Louis-Jean-Népomucène Lemercier, né le à Paris où il est mort le , est un poète et dramaturge français.
Biographie
Népomucène Lemercier, dont le père était secrétaire des commandements après avoir été intendant du comte de Toulouse et du duc de Penthièvre, eut pour marraine la princesse de Lamballe. Un accident survenu dans l'enfance le laisse en partie paralysé durant le restant de ses jours. « Au sortir de l'enfance, écrit Jean-François Ducis, pour guérir son jeune corps dont la moitié avait été frappée de paralysie, il a passé par toutes les tortures, et il a monté de supplice en supplice dans la sphère supérieure qu'il habite. Il tient dans sa main les rênes de ce corps, il en conduit avec sagesse et fermeté la partie vivante et la partie morte. Dans la partie vivante existe son âme, avec des redoublements d'esprit, une étendue de vues, une audace de conception, qui en font pour moi un phénomène charmant, tandis que la partie morte en fait pour moi un martyr qui m'attendrit, un héros de la douleur qui m'étonne, et c'est tout cela qui m'explique les grandes passions qu'il a inspirées et ressenties, car les femmes ont des yeux pour comprendre et adorer ces prodiges. »
Il est protégé, à ses débuts, par la reine Marie-Antoinette qui ordonne, alors qu'il n'est âgé que de 17 ans, de créer sa tragédie de Méléagre, qui n'eut toutefois qu'une seule représentation, bien que la pièce, jouée en présence de la reine, de la princesse et de toute la cour, ait été applaudie triomphalement. Mais le jeune homme déclare aux comédiens le lendemain matin : « Messieurs, mon succès d'hier m'a beaucoup touché, mais ne m'a pas fait illusion. Ma pièce est une œuvre d'enfant, c'est un enfant que le public a applaudi pour l'encourager; je n'ai qu'une manière de me montrer digne de son indulgence, c'est de ne pas en abuser. De telles bontés ne se renouvellent pas. Je retire mon ouvrage, et je tâcherai que ma seconde tragédie soit plus digne de vos talents. »
Il donne ensuite, en 1792, un drame en vers, Clarisse Harlowe, inspiré du roman de Samuel Richardson, qui fait dire que l'auteur n'est « pas assez roué pour peindre les roueries ».
Partisan de la Révolution, mais ennemi de ses excès, il les dénonce en 1795 dans Le Tartufe révolutionnaire, rempli d'allusions politiques audacieuses et qui est supprimé après la cinquième représentation. Puis il donne en 1796 une tragédie, Le Lévite d'Éphraïm avant de faire jouer, l'année suivante, son Agamemnon qui remporte un grand succès et apporte la célébrité à son auteur. On crie au génie et on se dispute dès lors Népomucène Lemercier dans les salons du Directoire — chez Mme Tallien, Mme Pourrat ou Mme de Staël — où il est tenu, selon Talleyrand, pour « l'homme de France qui cause le mieux ».
C'est à cette époque qu'il accepte, par défi, de traduire en vers, sans choquer la bienséance, les œuvres licencieuses du cabinet de Naples. Il compose Les Quatre Métamorphoses (1798), c'est-à-dire celles, sous l'effet de la passion amoureuse, de Diane en chèvre, de Jupiter en aigle, de Vulcain en tigre et de Bacchus en vigne.
Il compose également un drame historique en prose, Pinto, ou la Journée d'une conspiration (1800) qui met en scène la révolution qui porta le duc de Bragance sur le trône du Portugal et annonce le drame romantique : « De cette œuvre, observe Charles Labitte, aurait daté la rénovation de la scène française, s'il n'eût été coupé court aux hardiesses par la régularité de l'Empire. »
Lemercier a d'abord été lié avec Bonaparte. Il a fréquenté son salon dès son mariage avec Joséphine et sa tragédie d’Ophis, sur un sujet égyptien, a été représentée le jour même où l'on apprenait à Paris la nouvelle des succès militaires de l'expédition d'Égypte : plusieurs passages en ont été vivement applaudis en l'honneur du héros du jour. Après le 18 Brumaire, Lemercier est l'hôte régulier de la Malmaison, mais sa franchise commence à indisposer le Premier Consul, qui l'appelle « mon petit romain » : il lui prédit que, s'il rétablissait la monarchie, il ne règnerait pas dix ans ; lorsque l'Empire est proclamé, il renvoie sa Légion d'honneur. Dès lors, il est en butte à la censure impériale, évite tout contact autre que purement protocolaire avec Napoléon, ne paraissant aux Tuileries qu'aux réceptions solennelles de l'Académie française, où il est élu le . Il réduit fortement son activité littéraire. À l'Empereur qui lui demandait un jour : « Et vous, Lemercier, quand nous donnerez-vous quelque chose ? », il osa répondre : « Sire, j'attends ! »
Néanmoins, à la chute de l'Empire, son inspiration s'est tarie. S'il publie en 1819 son œuvre la plus connue, La Panhypocrisiade ou la comédie infernale du XVIe siècle, le texte en avait été presque complètement terminé sous le Consulat. C'est un ouvrage étrange, déjà nettement romantique, « une sorte de chimère littéraire, dit Victor Hugo, une espèce de monstre à trois têtes, qui chante, qui rit et qui aboie. » La critique n'est pas tendre pour cette œuvre étonnante. « Il y a dans cette œuvre, écrivit Charles Nodier dans Le Journal des Débats, tout ce qu'il fallait de ridicule pour gâter toutes les épopées de tous les siècles, et, à côté de cela, tout ce qu'il fallait d'inspiration pour fonder une grande réputation littéraire. Ce chaos monstrueux de vers étonnés de se rencontrer ensemble rappelle de temps en temps ce que le goût a de plus pur. C'est quelquefois Rabelais, Aristophane, Lucien, Milton, à travers le fatras d'un parodiste de Chapelain. » Le poème fait surtout penser aux Tragiques d'Agrippa d'Aubigné, dont il retrouve les accents d'indignation et la poésie étrange.
