Nicolas BourbakiAssociation des collaborateurs de Nicolas Bourbaki Le congrès Bourbaki de 1938. De gauche à droite : Simone Weil, Charles Pisot, André Weil (caché), Jean Dieudonné, Claude Chabauty, Charles Ehresmann et Jean Delsarte.
Nicolas Bourbaki est un mathématicien imaginaire, sous le nom duquel un groupe de mathématiciens francophones, formé en 1935 à Besse (Puy-de-Dôme) sous l'impulsion d'André Weil, a commencé à écrire et à éditer des textes mathématiques à la fin des années 1930. L'objectif premier était la rédaction d'un traité d'analyse. Le groupe s'est constitué en association, l'Association des collaborateurs de Nicolas Bourbaki[1], le 30 août 1952. Sa composition a évolué avec un renouvellement constant de générations. Sous le nom N. Bourbaki fut publiée une présentation cohérente des mathématiques, appuyée sur la notion de structure, dans une série d'ouvrages sous le titre Éléments de mathématique. Cette œuvre est à ce jour inachevée. Elle a eu une influence notable sur l'enseignement des mathématiques et sur l'évolution des mathématiques du XXe siècle. Toutefois, elle connaît de nombreuses critiques : incompatibilité[2] entre le formalisme retenu et la théorie des catégories, style trop formel[3],[4], rejet de la théorie des probabilités[5], manque d'exemples, incompréhension des étudiants, etc. À ces critiques, on peut opposer l'enthousiasme du grand mathématicien Emil Artin : « Notre époque assiste à la création d'un ouvrage monumental : un exposé de la totalité des mathématiques d'aujourd'hui. De plus, cet exposé est fait de telle manière que les liens entre les diverses branches des mathématiques deviennent clairement visibles[6]. » L'activité du groupe a cependant dépassé la seule rédaction d'ouvrages, par exemple avec l'organisation des séminaires Bourbaki. Explications sur la biographie (imaginaire)BourbakiLe nom de famille Bourbaki était le nom emprunté par Raoul Husson en 1923 lors d'un canular, alors qu'il était élève en troisième année de l'École normale supérieure. Pour présenter la démonstration d'un prétendu « théorème de Bourbaki », il avait pris l'apparence d'un mathématicien barbu, dénommé professeur Holmgren, pour donner une fausse conférence, volontairement incompréhensible et avec des raisonnements subtilement faux[7]. Le choix de ce nom par Husson connaît trois explications possibles :
Le nom Bourbaki a été arrêté en lors du congrès fondateur de Besse-en-Chandesse. Extrait d'une lettre[11],[12],[13] de Jean Dieudonné à la rédaction des Cahiers du séminaire d'histoire des mathématiques :
NicolasLe prénom Nicolas a été choisi par Éveline de Possel[b] à la fin de 1935[15], afin que puisse être communiquée une fausse note biographique à l'Académie des sciences. Toutefois, la mention N. Bourbaki, dans les premiers écrits publiés sous ce nom, ne renvoie pas à l'initiale de Nicolas. N était écrit tant que le nom du professeur était inconnu[16]. Depuis les débuts, les Éléments de mathématique sont publiés sous le nom de N. Bourbaki. Le seul ouvrage publié sous le nom de Nicolas Bourbaki se trouve être les Éléments d'histoire des mathématiques. On remarquera que si le mathématicien N. Bourbaki parle de « mathématique », l'historien Nicolas Bourbaki parle des mathématiques. PoldévieEn 1935, dans une lettre à Élie Cartan, Weil introduit N. Bourbaki comme un professeur de Poldévie, pays imaginaire d'Europe centrale. D'après Maurice Mashaal, il visait ainsi à fournir les éléments biographiques requis pour publier des travaux sous ce pseudonyme dans les Comptes rendus de l'Académie des sciences[17]. Une prétendue nation poldève avait déjà été évoquée en 1929 par le journaliste d'Action française Alain Mellet pour mystifier les députés républicains de gauche[c]. Le nom Poldévie est resté. Il est notamment mentionné comme le lieu de travail de Nicolas Bourbaki dans la Notice sur la vie et l'œuvre de Nicolas Bourbaki. Histoire de BourbakiOriginesLe groupe Bourbaki s'est constitué dans un contexte où une génération de mathématiciens potentiels avait été décimée par la Première Guerre mondiale. Les jeunes normaliens qui constituèrent le groupe se trouvaient donc sans prédécesseurs immédiats au sein de l'université, sauf Gaston Julia, et avaient pour interlocuteurs des chercheurs du XIXe siècle (Élie Cartan, Henri Lebesgue, Jacques Hadamard[d], Émile Picard, Édouard Goursat). La critique de Bourbaki portait sur :
