Cet ouvrage en format poche (125 × 178 mm) fait partie de la série Archéologie dans la collection « Découvertes Gallimard », c’est-à-dire, on s’intéresse ici à la redécouverte de l’Égypte pharaonique, de la période gréco-romaine au XXe siècle ; et l’histoire de l’égyptologie, de sa naissance à son essor[3], mais non à l’histoire de l’Égypte antique.
Ne s’adressant objectivement pas aux spécialistes du domaine, l’opus de l’égyptologue lillois révèlent les grands moments des découvertes archéologiques en Égypte et les noms qui ont été à jamais liés aux découvertes les plus spectaculaires : Mariette, Maspero, Carter, Montet…[4]
Selon la tradition des « Découvertes », cette collection repose sur une abondante documentation iconographique et une manière de faire dialoguer l’iconographie documentaire et le texte, enrichie par une impression sur papier couché. En d’autres termes, « de véritables monographies, éditées comme des livres d’art »[5]. C’est presque comme un « roman graphique », rempli de planches en couleurs.
Cet opus est l’une des cinq meilleures ventes des « Découvertes »[6], édité à deux cent trente mille exemplaires et qui se serait vendu à plus de cinq cent mille exemplaires dans le monde au 2001[7]. Il a été traduit dans de nombreuses langues, et réédité à plusieurs reprises. Les éditions rééditées subissent une cure d’amaigrissement, de deux cent vingt quatre à cent soixante pages. Une nouvelle édition est parue en 2007, à l’occasion des 20 ans des « Découvertes »[8]. Une édition numérique pour iPad a été lancée en 2012[9], et une version enrichie[10].
« Un monde de pierres. Pierres des pyramides, pierres des temples, pierres des statues. Noyées dans le sable, enlisées, oubliées. Un monde de signes. Signes gravés, signes peints. Mystérieux, incompris. Un monde qui va reprendre vie sous le regard, le crayon, la truelle de voyageurs, d’aventuriers, de savants, d’archéologues. Un monde qui va enfin dévoiler ses secrets, en 1822, grâce à Jean-François Champollion. »
— Jean Vercoutter, À la recherche de l’Égypte oubliée[11]
Le corpus
Pré-générique (p. 1–9)
une succession d’illustrations pleine page accompagnées de textes, réalisées par Dominique Thibault, d’après des reliefs peints de l’Égypte antique, comme le relief représentant Ramsès III dans la tombe de son fils Amonherkhépeshef (p. 9), entre autres.
Chapitre premier : « La Disparition de l’Égypte des Pharaons » (p. 13–17)
évoquant les événements déplorables que furent la destruction de la bibliothèque d’Alexandrie (Il a déclaré qu’il y avait sept cent mille volumes) et du temple de Sérapis dans la même ville, se perdant dans l’un des textes précieux qui pourraient clarifier les lacunes qui aujourd’hui subsister sur l’histoire de l’Égypte pharaonique. Heureusement, d’autres sources sont restées disponibles, la Bible étant l’une d’entre elles, comme le mentionne bien l’auteur.
Chapitre II : « Les Voyageurs de l’Antiquité » (p. 19–27)
Chapitre III : « Croisés, moines et curieux au fil du Nil » (p. 29–51)
rappelant une époque pendant laquelle l’Égypte musulmane s’est pratiquement fermée à l’Occident chrétien. Il est vrai qu’à l’époque des croisades, certains textes sont apparus qui ont légèrement soulevé le manteau islamique qui couvrait la région historique, mais en tout cas les rares voyageurs ne sont pas passés au sud du Caire. Ainsi, « aucun des récits du Ier siècle au XIVe siècle ne sont comparables à ceux des Anciens » — c’est qu’à l’époque personne ne savait lire les textes hiéroglyphiques. Jusqu’au début du XIXe siècle, des visiteurs plus ou moins illustres suivirent (le dominicain Vansleb, Jean de Thévenot, Benoît de Maillet, Claude Sicard, Claude-Étienne Savary, comte Volney), avec un accent particulier sur le général Bonaparte à la tête de son armée et ses sages.