L'essor du mouvement romantique fait apparaître Lemercier décalé et démodé. Ses ouvrages n'obtiennent plus guère de succès, à l'exception de sa tragédie de Frédégonde et Brunehaut (1821), qui est reprise en 1842 au Théâtre-Français par Rachel, qui n'obtient pas grand succès[1].
Oubliant que lui-même, en avance sur son temps, a été traité de fou sous l'Empire, il vitupère les Romantiques. Lorsqu'on lui dit qu'ils sont ses enfants, il répond : « Oui, des enfants trouvés ! ».
Lemercier est le plus ferme opposant à l'élection de Victor Hugo à l'Académie française, où, ironie du sort, c'est Hugo qui lui succédera, au siège no 14. Conformément à l'usage, Victor Hugo prononce lors de son intronisation, le , l'éloge[2] — resté célèbre — de celui qui fut son plus ferme opposant. Lors de ce discours, Hugo cite le poète parmi les rares qui ne se sont pas agenouillés devant Napoléon[3].
Plaute ou la Comédie latine, comédie en 3 actes, en vers, représentée à la Comédie-Française le
Christophe Colomb, comédie historique en 3 actes, en vers, représentée sur le théâtre de S. M. l'Impératrice et Reine le
Charlemagne, tragédie en 5 actes, représentée à la Comédie-Française le
Le Frère et la Sœur jumeaux, comédie en 3 actes, en vers, représentée au théâtre de l'Odéon le
Le Faux Bonhomme, comédie en 3 actes tombée dès le commencement du 3e acte, représentée au théâtre français le
Le Complot domestique, ou le Maniaque supposé, comédie en 3 actes et en vers, représentée au théâtre de l'Odéon le
Ismaël au désert ou l'Origine du peuple arabe, scène orientale en vers (1801), représentée au théâtre de l'Odéon le (sous le titre Agar et Ismaël, ou l'Origine du peuple arabe)
La Démence de Charles VI, tragédie en 5 actes (1820), devait être représentée au théâtre de l'Odéon le
Clovis, tragédie en 5 actes (1820)
Frédégonde et Brunehaut, tragédie en 5 actes, représentée au Second théâtre français le
Louis IX en Égypte, tragédie en 5 actes, représentée au Second théâtre français le
Le Corrupteur, comédie en 5 actes et en vers, terminée le , représentée au Second Théâtre-Français le
Dame Censure, ou la Corruptrice, tragi-comédie en 1 acte et en prose (1823)
Richard III et Jeanne Shore, drame historique en 5 actes et en vers, imité de Shakespeare et de Rowe (1824)
Les Martyrs de Souli, ou l'Épire moderne, tragédie en 5 actes (1825) inspirée des écrits de François Pouqueville.
Camille, ou le Capitole sauvé, tragédie en 5 actes (1826)
Les Deux filles spectres, mélodrame en 3 actes et en prose, représenté au théâtre de la Porte-Saint-Martin le
Essais poétiques sur la théorie Newtonienne tirés de l'Atlantiade [...] - Paris : Collin (1808)
L'Atlantiade ou la théogonie newtonienne, poème en 6 chants (1812) : Bizarre poème didactique où des divinités allégoriques représentent le calorique, l'oxygène, le phosphore, etc.
Ode sur le doute des vrais philosophes (1812)
Épître à Bonaparte sur le bonheur de la vertu (1814)
Épître à Bonaparte, sur le bruit répandu qu'il projetait d'écrire des commentaires historiques (1814)
Réflexions d'un Français, sur une partie factieuse de l'armée française (1815)
La Mérovéide ou les champs catalauniques, poème en 14 chants (1818)
Du Second Théâtre-français, ou Instruction relative à la déclamation dramatique (1818)