À l'origine, au début de leurs prises de fonction à l'université de Strasbourg, Henri Cartan et André Weil se retrouvent à devoir enseigner l'intégration et le calcul différentiel. Ils sont alors peu satisfaits des traités disponibles, en particulier du Traité d'analyse d'Édouard Goursat qu'ils utilisent pour leur cours. Leur vient alors l'idée de réunir des amis, également anciens camarades de l'École normale supérieure de la rue d'Ulm (sauf Szolem Mandelbrojt), avec la volonté de rédiger un tel traité les satisfaisant. Le groupe d'amis, les membres fondateurs de ce qui deviendra Bourbaki, est à cette époque composé d'André Weil[e] et Jean Delsarte (promotion 1922), d'Henri Cartan, Jean Coulomb et René de Possel (promotion 1923), Jean Dieudonné et Charles Ehresmann (promotion 1924), Claude Chevalley (promotion 1926) et Szolem Mandelbrojt. Parmi les règles qui organisent ce groupe secret de mathématiciens, il est décidé qu'à l'âge de 50 ans, tout membre de Bourbaki devra céder sa place aux jeunes générations. Pour l'anecdote, André Weil, à l'occasion de la fête d'anniversaire des 50 ans de Dieudonné (en juillet 1956), fit lire au groupe Bourbaki une lettre où il annonçait son retrait du groupe, car il avait lui-même dépassé l'âge limite. Cet éclat eut son effet mais les quinquagénaires traînèrent un peu les pieds pour partir. Selon Pierre Cartier, Weil, né en 1906, participa à des congrès à Amboise en 1957 et 1959, notamment pour travailler sur la mesure de Haar[18]. Dieudonné continua, jusqu'à la fin des années 1970, à relire minutieusement les épreuves des Éléments de mathématique[19]. Les Éléments de mathématiqueLa première réunion de travail a lieu dans un café du quartier latin[f] en . En juillet de l'année suivante, le groupe se retrouve pour la première fois à Besse. Ils pensent alors que trois ans seront suffisants pour mener la rédaction du traité d'analyse à son terme. En fait, le premier chapitre nécessitera quatre ans de travail et, très rapidement, c'est un traité sur la mathématique qui devient le projet du groupe : les Éléments de mathématique, œuvre collective publiée sous le pseudonyme de N. Bourbaki. L'ampleur de la tâche fait qu'elle se poursuit encore au XXIe siècle. Le premier volume des Éléments de mathématique à être publié, en , fut le Fascicule de résultats (un résumé sans démonstration) de la Théorie des ensembles. Il fut suivi d'un fascicule contenant les deux premiers chapitres de Topologie générale en , puis, en , de la première édition du premier chapitre d'Algèbre (Structures algébriques). La publication des volumes ne respectait pas l'ordre de présentation du traité (Théorie des ensembles, Algèbre, Topologie générale…). Le premier chapitre rédigé de Théorie des ensembles (« Description de la mathématique formelle ») ne parut que dix ans plus tard, en , après les premiers chapitres de Fonctions d'une variable réelle (-), d’Espaces vectoriels topologiques () et d'Intégration (1952)[20]. Dans les années , la production des Éléments ralentit du fait d'un contentieux avec l'éditeur Hermann, puis s'arrête presque complètement : à partir de , le groupe ne publie que des rééditions, au point que le journal Le Monde croit pouvoir annoncer la mort collective du groupe en [7]. Cependant, un nouveau chapitre d'algèbre commutative paraît justement cette année-là. Un nouveau volume consacré à la topologie algébrique (les quatre premiers chapitres) paraît en , et une réédition refondue des premiers chapitres consacrés aux théories spectrales paraît en , puis paraissent les chapitres 3 à 5 des Théories spectrales dans un volume inédit en . L'âge d'or de BourbakiMême si le groupe Nicolas Bourbaki existe toujours au XXIe siècle, on considère que son influence