Divisions administratives du Troisième ReichDès leur arrivée au pouvoir en mars 1933, Adolf Hitler et le NSDAP firent adopter la Loi des pleins pouvoirs. En alléguant vouloir résoudre la misère et la détresse du peuple allemand, le régime nazi modifia la Constitution, limita fortement les libertés individuelles, accentua le processus dit de la Gleichschaltung et fit de l’Allemagne un État totalitaire. En 1934, les Länder qui subdivisaient administrativement la République de Weimar (seize républiques ou États libres auxquels s’ajoutaient les villes libres de Brême, Hambourg et Lübeck, en 1920 s’ajoutèrent sept États de Thuringe) furent supprimés et remplacés par des Gaue (au singulier : Gau) qui devinrent de facto les divisions administratives de l'Allemagne nazie. La manœuvre des dirigeants nazis était claire : avoir un contrôle permanent et total sur toutes les parties et composantes de l’Allemagne. Contrôle totalLes Gaue instaurées par les nazis avaient été dessinées dès 1926 en tant que « districts du Parti », répartis au sein des différents États allemands et provinces de Prusse, tels que ceux-ci avaient été définis à la fin de la Première Guerre mondiale[1]. Chaque Gau reçut un responsable administratif appelé Gauleiter, choisi et désigné par Hitler lui-même. Si les Länder et les Provinces prussiennes continuèrent d’exister, elles furent réduites à un organe rudimentaire attaché à un Gau. Ce processus du Gleichschaltung visait à cadenasser la gestion et le contrôle de l’ensemble du pays. Au total, l’Allemagne fut partagée en 32 Gaue en 1934. À l’écroulement du régime nazi en 1945, le nombre de Gaue était passé à 42[2]. Toutes les régions annexées par les Nazis en 1938 (l’Autriche après l’Anschluss de mars et le territoire des Sudètes après la signature des accords de Munich, en septembre), puis en 1939 la région de Klaipėda (ou Memelland en Lituanie), et enfin toutes les régions conquises militairement durant la Seconde Guerre mondiale furent incorporées dans le système des Gaus ou furent organisées en Reichsgaus (l’un et l’autre étaient similaires excepté leur appellation). Les Gauleiters cumulaient leur fonction avec celle de Reichsstatthalter, ce qui jumelait les sphères du parti avec celle de l’État[1]. Après la défaite de 1945 et selon les termes convenus entre eux par les Alliés, lors de la conférence de Yalta, l’Allemagne perdit non seulement les territoires annexés par la diplomatie ou la conquête militaire, mais aussi des régions qu’elle possédait avant l’arrivée au pouvoir des nazis. De plus, quand s’enclencha le processus de la guerre froide, le territoire allemand se retrouva partagé en deux nations distinctes pendant près d’un demi-siècle. Gaue, Reichsgaue et LänderLes Gaue coexistèrent en parallèle avec les anciennes subdivisions de la République de Weimar dont le découpage administratif fut maintenu inchangé. Le projet d’abolir les Länder fut finalement abandonné parce qu’Hitler renonça à poursuivre ses réformes structurelles prévues (Reichsreform), essentiellement par crainte de déplaire à divers dirigeants locaux du Parti nazi. Pour les mêmes raisons, les frontières des Gaus restèrent identiques au travers de l’Allemagne. Après 1938, certains Gaus furent ajoutées par annexion ou conquête militaire[3]. Mais si les Länder continuèrent d’exister, leur rôle réel et leur pouvoir furent pratiquement nuls. Au sein des subdivisions administratives, le pouvoir fut aux mains des Gaulteiters et non plus des Ministres-Présidents. Ces Gauleiters étaient nommés directement par Hitler et ne rendaient des comptes qu’à lui seul. Les interférences étaient rares et leur pouvoir absolu. Cette redistribution administrative totale des responsabilités concerna tous les domaines d'activités. Ainsi, le ministère nazi des Sports (Nationalsozialistischer Reichsbund für Leibesübungen - NSRL), après avoir rassemblé et réorganisé, sous sa seule autorité, toute l'activité sportive allemande, implémenta les gauligen. Gaue établies en 1934
Reichsgaue créées dans les années 1930En 1938, après l’Anschluss (annexion de l’Autriche) et la signature des accords de Munich, de nouveaux Reichsgaus furent établies. Le territoire des Sudètes devint le Reichgau Sudentenland. Par contre les parties méridionales de la Tchécoslovaquie (aussi concernées par les accords de Munich) furent incorporées aux Reichgaus des Danube inférieur et supérieur.