Vue du Grand Caire, peint par Henry Salt, début du XIXe siècle. Illustration tirée des p. 66–67.
Illustration reproduite à la p. 92 : un relief peint du Grand temple d’Abou Simbel dans les Monuments de l’Égypte et de la Nubie par Champollion (1845), montrant Ramsès II conduisant son char, mais indiquant dans la légende comme une image de Séthi Ier, comme le soulignent l’égyptologue portugais Luís Manuel de Araújo(pt)[4], et l’égyptologue russe Victor Solkin(en)[12].
Chapitre IV : « Aventuriers et voleurs » (p. 53–85)
L’expédition de Bonaparte amènera la publication de deux ouvrages notables comme résultat plus fructueux : le Voyage dans la Basse et la Haute Égypte, de Vivant Denon, et la Description de l’Égypte. Et c’est alors que l’Égypte devint, pourrait-on dire, à la mode, se prêtant l’environnement à l’émergence de l’égyptomanie et, bien plus important encore, de l’égyptologie : « De 1802 à 1830, une dizaine de voyageurs de grand valeur, français, allemands, anglais, suisses, viennent voir sur place les merveilles révélées par le Voyage et la Description. » L’auteur évoque alors l’action des consuls européens et de leurs hommes actifs engagés dans l’obtention d’antiquités (le géant Belzoni en faisait partie), utilisant parfois des procédés plus proches de la proie et du pillage que de la prospection minutieuse. À l’époque de l’archéologie héroïque et désordonnée, il était naturel que cela se produise.
Chapitre V : « L’Ère des savants » (p. 87–99)
avec l’accent attendu donné à Jean-François Champollion, qui a su anticiper les efforts de plusieurs concurrents (l’Anglais Thomas Young, le Suédois Åkerblad et le Français Silvestre de Sacy). Les grands noms liés à la phase post-champollionique sont Karl Lepsius, fondateur de l’égyptologie allemande et Wilkinson, qui peut être considéré comme le fondateur de l’égyptologie anglaise. Ils sont rejoints par le Français Prisse d’Avesnes, qui a envoyé une série d’antiquités égyptiennes dans son pays.
Chapitre VI : « Les Archéologues au secours de l’Égypte » (p. 101–111)
Après plusieurs décennies de pillage effréné, de destruction de monuments, de mépris du compte rendu minutieux des découvertes, les archéologues au secours de l’Égypte arrivent. Parmi ceux-ci, l’activité digne d’Auguste Mariette est mise en évidence, qui finira par mourir en Égypte, occupant le poste élevé de directeur du Service des Antiquités (mamur), Gaston Maspero, son successeur, l’Allemand Brugsch, se distingue.
Chapitre VII : « L’Égypte retrouvée » (p. 113–127)
évoque les travaux de Howard Carter dans la vallée des Rois (tombeau de Toutânkhamon) et de Pierre Montet à Tanis (tombes des pharaons des XXIe et XXIIe dynasties — Amenemopet, Psousennès Ier, Sheshonq II), déjà dans la première moitié du XXe siècle. Si les découvertes des tombes de Toutânkhamon et de Psousennès avaient la projection internationale qui est connue, la vérité est que pratiquement chaque année de nouvelles découvertes ont été mises au jour, dont beaucoup ne sont connues que des équipes de travail, les savants, et les lecteurs de revues spécialisées à thème égyptologique. À un bon rythme, même aujourd’hui les découvertes se poursuivent, explorant méthodiquement les sites archéologiques existant non seulement en Égypte mais en Nubie : de cette manière « les philologues, les épigraphistes, les historiens peuvent se pencher sur les documents mis au jour » — est-ce que « l’égyptologie a dépassé le stade de l’enfance, elle entre dans sa maturité ».
