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Jules de Rovère

Jules de Rovère, né Jules Rovère à Paris le [1],[2] et probablement mort après , est un prestidigitateur[Note 1] français actif entre 1819 et 1858, qui a inventé le mot « prestidigitateur » et a influencé Robert-Houdin par l'emploi d'automates.

Biographie

Jeton publicitaire (avers et revers) pour son spectacle : Phénoménologie de Jules de Rovère / Merveilles récréatives (vers 1849-1850, laiton)

Jules est le fils unique du conventionnel Rovère de Fontvielle, mort en Guyane le après y avoir été déporté pour ses positions royalistes durant le coup d'État du 18 fructidor. Sa mère, née Marie-Augustine Angélique de Belmont (1762-1818), avait déjà eu deux filles d'un précédent mariage avec François-Édouard, marquis d’Agoult ; elle éduque seule son fils, servie par une importante fortune constituée de biens immobiliers[3]. Elle l'encourage à s'intéresser aux exercices d'agilité. Au décès de sa mère puis de son oncle, émancipé bien plus tôt que la loi ne le permettait alors, Jules, après une obscure affaire d'héritage et de gestion de fortune, se laisse impressionner par les nombreux artistes illusionnistes, et donne bientôt des représentations à Lyon[4], Anvers et Gand en faisant des tours d'agilité, faisant apparaître et disparaître des objets, distrayant les spectateurs d'illusions. Il use d'un langage très recherché, composé de mots savants, et fait appel à des techniques nouvelles[5].

Vers 1819, il crée le mot prestidigitateur — composé à partir du latin presto digiti signifiant « agilité des doigts » —, parce qu'il ne voulait pas utiliser celui de physicien ni celui d'escamoteur, devenu péjoratif. Les magiciens de l'époque aimaient faire figurer des formules faisant penser à de grands titres prestigieux sur leurs affiches, n'ignorant point que le côté mystérieux de ces qualifications encourageait les spectateurs à payer, ces derniers croyant avoir affaire à un grand personnage et donc à un spectacle de qualité. Jules de Rovère désirait ainsi innover afin de se rendre unique[6].

En 1820, il épouse à Marseille Louise[Note 2] Françoise Cramer, fille d'un horloger[2],[Note 3]. Le couple a plusieurs enfants, nés au gré de ses déplacements : Félix Paulin en 1821 à Maastricht[7],[Note 4] ; Jules en 1822 à La Guillotière, aujourd'hui quartier de Lyon[8],[Note 5] ; Félicité en 1824 à Senones[9],[Note 6] ; Jules André en 1828 à Quimperlé[10],[Note 7] ; Julie Éloïse vers 1836[Note 8].

En 1828, Jules de Rovère donne plusieurs représentations d'escamoteur (en anglais : conjurer) à Londres. Après son passage sur la scène de l'Argyll Rooms[11],[12], il se produit à partir du au Haymarket Theatre, assisté de sa femme[13], puis poursuit avec une tournée dans la province anglaise[14],[15]. Durant ses spectacles — qui mélangent magie, danse, tableaux vivants[16] — il a recours à des automates. Après une soirée à Oxford, le journal local, The Herald, décrit ainsi un tour de Rovère en ces mots : « Au moment où sur la scène un des clowns disparaît d'une boîte, une fillette, haute de 30 centimètres, surgît à l'autre bout de la salle, au milieu d'une mini-buvette, proposant au public des boissons et sans être apparemment aidée par l'artiste. »[17]

Vers la fin des années 1830, Rovère s'installe à Paris : c'est là que Robert-Houdin le rencontre, dans la boutique du Père Poujol, où venait se fournir la plupart des artistes du genre, et c'est dans ses mémoires (1868) qu'il rapporte que le mot prestidigitateur fut inventé par Rovère et adopté ensuite par la profession, puis approuvé par l'Académie[6].

En 1849, il publie un essai intitulé Correspondance sincère. Phénoménologie humaine avec certificats à l'appui soutenant qu'il a réussi à guérir des personnes grâce à son « fluide » : dès 1846, le baron du Potet l'avait défendu dans son Journal du magnétisme. Entre 1851 et 1855, il prend part à une polémique entre les magnétiseurs — ou les adeptes du mesmérisme — qui prétendent guérir les malades ou ceux qui, au contraire, condamnent cette pratique, et finit par publier à Paris un essai, Fiction ou réalité, nouvel examen théorique et pratique des erreurs du magnétisme. En 1856, il donne plusieurs spectacles d'« électromagnétisme animal et minéral » : vision à distance ou à travers des corps opaques, prédictions, plongée de spectateur en état de somnolence, etc. Il affirme qu'il n'existe aucun fluide mais une forme d'influence du magnétiseur sur le sujet et ce, grâce à l'électricité de l'air ambiant et il conclut que c'est le magnétisé qui, en fin de compte, se guérit lui-même.

