Élu roi des Romains en 1440 et couronné empereur en 1452[1], il est l'avant-dernier empereur couronné par le pape, le dernier pour qui cette cérémonie a lieu à Rome.
La mort de Charles le Téméraire (janvier 1477) permet au fils de Frédéric, Maximilien, d'épouser sa fille, Marie de Bourgogne (août 1477) et de prendre la tête de l'État bourguignon attaqué par le roi de France Louis XI. Avec la mort sans héritier de Matthias Corvin (1490), il ne reste donc plus que la question suisse[2] à régler en ce qui concerne l'Empire (en revanche, la question turque est loin de l'être).
La prise en charge de l'État bourguignon (comté de Bourgogne[3] et fiefs des Pays-Bas bourguignons, principalement) par les Habsbourg (Maximilien, puis son fils Philippe le Beau) est la première étape de leur avènement comme première maison princière d'Europe (la deuxième est l'accession du fils de Philippe, Charles, aux trônes de Castille et d'Aragon[4] en 1516, avant qu'il soit élu empereur en 1520).
C'est à Frédéric III qu'on doit la devise de la maison de Habsbourg, résumée par le monogrammeA.E.I.O.U., qui signifie, en latin « Austriae est imperare orbi universo » et en allemand « Alles Erdreich ist Oesterreich untertan », c'est-à-dire : « Il appartient à l'Autriche de gouverner le monde »)[5].
En 1451, en tant que tuteur du prince Ladislas de Bohême et de Hongrie, héritier de la branche albertine, il confie au chef hussiteGeorges Poděbrady l'administration du royaume de Bohême, décision entérinée par la diète réunie cette même année et qui lui confie l'intendance du royaume. En 1453, sur proposition de Frédéric III, la diète de Bohême élit Ladislas roi de Bohême, mais comme le nouveau souverain n'a que treize ans, Georges de Poděbrady, malgré ses sympathies hussites, peut poursuivre son administration, cette fois en tant que régent.
L'opposition entre les Tchèques hussites et les catholiques proches du Saint-Empire demeure, mais Georges de Poděbrady se révèle homme de compromis. La mort prématurée du jeune roi Ladislas donne lieu à des rumeurs d'empoisonnement dont les hussites seraient à l'origine. Contesté en Hongrie, Georges de Poděbrady doit libérer le jeune Matthias Huniady, mais le , la diète des États de Bohême l’élit à l'unanimité roi de Bohême. C'est ainsi que les Habsbourg commencent à perdre pied dans les provinces orientales du Saint-Empire.
Une faction influente de nobles hongrois, menée par le comte palatinLászló Garai et par le voïvode de Transylvanie, Miklós Újlaki(en), dénonce l'élection et va trouver Frédéric de Habsbourg pour lui proposer la couronne de Hongrie. Les cérémonies de ce contre-couronnement ont lieu le à Wiener Neustadt, et Frédéric marche sur la Hongrie. Matthias repousse toutefois les armées du Habsbourg, et s'assure l'appui du pape Pie II en lui promettant de monter une croisade contre les Ottomans qui ne verra jamais le jour[7]. Réconcilié avec son beau-père Georges Poděbrady, Matthias Corvin peut se consacrer entièrement à l'affrontement avec le prince autrichien. Menacé par les Ottomans, Frédéric consent en avril 1462 à traiter avec Matthias Corvin, qui de son côté doit faire face à une nouvelle révolte des barons menés cette fois par Victorinus (fils de George Poděbrady). Moyennant des subsides de 60 000 ducats, Frédéric de Habsbourg est reconnu comme roi de Germanie et obtient la souveraineté sur quelques comtés de Hongrie ; Matthias, lui, est reconnu par Frédéric en tant que roi de Hongrie.
En 1465, le pape Paul IIexcommunie le roi hussiteGeorge Poděbrady, faisant aux princes voisins un devoir sacré de le déposer. C'est donc de plein droit que le , Matthias Corvin envahit la Bohême mais, anticipant une alliance contre lui entre le roi Georges et Frédéric III, il conclut prudemment la paix le . Le 3 mai, les catholiques du pays élisent même Matthias roi de Bohême, et cette situation contrecarre les vues du pape et de l'empereur Frédéric III, qui préféreraient une partition du royaume. George Poděbrady devance les projets de tous ses ennemis en déshéritant de lui-même son propre fils en faveur de Ladislas, le fils aîné du roi Casimir IV de Pologne, s'assurant astucieusement l'appui de la Pologne.