Reichsgaue établies pendant la Seconde Guerre mondialeUne fois les territoires polonais et la ville libre de Dantzig annexés au Reich, en 1939, Les Reichsgaue Wartheland et Dantzig-Prusse-Occidentale furent créées. Les territoires de la Pologne annexés avant la guerre ne furent pas joints à ces deux Gaue mais rejoignirent les Gaue voisins de Prusse-Orientale et de Silésie. En 1940, les départements français du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle furent rattachés en 1940, aux Gaue du Sud-Ouest de l’Allemagne (Bade et Sarre-Palatinat). En 1942 Le Grand-Duché du Luxembourg fut incorporé au Gau Coblence-Trèves qui prit alors le nom de Gau Moselle (Moselland). En 1944, un Reichgau "Belgique" fut créée et annexé au territoire du IIIe Reich.
AuslandsgauIl y avait aussi un « Gau extraterritorial » ou Auslandsorganisation, composé des membres du NSDAP vivant à l’étranger. Son quartier-général était à Berlin, il était considérée comme la 43e Gau de l’Allemagne nazie. Operationszonen (zones opérationnelles)Après le renversement de Benito Mussolini, le gouvernement italien entame des négociations secrètes avec les Alliés afin de faire basculer l’Italie dans le camp des Alliés. En représailles, les Allemands libérèrent Mussolini (opération Eiche) et le réinstallèrent à la tête d’un État fantoche, la République de Salo dans le Nord de l’Italie (qui reste occupée par l’armée allemande, une large zone s’étendant le long de la Suisse). L'Adriatique devint une Operationszonen qui fut officieusement rattachée à l’Allemagne par le biais d’une Gau adjacente. Il y eut deux zones opérationnelles de ce type :
Gouvernement généralLa grande majorité des régions polonaises ne fut pas rattachée au IIIe Reich. Une administration séparée, appelée gouvernement général se vit confier la gestion et le commandement de la Pologne occupée[4]. Bien que théoriquement localisée en dehors des frontières proprement dites du Reich, cette région fut considérée comme partie intégrante de la Grande Allemagne par les officiels nazis en tant que région autonome, donc en principe pas directement subordonnée au gouvernement de Berlin[5]. La Pologne du Gouvernement Général fut partagée en quatre districts : Après l’opération Barbarossa (invasion de l’URSS en 1941), un 5e district fut ajouté, le District de Galicie[6]. Protectorat de Bohême et MoravieAprès que la conférence de Munich eut garanti aux Allemands le contrôle d’une part considérable de la Tchécoslovaquie, le reste du territoire tchécoslovaque fut soumis aux lois allemandes en mars 1939. La Slovaquie devint ainsi un État séparé (mais satellite) de l’Allemagne, pendant que les territoires tchèques furent renommés Protectorat de Bohême-Moravie sous domination allemande[7]. Deux structures différentes existèrent pour l’administration de ce Protectorat[8]. Celui-ci fut partagé en deux Länder : la Bohême et la Moravie qui furent à leur tour divisées en plus petites entités. Le NSDAP y implémenta différentes formes d’organisations en quatre districts qui furent administrativement subordonnés aux Gaus et Reichsgaus voisines : Gau Sudetenland, Gau Bayreuth (Gau Bayerische Ostmark jusqu'en 1942), Gau Danube inférieur et Gau Danube supérieur[9]. Futurs districts planifiésLe gouvernement nazi entretint en permanence une pratique agressive d’expansion territoriale (expansionnisme), et voulut poursuivre l’agrandissement de son territoire déjà important[10]. Ce fut pour cela que dans la perspective de l'élargissement potentiel du Grand Reich, de nouveaux districts furent planifiés par les idéologues nazis, les officiels gouvernementaux et les départements de planification du territoire. Ces expansions territoriales envisagées suivirent deux logiques différentes :
