au sol : 30 exemplaires (13 pour la France, 17 pour Israël) ;
Vautour II B bombardier : 40 exemplaires (36 pour la France, 4 pour Israël) ;
Vautour II N chasseur tous temps : 70 exemplaires (63 pour la France, 7 pour Israël).
Vautour A.
Vautour B.
Vautour N.
Opérateurs
France : l'Armée de l'air française utilisa 112 avions :
La 92e Escadre de Bombardement (Cognac puis Bordeaux) utilisa le Vautour II B puis, entre 1970 et 1978, quelques Vautour II N :
Le Groupe de Marche 85 "Loire" stationné sur la BA 185 de Hao en soutien du Centre d'Expérimentations Nucléaires du Pacifique, avec une dizaine de Vautour IIB et IIN qui étaient conservés sur place sous tente anhydre entre les campagnes d'essais nucléaires.
Israël : l'Armée de l'air israélienne reçut 31 machines, utilisées entre les mois de et :
L'Escadron 110 basé à Ramat David mit en œuvre 19 Vautour II A et quatre Vautour II B ;
L'Escadron 119 basé à Tel-Nof mit en œuvre huit Vautour II N.
Autres caractéristiques
Malgré son allure massive, le Vautour était très manœuvrable et agréable à piloter. Sa fabrication fit appel à des techniques avancées pour l'époque : collage métallique et emploi de matériaux de type nid d'abeille. Son train d'atterrissage était un train monotrace composé de deux diabolos en tandem sous le fuselage et de deux roulettes nommées « balancines » dans les nacelles des réacteurs.
Un Vautour en mission de reconnaissance apparait à la page 16 de "Destination Pacifique" et au sol à la page 23 de "Menace sur Mururoa" dans Les Aventures de Tanguy et Laverdure[9],[10].
Les trois variantes du Vautour sont aussi présentes dans le jeu vidéo War Thunder aussi bien dans l'arbre français que dans l'arbre Israélienne (à l'exception du IIB). Avant que la branche israélienne ne soit ajouté en jeu, le Vautour IIA israélien se trouvait dans l'arbre Premium français, avant d'avoir été permuté vers l'israélien dans la branche principale.
Enzo Angelucci et Paolo Matricardi (trad. de l'italien), Les avions, t. 5 : L'ère des engins à réaction, Paris/Bruxelles, Elsevier Sequoia, coll. « Multiguide aviation », , 316 p. (ISBN2-8003-0344-1), p. 246-247.
(en) Bill Gunston, Fighters of the Fifties, Cambridge, Angleterre, Patrick Stephens Limited, (ISBN0-85059-463-4).
Michel Bénichou, « Hervé Poulin, Jacques Billy et le "Vautour" II N », Le Fana de l'Aviation, no 269, , p. 34-38.