a atteint son apogée dans les années 1960 et 1970. À cette époque, son importance était telle que ses choix ont influencé toute la recherche française en mathématiques et, de façon discutée, leur enseignement à travers la réforme Lichnerowicz de 1969[21]. Nicolas Bourbaki ne totalise pas moins de cinq médailles Fields (la plus importante récompense en mathématiques) à travers Laurent Schwartz (1950), Jean-Pierre Serre (1954), Alexandre Grothendieck (1966), Alain Connes (1982) et Jean-Christophe Yoccoz (1994)[22]. Les canulars BourbakiBourbaki publiait dans sa revue interne La Tribu des textes humoristiques autour de la vie du groupe[23]. Le mariage de BourbakiCe texte fait partie des productions internes du groupe Bourbaki[24] :
La mort de BourbakiDans la lignée dadaïste de sa naissance, le faire-part de décès suivant, sous forme de canular, fut publié en 1968 pour annoncer la « mort » de Nicolas Bourbaki. Dans ce texte, attribué à Jacques Roubaud, il s'agissait de critiquer l'évolution prise par le groupe à l'époque[24] :
Héritage et influence en mathématiqueEn 2012, l'éditeur d'origine de cette société secrète, les éditions Hermann, fait don de son fonds Bourbaki au département des manuscrits de la BNF, ces archives étant ainsi rendues accessibles au public qui peut découvrir l'héritage de Bourbaki en mathématique[25]. Notations et terminologieCe que les mathématiques doivent à Bourbaki est essentiellement :
On est redevable à Bourbaki d'un travail de clarification des concepts, de précision dans la formulation, d'une recherche — parfois aride — de structure, de classification systématique et exhaustive des mathématiques. Bourbaki novateurLes premiers volumes parus des Éléments de mathématique ont été novateurs : Théorie des ensemblesLa publication des Éléments commence en 1939, avec le fascicule de résultats de théorie des ensembles. Il contient la plupart des symboles indiqués plus haut (∅, ⇐, ⇒ et ⇔). Bourbaki popularisa le lemme de Zorn. AlgèbreLes livres d'algèbre commencent à paraître en 1942. Le contenu des chapitres 1 à 3 (« Structures algébriques », « Algèbre linéaire », « Algèbre multilinéaire ») sera profondément modifié jusqu'à la « nouvelle édition » de 1970, en un volume. Voici ce qu'en dit Pierre Cartier[29] :
À l'appui de cette déclaration de Pierre Cartier, citons Pierre Samuel dans la chronique qu'il fait de ce volume en 1970 dans les Mathematical Reviews[i] :
Topologie généraleConcernant le livre de topologie générale, les chapitres 1 et 2 (« Structures topologiques - Structures uniformes ») paraissent en 1940. Ils utilisent de manière systématique et cohérente les notions de filtre et d'espace uniforme. Or, ces notions n'ont été introduites qu'en 1937, la première par Henri Cartan[30], la seconde par André Weil[31]. La notion de filtre de Cauchy, qui relève à la fois de la théorie des filtres et de celle des espaces uniformes, apparaît sous la plume de Jean Dieudonné en 1939[32], puis, l'année suivante, de Bourbaki dans le fascicule cité[j] (ces deux ouvrages sont d'ailleurs rédigés parallèlement, et dans son article Dieudonné cite le livre de Bourbaki comme étant à paraître). Les notions très nouvelles et fécondes de topologies initiales et finales apparaissent également dans ce fascicule[33]. En 1941, Bourbaki introduit la notion d'espace complètement séparé dans une note de compte rendu à l'Académie des sciences[34] : c'est trop tard pour la première édition, mais il incorpore cette notion dans les exercices de la seconde édition du chapitre 1 (1950)[35] ; les espaces paracompacts, introduits par Jean Dieudonné en 1944[36] s'insèrent également dans cette seconde édition. Les chapitres 3 et 4 (« Groupes topologiques - Nombres réels ») paraissent en 1942. Ici encore, Bourbaki achève de moderniser la présentation des premiers chapitres du livre de Lev Pontriaguine, paru en 1939, sur les groupes topologiques[37], grâce à la notion de structure uniforme (deux années auparavant, il est vrai, André Weil avait fait paraître, avec une présentation tout aussi moderne, son livre sur