Conflits avec les cantons suisses confédérés
Au XVe siècle, la maison princière des Habsbourg, à la suite d'une série de défaites contre des villes confédérées, perd presque toutes ses possessions du plateau suisse jusqu'à la vallée de la Fricktal avec la Thurgovie. En 1460, en effet, le pape Pie IIexcommunieSigismond de Habsbourg, duc d'Autriche ; plusieurs villes confédérées se liguent avec des villes d'empire d'outre-Rhin comme Rottweil, Mulhouse, Buchhorn et Wangen, à l'exception de Berne, et en profitent pour s'emparer de la Thurgovie, à l'est de Zurich[8]. Dès le , date de la signature de la paix avec l'Autriche qui confirme la possession des pays conquis, ceux-ci sont transformés en bailliages communs[9]. Si la victoire de Waldshut en 1468 permet aux Confédérés d'étendre leur zone d'influence en Haute-Alsace (ancien comté de Sundgau), leur hégémonie régionale ne s'impose vraiment qu’avec les guerres de Bourgogne et la chute de Charles le Téméraire. Même le régent du Tyrol et d'Autriche antérieure, le duc Sigismond d'Autriche, doit reconnaître les possessions des Confédérés par l’Édit perpétuel de 1474. Seul le chef de la maison de Habsbourg, l'empereur Frédéric III, leur reste inexorablement opposé, mais à ce moment il ne règne plus que sur les duchés d'Autriche, de Styrie et de Carinthie. Malgré cela, la Confédération demeurait sous la menace de tentatives de reconquête autrichienne en Argovie et Thurgovie.
Les offensives de Matthias Corvin et de Charles le Téméraire (années 1470)
La mort soudaine de Poděbrady en mars 1471 entraîne de sérieuses complications. Si une révolte des barons de Hongrie en 1470-1471 empêche Matthias Corvin de faire immédiatement main basse sur la Bohême, en 1474 il se remet en marche contre les armées du Saint-Empire.
De son côté, Frédéric III doit faire face à une offensive de Charles le Téméraire en Rhénanie à la fin de 1474. Ce dernier, parti de Gueldre, doit recevoir l'appui d'un corps expéditionnaire anglais fort de 14 000 fantassins et de 1 500 chevaliers, mais qui ne débarquera aux Pays-Bas bourguignons qu'à la fin de 1475[10]. D'ailleurs, des pourparlers avec Louis XI ralentissent l'assaut et, au bout de sept mois, l'empereur parvient à regrouper une armée de secours[11]. Louis XI, au lieu d'honorer sa promesse d'envoyer une armée de 20 000 hommes en Rhénanie, contre-attaque plutôt en Picardie et en Artois, s'emparant des villes de Montdidier, Roye et Corbie (1475)[12]. Simultanément, il exhorte le duc Sigismond, la ville de Strasbourg et les cantons suisses à faire la paix entre eux ; le duc Sigismond, avec l'aide des Suisses, reprend par la force le comté de Ferrette, en Alsace, qu'il avait mis en gage à Charles le Téméraire[11]. Au bout d'un an de siège infructueux (1475), le duc de Bourgogne doit lever le siège de Neuss pour faire face aux Français en Picardie[13]. En récompense, Frédéric III accorde aux bourgeois de Neuss le droit de monnayage.
En 1477, Frédéric III, lâché par le duc de Bavière, finit par perdre tous ses fiefs de Hongrie, et est contraint de courir le pays en demandant l'hospitalité aux monastères qu'il trouve sur sa route[14]. Il n'a plus d'autre choix que de concéder à Matthias Corvin un armistice sans conditions. Au terme des derniers pourparlers, l'empereur doit verser une indemnité de guerre énorme, reconnaître définitivement son adversaire comme roi légitime de Hongrie à condition que la couronne revienne aux Habsbourg s'il n'a pas de descendant mâle (ce qui paraît fort peu probable à l'époque, Matthias ayant épousé sa troisième femme Béatrice le ).
