Albert Roussel s'installe vers la mi-juin 1912 à Belle-Île-en-Mer, à Port Goulphar, où il commence la composition de la Sonatine pour piano[1]. Le , il écrit à Jean Marnold : « j'achève ma Sonatine de piano que j'avais, depuis des années, l'intention d'écrire[1] ». Le compositeur termine l'écriture de l'œuvre le [2],[1].
Très lent ( = 48), à , en si majeur, — Modéré (+ = 42) puis Très animé (+ = 66), En élargissant beaucoup (+ = 48) enfin Vif (+ = 96).
Analyse
Par rapport à la précédente grande page pour piano du compositeur, la Suite op. 14, la Sonatine est « d'une écriture beaucoup plus aérée et d'une forme plus concise[2] ». La partition « marque le cheminement de Roussel vers un art plus dépouillé, plus ferme, et libéré aussi bien de l'atmosphère debussyste que des règles de la Schola[5] ».
L'œuvre s'ouvre sur un « Modéré » ( = 84), à , en si mineur, de forme sonate en raccourci et au caractère mélodique, dont « le motif empreint de gravité s'appuie, dans un chatoiement d'harmonies, sur un rythme obstiné qu'on dirait de sarabande[6] ». Le tempo s'anime progressivement pour mener, enchaîné, à un scherzo, « Vif et très léger » ( = 200), à , en sol bémol majeur, « un des moments les plus exultants du piano de Roussel[6] », dans lequel semblent s'ébrouer « satyres et [...] faunes capricants[2] ».
Le second mouvement est tout entier à , d'abord sur un « Très lent » ( = 48), en si mineur, au caractère grave et profond, puis un « Modéré » qui s'anime progressivement jusqu'à un « Très animé », un finale étourdissant qui « n'est tout entier qu'animation, gaieté communicative, rythmes dansants et éclaboussures d'harmonies[6] », « d'une limpide allégresse dont l'irrésistible progression est soulevée par le souffle même de la vie[2] ».
La Sonatine de Roussel est « ciselée comme un joyau, animée par un souffle rythmique irrésistible, et dont les harmonies subtiles utilisent fréquemment les superpositions de quartes[7] ». Pour Harry Halbreich, « c'est un délicat chef-d'œuvre, qui mériterait une notoriété égale à celle de la Sonatine de Ravel[2] ».
Alfred Cortot, La Musique française de piano, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Quadrige » (no 25), (1re éd. 1937), 764 p. (ISBN2-13-037278-3, OCLC612162122, BNF34666356), « L'œuvre pianistique d'Albert Roussel », p. 591–617.
Nicole Labelle, Catalogue raisonné de l'œuvre d'Albert Roussel, Louvain-la-Neuve, Département d'archéologie et d'histoire de l'art, Collège Érasme, coll. « Publications d'histoire de l'art et d'archéologie de l'Université catholique de Louvain » (no 78), , 159 p.
Paul Pittion, La musique et son histoire (t. II) : de Beethoven à nos jours, Paris, Éditions Ouvrières, , 574 p., « Albert Roussel », p. 286-291.
Guy Sacre, La musique pour piano : dictionnaire des compositeurs et des œuvres, vol. II (J-Z), Paris, Robert Laffont, coll. « Bouquins », , 2998 p. (ISBN978-2-221-08566-0), p. 2335-2345.