l'intégration dans les groupes topologiques[38]). Le chapitre 10 (« Espaces fonctionnels ») paraît en 1949 ; il y présente le théorème de Stone-Weierstrass dans toute sa généralité alors que les travaux de Marshall Stone sur ce sujet s'étalent entre 1937 et 1948[39] ; le fascicule de Bourbaki achève de les systématiser. Espaces vectoriels topologiquesEn ce qui concerne le livre sur les espaces vectoriels topologiques, les chapitres 1 et 2 (« Espaces vectoriels topologiques sur un corps valué - Ensembles convexes et espaces localement convexes ») paraissent en 1953. La théorie des espaces vectoriels topologiques sur un corps valué non discret, au chapitre 1, était jusqu'alors inédite[40] (elle comporte dans l'exposé de Bourbaki les généralisations du théorème du graphe fermé, du théorème de Riesz sur la finitude de la dimension des espaces localement compacts, etc.). Les limites inductives, strictes et générales, sont exposées au chapitre 2 d'une manière qui s'avèrera quasi définitive. Les premières sont apparues en 1949 dans un article de Jean Dieudonné et Laurent Schwartz[41], les secondes dans les premiers travaux d'Alexandre Grothendieck, en cours de publication[42]. En 1950, Bourbaki publie un article où il généralise certaines notions apparues dans l'article de Dieudonné et Schwartz précité[43] : il introduit les notions fondamentales d'espace tonnelé et d'application bilinéaire hypocontinue, et démontre le théorème de Banach-Steinhaus dans toute sa généralité. Les chapitres 3 à 5 du livre sur les espaces vectoriels topologiques paraissent en 1955. Les résultats qui viennent d'être cités forment le cœur du chapitre 3 (« Espaces d'applications linéaires continues ») ; Bourbaki généralise au chapitre 4 (« La dualité dans les espaces vectoriels topologiques ») la notion d'ensemble polaire, le théorème des bipolaires, et fait une place de choix aux travaux de George Mackey, datant alors d'un peu moins d'une dizaine d'années[44]. IntégrationLes quatre premiers chapitres du livre sur l'intégration paraissent en 1952. Le choix de Bourbaki est de fonder son exposé sur la théorie des « mesures de Radon » plutôt que celle des « mesures abstraites ». Ce choix a par la suite été beaucoup critiqué (notamment parce qu'en théorie des probabilités, l'intégration ne se fait pas, en général, sur un espace localement compact), mais ses raisons sont très sérieuses, entre autres : le fait que l'image d'une mesure abstraite par une application mesurable ne conserve pas la mesurabilité des ensembles, contrairement à ce qui se produit avec une mesure de Radon ; le fait qu'une mesure abstraite sur la tribu borélienne n'admet généralement pas de support, etc. La synthèse qui permettra d'obtenir à la fois les avantages de la mesure de Radon et ceux de la mesure abstraite ne sera publiée qu'en 1969, par Bourbaki, au chapitre 9 du livre d'intégration (« Intégration sur les espaces topologiques séparés »), puis, de manière plus complète, à l'occasion des exposés sur les « applications radonifiantes » du Séminaire Schwartz de 1969-1970 à l’École polytechnique[45], et enfin, en 1973, dans le livre de Laurent Schwartz sur ce sujet[46]. Algèbre commutativeLes chapitres 1 à 7 d'Algèbre commutative paraissent entre 1961 et 1964. Bourbaki s'est fixé comme objectif de fournir toutes les bases pour la nouvelle Géométrie algébrique construite par Grothendieck (les Éléments de géométrie algébrique, rédigés par Grothendieck et Dieudonné, paraissent entre 1960 et 1967). Aussi Pierre Cartier dit-il des premières rédactions du Groupe Bourbaki, encore proches du livre de Zariski et Samuel, paru en 1958, et qui était jusqu'alors la référence[29] :
Notes critiquesBourbaki et la théorie des probabilitésComme il est dit plus haut, Bourbaki a été critiqué pour ne pas avoir pris en considération, du moins au début, la théorie des probabilités. Le groupe Bourbaki a longtemps étudié la théorie de la mesure avec les mesures de Radon sur les espaces localement compacts en délaissant les espaces plus généraux nécessaires à la théorie des probabilités[47].