Durant cette affaire, il exerce sous un autre nom, celui d'« Auguste le magnétiseur ». Affichant des opinions socialiste-démocrate, il effectue un séjour en prison[3].

On perd sa trace après le 24 avril 1864 : ce jour-là, Jules serait venu à Sorgues donner une conférence sur les ballons : il appartenait en effet à la Société aérostatique et météorologique de France[3].

Le , paraît dans le quotidien gallois The Monmouthshire Merlin un avis annonçant une lecture, intitulée Fiction and Reality[Note 9], qu'un certain Jules Rovère[Note 10] doit donner, en anglais, le surlendemain à la mairie de Newport[18]. L'encart précise qu'il vit désormais dans cette ville.

Publications

  • Correspondance sincère et impartiale. no 309. Phénoménologie humaine, Paris, Besnard, 1849, in-4°[19]
  • Association fraternelle des patriotes démocrates... : séance publique du dimanche 14 mai 1848, Ville de Troyes, Troyes : impr. de Baudot, DL 1849, in-4°, 4 p.[2]
  • Institut polytechnique. Sciences naturelles. Nouvel enseignement des notions anti-mystiques de magnétisme minéral et animal, Paris : lith. de Bénard, 1850, in-fol. plano
  • Phénoménologie humaine. Correspondance sincère et impartiale. no 309. Lettre et attestations relatives aux guérisons opérées par J. Rovère au moyen du magnétisme [Lettre de J. Rovère. - Réponses de Néhou et de Macsheehy], [Paris], DL 1852, in-4°, 4 p.
  • Pérégrinations rovériennes. Nouvelles recherches physiologiques et psychologiques sur l'influence animique de l'homme dans les profondeurs de l'atmosphère, [Signé : Jules Rovère. 25 juillet 1852.] 1er cahier, [Paris]: impr. de Bénard, 1852, in-8o
  • Initiation aux mystères de la sympathologie animique, ou Nouveau cours expérimental, analytique et synthétique de mesmérisme, généralement connu sous le nom de magnétisme animal... Dunkerque : impr. de C. Drouillard, 1853, Gr. in-8o, 56 p.
  • Fiction et réalité. De l'Influence modificatrice et conservatrice que l'homme peut exercer sur lui-même et sur ses semblables... Paris : l'auteur, 1854, in-4°
  • Fiction et réalité ou nouvel examen théorique et pratique des vérités et erreurs du magnétisme, Paris, 1855 [3]
  • Lettre d'un mesmériseur socialiste aux amis de la vérité, Troyes : Lépine, 1856, in-12, 10 p.
  • Les magnétiseurs ont-ils tort ou raison ? ("That is the question!"). Appréciation et solution, en deux parties, Paris : impr. Bénard & Cie, 1857, in-8o, 31 p.[20]
  • Mélanges littéraires, Paris : impr. de E. Blot, 1860, in-8o, 8 p.[21]
  • Roveriana, Rouen, impr. de Giroux et Renaux, 1862, in-4° , 8 p.
  • Premier Tableau synoptique de l'alphabet de la nature. Triade phénoménologique.., Troyes : impr. de Lépine, Laffrat, [s.d.], Gr. in-fol. plano
  • Second [-Troisième] Tableau explicatif de l'alphabet de la nature. Athénée troyen..., Troyes : impr. de Lépine, Laffrat, [s.d.], Gr. in-fol. plano

