L'abbaye Saint-Remi de Reims est une ancienne abbaye bénédictine de Reims, devenue aujourd'hui le musée Saint-Remi de Reims. Vers 760, Tilpin, archevêque de Reims, fonde l'abbaye Saint-Remi et y installe une communauté religieuse bénédictine qui y restera jusqu’à la Révolution française. L'abbaye connut un développement économique et spirituel remarquable au Moyen Âge, et une renaissance tout aussi importante aux XVIIe et XVIIIe siècle. Pour l’Onction des rois, qui s’effectuait dans la cathédrale de Reims, l’ampoule contenant le chrême, ou huile sainte, était apportée de l’abbaye de Saint-Remi. L’abbaye de Saint-Remi exerce sa domination sur les paroisses relevant de son ban et sur deux collégiales, dont celle de Saint-Timothée.
Histoire
Un premier monastère fut peut-être fondé par saint Remi, évêque de Reims, où il fut inhumé en 533. Vers 750-770 (ou en 790, selon les sources), l'évêque Tilpin fonde une abbaye de bénédictins sur le tombeau de saint Remi, devenu lieu de pèlerinage[1].
Vers 852, Hincmar demande la reconstruction de l'édifice abritant les reliques de Saint-Remi ainsi que la sainte ampoule.
En 1010, l'abbé Airard (1007-1035) l'un des premiers abbés élus par les moines lance la reconstruction de l'abbaye. Une grande église romane voit le jour, remaniée sous l'abbatiat de Thierry (1036-1048). L'abbatiale avec rang de basilique est consacrée par saint Léon IX, le .
Hérimar (1048-1076), reçoit de Manassès de Châtillon (sur-Marne), dit Le Chauve, vidame de Reims, des terres à Viré pour y bâtir une ferme contre une rente de 100 sols, acte confirmé en 1053 par l'oncle du donateur Gui de Châtillon archevêque de Reims, en présence de Roger, comte de Porcien ; Manassès comte de Réthel; Renaud comte de Soissons; Gui Ier de Châtillon, seigneur de Châtillon, neveu de l'archevêque, et cousin du donateur, Geoffroi, Miles et Aleman, chevaliers de Châtillon, témoin d'un accord entre Manassès, comte de Porcien, son neveu avec Gervais de Belleme archevêque de Reims, en 1055.
L'abbatiale et les cloîtres de Saint-Remi sont presque entièrement détruits par un terrible incendie, qui éclate dans l'abbaye, la nuit du 15 au . Un grand nombre des inestimables trésors de la bibliothèque (900 manuscrits), qui contenait 20 000 volumes, périssent dans cette catastrophe, entre autres le célèbre manuscrit des fables de Phèdre du VIIIe siècle[2],[3], le cartulaire connu sous le nom de Polyptyque[Note 1] de Saint-Remi[4], commencé, dit-on, par l'évêque de Reims, Leudégisile, vers 634; la collection des actes capitulaires et deux histoires inédites de l'abbaye, par les bénédictins dom Égée et dom Levacher.
On a heureusement sauvé des flammes le livre des Origines de saint Isidore, écrit vers l'an 750 ; le pontifical de l'archevêque Hincmar, de l'an 780 ; un sacramentaire de saint Grégoire, qui date de 799, et les Heures de la reine Emma, épouse de Louis d'Outremer. Reconstruits après l'incendie, les bâtiments de l'abbaye sont entièrement moderne[5]. L'architecte Louis Duroché, restaure la cour, l'escalier et la façade actuelle.
Le , l'Assemblée constituante prononce l'abolition des vœux monastiques et la suppression des congrégations religieuses. Les religieux sont expulsés en 1793. L'abbaye sert alors de caserne militaire.
Fonction hospitalière
Il avait depuis longtemps un hospice d'accueil, cf. les bâtiments en bas à droite sur l'image ci-dessus. Elle sera transformée, dans son intégralité, en hôpital militaire en 1796 jusqu'en 1816, puis en Hôtel-Dieu à partir de juin 1827. Elle devient l’hôpital civil de 1905 jusqu’à l’entre-deux guerres.
Le cloître de l'abbaye est classé au titre des monuments historiques par la liste de 1889 ; arrêté des 15 avril 1920 et 1er décembre 1933, divers autres éléments de l'abbaye seront également classés[6].
Deux églises collégiales (Saint-Timothée, et Saint-Côme-et-Saint-Damien) et, une paroissiale (Saint-Julien) étaient associées à Saint-Remi. L'aumônerie avec une chapelle Saint-Laurent se trouvait au sud de l'abbatiale, alors que les bâtiments monastiques se trouvaient au nord. Le logis de l'abbé se situait au nord du grand cloître. L'infirmerie, avec une chapelle dédiée à Saint-Christophe, occupait le petit cloître, situé à l'est de la salle capitulaire[8].
Le fondateur Tilpin se réserve le nom d'abbé. Ensuite les archevêques de Reims sont les abbés de Saint-Remi. Hugues de Vermandois est le dernier archevêque à porter la dignité d'abbé[1]. En 945, il y a nomination d'un abbé indépendant.
L’archevêque de Reims et l’abbaye Saint-Remi sont les acteurs principaux de la vigne en Champagne médiévale. Ils exploitaient chacun en régie direct près de 40 hectares de vignes au XIVe siècle[13].