Expansion territoriale en Europe orientale (Espace vital)De manière à étendre ce qu’Hitler appelait le Lebensraum, l’espace vital du peuple allemand, les Nazis provoquèrent de grandes transhumances, obligeant des populations entières de Slaves à quitter leur lieu de vie pour permettre l’installation d’Allemands, afin de germaniser des régions entières. Des villes entières furent affamées afin d’éliminer les habitants ou les contraindre à partir, quand ce ne fut pas la mise en esclavage. Ces procédés barbares se combinèrent avec un autre encore plus terrifiant l’horrible génocide de la population juive[11]. La politique raciale et raciste des Nazis planifia la colonisation germanique des territoires militairement conquis en Europe de l'Est. Il y eut ainsi la mainmise sur ce qui était appelé les Siedlungsmarken ou Reichsmarken (Marches) de l’Ingermannland (Ingrie), le Territoire de Memel en Lituanie, mais aussi, à l’opposé au Sud, de la Crimée[12]. La Crimée devait ainsi être considérée et réorganisée comme le Gotengau (le Gau des Goths), en l’honneur des anciens peuples Goths qui s’y étaient installés. Lors d’une conférence tenue le , les nazis discutèrent de la future organisation des territoires soviétiques conquis. Hitler y déclara son intention de non seulement germaniser les régions mentionnées ci-dessus, mais aussi de compter toute la région des États baltes (Reichskommissariat Ostland), la région de la Volga et le district de Bakou (dans l’actuelle Azerbaïdjan) dans les futurs Reichsgebieten (territoires du Reich)[13]. La région centrale et supérieure de la vallée de la Vistule (placée sous l’autorité du Gouvernement Général) fut discutée abondamment pour devenir le Vandalengau (Gau des Vandales) ou jusqu’à cinq nouveaux Reichsgaue seraient créées[14]. Une proposition faite dès 1939 défendit la création d’un Reichsgau Beskidenland, qui se serait étendu de l’Ouest de Cracovie jusqu’à la rivière San dans l’Est[15]. En Yougoslavie occupée, le représentant nazi Sepp Janko insista pour la création d’un Reichsgau Banat (ou Gau du Prince Eugène). Ce gau aurait englobé les territoires yougoslaves de Banat, une partie de la Transylvanie (Siebenbürgen) et de la Baranya[16]. Annexion des pays germaniquesLa catégorisation raciale des nazis considérait une classification des peuples d’Europe en groupes ethniques. Ceux étant de souche germanique (les Néerlandais aux Pays-Bas, les Flamands en Belgique, les populations du Danemark, de Norvège et de Suède mais aussi les Anglais) étaient considérés comme faisant partie de la race supérieure, la race aryenne (Herrenrasse, soit « race des seigneurs »)[17],[18]. Faisant suite à l’Anschluss, que les Nazis estimaient réussie, de l’Autriche au sein de la Grande Allemagne (Großdeutschland), Adolf Hitler décida de suivre la même politique pour tous les autres pays mentionnés ci-dessus. Il les considérait comme dignes de faire partie de son grand Reich[19]. Cela signifiait que les Pays plats (Flandres et Pays-Bas et toute la Scandinavie) pouvaient être annexés dans une nation allemande encore plus grande (Großgermanisches Reich) qui serait alors partagée en plus petits États et entités administratives, comme le Danemark le fut dans le Gau Nordmark[20], et les Pays-Bas dans le Gau Westland[21]. Après leur annexion, la notion même que ces pays aient pu être indépendants et séparés du Reich devait être supprimée définitivement[22]. Les objectifs voulus pour l’entrée dans une nouvelle ère furent rapidement renforcés : Gleichschaltung. La finalité était que ces nations, malgré leurs dialectes différents, devaient devenir des copies parfaites, du point de vue politique et social, de l’Allemagne nationale-socialiste[23]. En plus, les nazis avaient l’intention de ramener la frontière occidentale de l’Allemagne à ce qu’elle était du temps du Saint-Empire romain germanique, soit depuis l’embouchure de la Somme jusqu’au lac Léman. La partie est de la France, la zone occupée, devait être annexée au Reich sous le nom de Reichsgau Bourgogne, avec Nancy (Nanzig) comme capitale[24]. Voir aussiNotes et références
Sources & Liens externes
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