Notes et références

Notes

  1. On employait alors le terme physicien.
  2. Parfois Éloïse, dans les actes de naissance de ses enfants.
  3. Devenue sujet britannique par naturalisation, elles est recensée sous le nom d'Héloïse de Rovère à Abergavenny en 1871, puis en 1881, l'année de sa mort : elle vit alors chez sa plus jeune fille Julie et son gendre (Recensements du pays de Galles en 1871 et 1881 ; Index des décès enregistrés dans les registres de l’état civil, Angleterre et Pays de Galles, 1837 à 1915 - Ancestry.com).
  4. Installé à Lampeter, au pays de Galles, il y meurt en 1855 (enterrement du 30 mars 1855, Archives Wales; Wales; Cardiganshire Baptisms, Marriages and Burials, page 5 - Ancestry.com)
  5. Il meurt six mois plus tard à Millery où il était placé en nourrice (acte de décès établi au nom de Jules Rovert, 16 décembre 1822, Millery, Archives du département du Rhône et de la métropole de Lyon).
  6. Elle meurt un an plus tard dans la Meuse où elle était placée en nourrice (acte de décès, 8 novembre 1825, Gironville, Archives départementales de la Meuse)
  7. Installé au pays de Galles comme son frère aîné et professeur de français, il meurt le 9 janvier 1874 à Funchal, sur l'île de Madère (cf. photographie de sa tombe [1]). Son testament est établi à Goytre, dans le Monmouthshire, le 4 mars suivant (Calendrier national des successions (Index des testaments et administrations), Angleterre et Pays de Galles, 1858 à 1995 - Ancestry.com).
  8. Elle figure en 1881 dans le recensement d'Abergavenny sous le nom de Julia (Héloïse) de Rovère : il est indiqué qu'elle a 39 ans et est née à Llanover. Elle vit alors avec sa mère et son mari Stephen Clarke, qu'elle a épousé au second trimestre 1876 dans la même ville (Recensement du pays de Galles en 1881 ; Index des mariages, Angleterre et Pays de Galles, 1837 à 1915 - Ancestry.com)
  9. Comme son essai de 1854.
  10. Il pourrait aussi s'agir de son fils Jules André Rovère qui, comme l'aîné Félix Paulin, s'est installé au pays de Galles.

Références

  1. Archives de Paris Acte de naissance reconstitué du 22 brumaire an VI, vue 14 / 51
  2. a et b Acte de mariage no 64, 3 février 1820, Marseille, Archives départementales des Bouches-du-Rhône
  3. a b et c « L’émancipation et la formation du Conseil de Famille de Jules Rovère, fils du conventionnel, à Sorgues en 1814 » par Alain Maureau, sur etudessorguaises.fr, en ligne.
  4. Le Journal de Lyon, no 145, 21 mai 1819, p. 2.
  5. Le Constitutionnel d'Anvers, dans Le Véridique de Gand : journal politique, littéraire et commercial, no 319, 11 septembre 1819, p. 2 — en ligne
  6. a et b Jean-Eugène Robert-Houdin, Confidences et révélations : comment on devient sorcier, Blois, Lecesne, p. 33, 151-152 — lire sur Gallica.
  7. Regionaal Historisch Centrum Limburg, « Acte de naissance n. 18, 3 janvier 1821, Maastricht », sur www.wiewaswie.nl (consulté le )
  8. Acte de naissance no 195, 31 mai 1822, La Guillotière, Rhône, Archives municipales de Lyon
  9. Acte de naissance no 171, 23 octobre 1824, Senones, Vosges, Archives départementales des Vosges
  10. Acte de naissance no 16, 30 janvier 1828, Quimperlé, Finistère, Archives départementales du Finistère
  11. (en) « Argyll Rooms », sur Newspapers.com, The Examiner, (consulté le ), p. 8
  12. (en) « Argyll Rooms. Positively the last week », sur Newspapers.com, The Morning Chronicle, (consulté le ), p. 4
  13. (en) « Haymarket Theatre », sur Newspapers.com, The Standard, (consulté le ), p. 3
  14. (en) « Royal Amphitheatre, Liverpool », sur Newspapers.com, Liverpool Mercury, (consulté le ), p. 1
  15. (en) « Oxford, Saturday, March 20 », sur Newspapers.com, Oxford Journal, (consulté le ), p. 3
  16. (en) « Royal Amphitheatre, Liverpool », sur Newspapers.com, Liverpool Mercury, (consulté le ), p. 1
  17. (en) Harry Houdini, The Unmasking of Robert-Houdin, New York, The Publishers Printing Co., 1908, réédition Library of Alexandria, 2016 — extrait en ligne.
  18. (en) « Notices. Under the International Patronage of the Scientific, Artistic, and Industrial Union between England and France, JULES ROVERE... », sur newspapers.library.wales, The Monmouthshire Merlin, (consulté le ), p. 4
  19. Albert Louis Caillet, Manuel bibliographique des sciences psychiques ou occultes, Cambridge University Press, (ISBN 978-1-108-05257-3, lire en ligne)
  20. Journal général de l'imprimerie et de la librairie, Paris, Cercle de l'imprimerie, de la librairie et de la papeterie, (lire en ligne), p. 508
  21. Journal général de l'imprimerie et de la librairie, Paris, Cercle de l'imprimerie, de la librairie et de la papeterie, (lire en ligne), p. 117

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