L'oubli de ces promesses par l'empereur pousse Matthias Corvin à lui déclarer pour la troisième fois la guerre en 1481. Le roi de Hongrie s'empare bientôt de toutes les forteresses du domaine héréditaire d'Autriche. Finalement, le , à la tête de 8 000 soldats expérimentés, il entre en triomphe dans Vienne, qui devient désormais sa capitale. Puis la Styrie, la Carinthie et la Carniole tombent l'une après l'autre ; Trieste n'est sauvée que par l'intervention d'un corps expéditionnaire vénitien.
Divisions croissantes dans le Saint-Empire (années 1480)
Dans ces circonstances dramatiques, Frédéric III fait placer Sigismond sous tutelle et expulse tous les nobles apparentés aux Wittelsbach de leurs terres. La montée en puissance inexorable des ducs de Bavière préoccupe désormais non seulement l'empereur, mais également les seigneurs de Souabe et des États de Straubing, ainsi que la bourgeoisie des villes d'Empire : pour contrer les Wittelsbach, les villes d'empire d'Allemagne méridionale, la confrérie des chevaliers de Saint-George, le comte de Wurtemberg, les États de Sigismond, l'Autriche antérieure et le Tyrol s'unissent à leur tour à l'instigation des Habsbourg en 1488 en une ligue de Souabe. En outre, l’empereur Frédéric III frappe de mise au banAlbert IV et la ville de Ratisbonne. Pour assurer sa succession et capter l'héritage de Bourgogne, il se résout à faire élire en 1486 son fils Maximilien Ierroi de Germanie.
Les cantons confédérés déclinent l'invitation qui leur est faite de se joindre à cette union sacrée : il y a ainsi désormais trois grandes puissances militaires en Allemagne, la ligue de Souabe, les confédérés et le duché de Bavière. Pourtant, Albert IV, pressé de tous côtés, se décidera finalement à restituer tous ses héritages et la paix sera signée à Augsbourg (1492).
Mort et funérailles
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La puissance croissante de son gendre bavarois finit par le préoccuper, de sorte qu'il le frappa finalement d'interdit pour l'amener à négocier. Il laissa à son fils Maximilien une situation difficile à régler en Bavière.
Frédéric III est l'arrière-grand-père de l'empereur Charles Quint.
↑De fait, il est à la tête de l'empire dès qu'il est élu roi des Romains, sauf si l'élection a lieu du vivant d'un empereur, comme ce sera le cas de son fils Maximilien, élu roi des Romains en 1486.
↑En 1499, les cantons suisses confédérés obtiennent la fin de leur sujétion aux Habsbourg et de leur appartenance à l'Empire.
↑Le (ou la) comté de Bourgogne (fief impérial) correspond à la future province française de Franche-Comté, sans Besançon, ville libre d'Empire. Le duché de Bourgogne (fief français) (capitale : Dijon) a été repris par Louis XI en 1482 (traité d'Arras). Les Habsbourg arborent tout de même le titre de « duc de Bourgogne ».
↑Accession qui n'était pas prévisible au moment du mariage de Philippe le Beau avec Jeanne de Castille en 1496. Il a fallu trois décès pour que Jeanne devienne héritière présomptive en 1500.
↑(de) Konstantin Moritz Langmaier, Kaiser Friedrich III. (1415–1493): des Reiches Erzschlafmütze? Der „schlafende Kaiser“ als Klischee, Zeitschrift des historischen Vereins für Steiermark 111 (2021), p. 129-188
↑(en) Giovanni Battista Tomassini, The Italian Tradition of Equestrian Art, Franktown, Virginia, USA, Xenophon Press, , 288 p. (ISBN9780933316386)
↑(de) Wilhelm Baum et Bautz, Traugott (dir.), Biographisch-Bibliographisches Kirchenlexikon (BBKL), vol. 24, Nordhausen, (ISBN3-88309-247-9), « Friedrich III. von Habsburg, römisch-deutscher Kaiser (1440–1493) », cols. 635–648..
Voir aussi
Bibliographie
Philippe de Commynes, Mémoires, vol. IV, Paris, Imprimerie nationale, coll. « Acteurs de l'histoire », , 490 p. (ISBN978-2-11-081344-2 et 2-11-081344-X), « Chap. I - Comment le Duc de Bourgongne, s'estant saisy du duché de Gueldre… »
Les générations sont numérotées dans l'ordre de la descendance masculine depuis les premiers archiducs. Au sein de chaque génération, l'ordre suit celui de l'aînesse.