Dépliants au détour de la p. 128, d’une vue panoramique
En plus de ces grands noms de voyageurs d’Orient, les textes des égyptologues modernes tels que Claude Traunecker et Jean-Claude Golvin (sur les travaux de restauration du temple de Karnak) et Jean Vercoutter lui-même sur le sauvetage d’Abou Simbel, entre autres. L’un des derniers dossiers, « Les mystères des pyramides », comprend également des références à des bandes dessinées dont l’Égypte est le thème (Astérix, Tintin, et Blake et Mortimer), le transport des obélisques égyptiens vers l’Europe, l’inauguration du canal de Suez, le traitement radical que la momie de Ramsès II attaqué par des fungi, les tentatives renouvelées (et, à ce jour, toujours peu concluantes) de « découvrir » le « secret » de la Grande Pyramide, les principales œuvres d’art de la collection égyptienne du musée du Louvre, et cetera.
L’ouvrage se termine par les grandes divisions chronologiques de l’histoire de l’Égypte, avec une « table des illustrations » et un index.
Différences entre les éditions
Trois éditions sont parues jusqu’en 2007, les rééditions subissent une cure d’amaigrissement, de deux cent vingt quatre pages en 1986 à cent soixante pages en 2007, en raison d’une reformulation introduite dans les « témoignages et documents ». Si les couvertures sont légèrement différentes uniquement en ce qui concerne la couleur et la typographie du titre, la différence entre les dos et les quatrièmes de couverture est évidente, et aussi quelques mises en page (en particulier l’habillage d’illustration et la typographie). Les dépliants sont également supprimés dans l’édition parue en 2007.
Témoignages et documents (p. 129–213) et Annexes (p. 214–222)
Première édition
Réédition de 1998
Réédition de 2007
1. La campagne d’Égypte (p. 130–137)
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2. La Description de l’Égypte (p. 138–141)
1. « La Description de l’Égypte » (p. 130–133)
1. « La Description de l’Égypte » (p. 130–131)
3. Le style « retour d’Égypte » (p. 142–143)
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4. Le long voyage des obélisques (p. 144–149)
2. L’obélisque de Louqsor (p. 134–137)
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5. L’inauguration du Canal de Suez (p. 150–151)
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6. Le voyage en Orient (p. 152–157)
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2. Le voyage en Orient (p. 132–135)
7. Des Américains à l’assaut des pyramides (p. 158–159)
Les grandes divisions chronologiques de l’histoire de l’Égypte (p. 214–216)
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Table des illustrations (p. 217–220)
Table des illustrations (p. 170–173)
Table des illustrations (p. 154–157)
Index (p. 221–222)
Index (p. 173–175)
Index (p. 157–159)
Remerciements/Crédits photographiques (p. 223)
Crédits photographiques (p. 175)
Crédits photographiques (p. 159)
Table des matières (p. 224)
Table des matières (p. 176)
Sommaire (p. 10)
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Bibliographie (p. 168–169)
Bibliographie (p. 153–154)
Accueil
Le site Babelio confère au livre une moyenne de 3,58/5 basée sur 25 notes[13]. Sur le site Goodreads, le livre obtient une note moyenne de 3,81 sur 5, sur la base de 123 notes, indiquant des avis généralement positifs[14].
