Élie et son jeune frère Daniel grandissent à Montmartre, dans un monde d'intellectuels et d'artistes, et dans la religion protestante de leur mère, selon la règle de la famille.
L'année de l'agrégation, il réfléchit en particulier sur Platon, ce qui aboutira en 1896 à la publication d'un ouvrage sur la théorie platonicienne du savoir. Il fonde avec Xavier Léon la Revue de métaphysique et de morale qui commence à paraître en 1893.
En 1892, Halévy est recruté par Émile Boutmy pour enseigner l'histoire des idées politiques à l'École libre des sciences politiques. Il dispense ainsi un cours appelé « L'évolution des idées politiques dans l'Angleterre au XIXe siècle ». En 1898[3] ou en 1900, un second cours lui fut confié sur le développement du socialisme[4]. Il fait partie de la première vague des philosophes de Sciences Po, aux côtés notamment de Lucien Lévy-Bruhl[5].
Lorsque Boutmy doit cesser de dispenser son cours sur l'Angleterre, il demande à Halévy de lui succéder[6]. Les cours qu'Halévy dispense à Sciences Po sur l'Angleterre ont donné naissance à ses deux principaux ouvrages : La Formation du radicalisme philosophique (1901-1904) et l'Histoire du peuple anglais au XIXe siècle (1912-1932), en cinq volumes. Ces volumes sont traduits en anglais et connaissent un grand succès outre-Manche[3].
Pendant la Première Guerre mondiale, trop vieux déjà pour être mobilisable, il s'est porté volontaire comme infirmier, et on l'a affecté à Chambéry où il vit « dans le cléricalisme d'ambulance » (lettre du ). Sa correspondance avec Alain et avec Xavier Léon, où il se révèle un observateur aigu et souvent prophétique, a été partiellement publiée (Paris, Gallimard, 1957).
Influence
Élie Halévy fut à la fois préoccupé par les idées sociales et proche du libéralisme. Sur ce point son rôle est à rapprocher à celui de Graham Wallas dont après la guerre de 1914, il fut l'ami[7]. Si Graham Wallas a contribué à éloigner Walter Lippmann du socialisme, Élie Halévy a joué un rôle similaire dans l’évolution de Raymond Aron[8].
Tout comme Graham Wallas, il était en faveur du libre échange. Raymond Aron note dans ses mémoires qu'il lui aurait confié que « seul le libre-échangiste a le droit de se dire pacifique[9] ». Après la guerre de 1914, il lui fut proposé un poste à la Société des Nations[10] qu'il a refusé afin de se consacrer à la fin de son histoire de l'Angleterre au XIXe siècle. Il donna des conférences au Royal Institute of International Affairs, un think tank britannique spécialisé dans les relations internationales.
Œuvres complètes (préf. Nicolas Baverez, introduction de Vincent Duclert, texte établi par Vincent Duclert et Marie Scot), t. II : L'Ère des tyrannies : études sur le Socialisme et la Guerre, Paris, Les Belles Lettres, (EAN9782251445533, présentation en ligne)
Œuvres complètes (préf. Marc Lazar, texte établi, introduction et notes par Marie Scot), t. III : Histoire du socialisme européen, Paris, Les Belles Lettres, (EAN9782251446134, présentation en ligne)
Œuvres complètes (introduction et édition critique in extenso par Vincent Duclert), t. IV : Le Moment Platon. Élie Halévy philosophe I, Paris, Les Belles Lettres, (EAN9782251453231, présentation en ligne)
Œuvres complètes (préf. Christophe Charle, textes choisis, présentés, édités et annotés par Marie Scot), t. V : Études anglaises, Paris, Les Belles Lettres, (EAN9782251448831, présentation en ligne)
↑Cristopher Bone, « Élie Halévy: Historian as Philosopher », The Journal of British Studies, vol. 13, no 1 (Nov., 1973), p. 151-168. accès JSTOR[1]
↑ a et bGérard Vincent et Anne-Marie Dethomas, Sciences po: Histoire d'une réussite, Plon (réédition numérique FeniXX), (ISBN978-2-259-26077-0, lire en ligne)
↑André Siegfried, nécrologie : Élie Halévy, Revue d'économie politique, mars avril 1938, p. 431
↑Marie Scot, Sciences Po, le roman vrai, Sciences Po, les presses, (ISBN978-2-7246-3915-5)
↑André Siegfried, nécrologie : Élie Halévy, Revue d'économie politique, mars avril 1938, p. 432
↑Célestin Bouglé a des mots durs envers un des principaux dirigeants fabiens : « et Sidney Webb, écrit-il, a le doit de rire, d’un rire méphistophélique, ce même Sidney Webb dont Élie Halévy, dès son arrivée en Angleterre, a senti les sympathies pour la conception hégélienne de l’État et les méthodes prussiennes de la bureaucratie organisatrice »
(en) Myrna Chase, Élie Halévy : an Intellectual Biography, Columbia University Press, 1980.
(en) Philip Daileader, « Elie Halévy (1870-1937) », dans Philip Daileader et Philip Whalen (dir.), French Historians, 1900-2000 : New Historical Writing in Twentieth-Century France, Chichester / Malden (Massachusetts), Wiley-Blackwell, , XXX-610 p. (ISBN978-1-4051-9867-7, présentation en ligne), p. 328-343.
(en + fr) Francisco Vergara, « A critique of Élie Halévy », Philosophy (Journal of the Royal Institute of Philosophy), Londres, , English, français.