— Laurent Schwartz, Un mathématicien aux prises avec le siècle[48] Néanmoins, au chapitre ix et dernier de son livre d'Intégration, paru en 1969, Bourbaki présente une synthèse (peu détaillée) des travaux qui ont réalisé l'extension de la théorie des mesures de Radon au cas où ces mesures sont définies sur des espaces topologiques séparés généraux. Dans les Notes historiques de ce chapitre, il mentionne les applications au Calcul des Probabilités et à la théorie des processus stochastiques, citant notamment les travaux (datant de la fin des années 1950) de Prokhorov et Le Cam ; et il indique le cadre (celui des espaces polonais ou plus généralement sousliniens) où la construction ne présente guère plus de difficultés que sur un espace localement compact. Bourbaki et la théorie des catégoriesSi l'opposition mesure abstraite-mesure de Radon a donc été résolue, in fine, de manière heureuse dans le Traité, il n'en va pas de même de l'indifférence que Bourbaki a affichée à l'égard de la théorie des catégories, donnant la prééminence aux structures, telles que définies dans le dernier chapitre du livre sur la Théorie des ensembles, chapitre publié en 1957. En 1986 et 1996, MacLane déclarait[49],[50],[k] :
Sourd aux recherches épistémologiques conduites dans la lignée d'Émile Borel par son camarade Jean Cavaillès, il est vrai inachevées pour cause de guerre et interrompues par la mort, Bourbaki ne s'est jamais engagé dans la théorie des catégories alors même que des membres éminents du groupe, Eilenberg et Grothendieck entre autres, en deviendront les experts. Ce parti pris s'est avéré coûteux, notamment au chapitre x du livre d'Algèbre, consacré à l'algèbre homologique, paru en 1980, que Bourbaki a dû se contraindre à présenter dans le cadre des modules plutôt que dans celui des catégories abéliennes. On peut lire dans une note de bas de page du livre d'Algèbre Commutative[51] : « Voir la partie de ce Traité consacrée aux catégories, et, plus particulièrement, aux catégories abéliennes (en préparation) », mais les propos de MacLane qui précèdent laissent penser que ce livre « en préparation » ne sera jamais publié. Influences dans d'autres disciplines : structuralisme et OulipoEn littérature, l'Oulipo copie indéniablement la « méthode » Bourbaki de travail collectif et de mise en évidence systémique des structures profondes de la création littéraire. À noter qu'un membre important de l'Oulipo, Jacques Roubaud, est un mathématicien qui a été très marqué par Bourbaki[52]. C'est par exemple lui qui a écrit l'avis de décès de Bourbaki, sous forme de canular. Le structuralisme lacanien ou celui de Lévi-Strauss en ethnologie, à la même époque, dénote une quête de structures fondamentales dont on peut débattre s'il s'agit de l'influence de Bourbaki ou d'un certain « air du temps »[53]. Le philosophe des sciences Jules Vuillemin fut influencé par Bourbaki (La philosophie de l'algèbre). Il est inutile d'imaginer un groupe qui ait influencé les autres groupes. André Weil (1906) est sensiblement de la même génération qu'André Breton (1896), Jacques Lacan (1900), ou Claude Lévi-Strauss (1908). Tous ces groupes avaient atteint leur apogée en 1964. Une rencontre s'est opérée géographiquement au mois de janvier 1964 lorsque le directeur de l'École normale, Robert Flacelière, a mis à la disposition de Jacques Lacan une salle dans les locaux de son école (séminaire Livre XI, Les Quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse). D'un côté Jacques Lacan souhaitait la venue des mathématiciens pour formuler les structures algébriques et topologiques qu'il considérait à l'œuvre dans la psychanalyse ; de l'autre les mathématiciens voyaient là, peut-être avec un certain amusement, une application concrète des mathématiques fondamentales. C'est sensiblement à cette époque que le groupe Bourbaki fit paraître la Théorie des ensembles dont Lacan fit un très grand usage. Ce qui distinguerait le groupe des mathématiciens des autres groupes, ce serait son côté fermé et réservé aux mathématiciens de haut niveau de l'École normale supérieure, alors que le structuralisme prétendrait intéresser tous les praticiens des sciences humaines : littérature, politique, psychanalyse, ethnologie, linguistique. Il y a bien sûr un point commun, qui est le retour aux sources, la recherche des fondements et la rupture épistémologique. Mais les deux groupes sont néanmoins restés sur leur quant-à-soi. Mathématiciens ayant appartenu à BourbakiPrésentés par ordre de naissance, puisqu’on quitte Bourbaki à 50 ans. Membres fondateurs
Membres non fondateurs
Membres actuelsLes noms des membres actuels de Bourbaki sont tenus secrets. Principales publications
Articles de revues signés Nicolas Bourbaki
Notes et référencesNotes
Références
Voir aussiBibliographie
Ressources radiophoniques
Autres pseudonymes collectifs de scientifiquesArticles connexesLiens externes
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