Dans sa critique du livre pour la revue scientifique Cadmo (no 3) de l’Institut oriental de l’université de Lisbonne, l’égyptologue portugais Luís Manuel de Araújo(pt) écrit : « De la part de l’éminent et expérimenté Jean Vercoutter, on ne s’attendrait à rien d’autre : un ouvrage bien conçu et le mieux réalisé, avec un excellent texte et une richesse de belles illustrations, mis à la disposition d’un vaste public désireux de connaître le legs de la civilisation pharaonique et, de plus (car un voyage en Égypte ne sera pas accessible à tous), désireux de parcourir mentalement la vallée du Nil où une telle civilisation a porté ses fruits. […] Ce beau volume des éditions Gallimard est apprécié pour l’excellente sélection d’images qui accompagne abondamment le texte : certaines des illustrations appartiennent à des ouvrages classiques du début de l’égyptologie, comme la Description de l’Égypte, les Denkmäler aus Aegypten und Aethiopien de Lepsius, Egypt and Nubia de David Roberts, entre autres. La bonne impression que laisse l’ouvrage n’est pas obscurcie par l’apparition de minuscules anomalies, comme c’est le cas de l’allusion, dans une légende, au pharaon Séthi Ier lorsque le monarque représenté sur l’image est Ramsès II, comme on peut le conclure par les noms encadrés (p. 92) ; la référence au nom divin de Khourou au lieu de Khonsou lors de la mention du temple de cette divinité lunaire à Karnak (p. 210); le nom d’Horus Kaa, de la Ire dynastie, réduit à Ka (p. 214) et le nom du pharaon Amenemhat, de la XIIe dynastie, mal orthographié Amenhemat (p. 214) naturellement en raison de l’échec des services de révision. Il est plus désagréable de rencontrer, en évoquant l’archéologie égyptienne, l’absence inexplicable du célèbre égyptologue anglais Flinders Petrie, qui est venu introduire de nouvelles méthodes de prospection et d’enregistrement des découvertes dans la recherche archéologique et qui rencontre ses contemporains Maspero, Erman et Reisner (également omis)[4]. »
Dans la revue scientifique História: Questões & Debates de l’université fédérale du Paraná, Johnni Langer écrit dans sa critique Os mistérios do Egito antigo : « Le récent lancement Em busca do Egito esquecido (l’édition brésilienne d’À la recherche de l’Égypte oubliée) est un fait à célébrer. Tant pour le savoir prodigieux de l’auteur Jean Vercoutter que pour la qualité graphique de l’ouvrage, qui faisait à l’origine partie de la collection d’archéologie du Gallimard. Le récit accessible du texte nous conduit d’abord à la fin du paganisme occidental, au IVe siècle après Jésus-Christ, lorsque la connaissance des hiéroglyphes a été perdue. […] Bien plus que le contenu textuel, la plus grande importance du livre en question est sa structure iconographique, véritable délice d’œuvres extrêmement importantes pour l’historien intéressé à approfondir l’imagerie de l’archéologie. C’est à travers les images que l’on peut voir la vraie force, le vrai potentiel symbolique de l’Égypte pour les Européens. Aucune civilisation n’a réussi à réunir autant de sensations, de telles différences dans les perceptions visuelles et le contenu symbolique de la culture matérielle. […] L’une des seules faiblesses du livre était qu’il comprenait peu d’images de l’Écossais David Roberts, le plus important peintre de thèmes archéologiques du XIXe siècle. Vercoutter n’a sélectionné que quatre tableaux, qui ne parviennent pas à présenter au lecteur la grandeur de l’œuvre de l’Écossais. Peut-être à cause de la renommée de ce voyageur-artiste, avec ses peintures sur de nombreux sites web et dans plusieurs ouvrages de vulgarisation en France. Dans tous les cas, le livre de Vercoutter contient également du matériel qui n’est pas largement diffusé, comme les merveilleuses aquarelles de Nestor L’Hôte, qui a accompagné Champollion dans son voyage en Égypte. Le Philæ, 1845, peu connu, actuellement conservé au Musée du Louvre, est doublement important : il nous donne l’impression de représenter le camp d’expédition, en plus de représenter dans des tons forts et vibrants les couleurs originelles du célèbre temple d’Isis[15] ».
L’égyptologue russe Victor Solkin(en) écrit dans sa critique : « Le livre est laconique, rempli de faits intéressants et d’illustrations merveilleuses, parfois d’images très rares. [...] En général, nous avons devant nous un guide miniature de l’histoire de l’archéologie égyptienne, qui présentera tout le panorama de l’interaction culturelle entre le pays des pyramides et l’Europe au lecteur qui ne connaît pas l’Égypte[12]. »
Éditions internationales
Le livret a également connu un succès international, grâce à des traductions en plus de vingt langues.
↑Cette section est une traduction adaptée de la critique [Recensão a] Vercoutter, Jean - À la Recherche de l’Égypte Oubliée par Luís Manuel de Araújo[4].
↑Jean Vercoutter, À la recherche de l’Égypte oubliée, Paris, Éditions Gallimard, coll. « Découvertes Gallimard / Archéologie » (no 1), , 224 p. (ISBN978-2-07-053028-1), « texte sur la quatrième de couverture ».