Jean-Pierre Devroey indique que les biens de l'Église de Reims et ceux de Saint Remi furent pratiquement confondus jusqu'aux premières années du IXe siècle. Il paraît assuré qu'entre l'épiscopat de saint Rieul (670-696) et la date de 945, qui est celle de la nomination d'un abbé indépendant, le temporel du domaine cathédral et de Saint-Remi formait une seule entité. La rédaction d'un polyptyque est la manifestation d'un premier effort pour distinguer le domaine de l'un et de l'autre[14].
Il recense 24 fiscs, vers le milieu du IXe siècle, composés chacun d'une manse seigneuriale (Mansus Domminicatus) et des manses tributaires, dans le pays rémois (Pagus Remensis), le Laonnois (Pagus ?), le Tardenois (Pagus Tardinensis) et le Porcien (Pagus Porcensis)[15].
Le , une bulle du papeEugène III précise les possessions de l'abbaye Saint-Remi et cite Alendusium (Alland'Huy) qui apparaît déjà dans le Polyptyque de Saint-Remi[17].
Vrizy est cité pour la première fois en 1154 dans un acte pontifical sous Adrien IV, comme étant un des biens de l'abbaye Saint-Remi [18],[19].
En 1234, un accord est signé entre l’abbaye Saint-Remi et la communauté d’Amagne par lequel l’abbaye se décharge de la couverture de l’église.
Depuis le Moyen Âge, l'abbaye possède une seigneurie à Hermonville. En juin 1230, une charte de franchises, limitant les droits seigneuriaux, est concédée par l'abbaye Saint-Remi aux habitants d'Hermonville [21]. En 1353, il y a un conflit entre Gui de Cheppes, qui possède une autre seigneurie à Hermonville et tient un fief à Neuvizy, et l'abbaye Saint-Remi[22]. Un accord est passé le entre les religieux de Saint-Remi et les jurés et habitants d'Hermonville, par lequel ces derniers ont droit de tenir un ban avant la moisson de chaque année, et de fixer le jour pour l'ouverture de la moisson[23]. Elle est composée en 1749 de près de 80 maisons, situées dans différents endroits du village d'Hermonville et mêlées avec les autres seigneuries. La plus grande partie du terroir d'Hermonville et plusieurs maisons du village sont en franc-alleu, ne payant aucun droit à qui que ce soit mais sont mêlés avec les héritages sujets à droits de cens envers les différents seigneurs et les religieux de Saint-Remi prétendent sur ces francs-alleus la juridiction qui leur est contestée par les autres seigneurs[24].
La vigne de Murigny, que l'on appelle « le clos » était une cense de l'abbaye de Saint-Remi[25].
Ce clos apparaît pour la première fois dans une confirmation de possessions faite par le Pape Honorius III en 1218 : vinea de murineio que Clausum dicitur. En 1226, dans une lettre de l’abbé Pierre le Boiteux qui octroie 200 muids de vin de pitance au couvent de Saint-Remi, à prendre sur les vignes du clausum de Murigny[26].
↑Léopold Hervieux, Les fabulistes latins depuis le siècle d’Auguste jusqu’à la fin du moyen âge : Tome I : Phèdre et ses anciens imitateurs directs et indirects (2e éd.), t. I, Paris, Librairie de Firmin-Didot et Cie, , 848 p. (lire en ligne).
↑Jean-Pierre Devroey, L’éclair d’un bonheur. Une histoire de la vigne en Champagne, Paris, Éditions La Manufacture, 1989, 208 p
↑Jean-Pierre Devroey, Le polyptyque et les listes de cens de l'abbaye de Saint-Remi de Reims (IXe-XIe s.), Reims, Acad. nat., 1984, 8°, civ 164 pp. («Trav. Acad. nat. Reims», 163).
↑Patrick Demouy, Genèse d'une cathédrale : Les archevêques de Reims et leur Église aux XIe et XIIe siècles, Éditions Dominique Guéniot, , 814 p. (ISBN2-87825-313-2), p. 733.
↑Octave Guelliot, Dictionnaire historique de l'arrondissement de Vouziers, t. X, Éditions Terres Ardennaises, , 115 p. (ISBN2-905339-75-6), « Vrizy », p. 96-110.
↑Aurélien Nouvion, Clercs, vin et lieu en Champagne médiévale : La châtellenie épiscopale de Courville et le clos bénédictin de Murigny, Crescentis : Revue internationale d'histoire de la vigne et du vin [En ligne], 1 | 2018, Dossier thématique - J.-P. Garcia (coord.), Le vin et le lieu, mis en ligne le 01 octobre 2018, consulté le 01 avril 2019. URL : http://preo.u-bourgogne.fr/crescentis/index.php?id=280
↑Auguste Longnon, Dictionnaire topographique du département de la Marne : comprenant les noms de lieu anciens et modernes, Paris, , 380 p. (lire en ligne).
Benjamin Guérard, Polyptyque de l'abbaye de Saint-Remi de Reims : Dénombrement des manses des serfs et des revenus de cette abbaye vers le milieu du neuvième siècle de notre ère, Paris, , 214 p. (lire en ligne).
Abbé Poussin, Monographie de l'abbaye et de l'église de St-Remi de Reims : d'après Flodoard, Reims, Lemoine-Canart, , 279 p. (lire en ligne)..
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Marc Bouxin, « L’Abbaye Royale de St Remi de Reims », Dossiers d’archéologie, , no 186, p. 60-73.