Anita de Caro, née à New York le et morte à Paris le (à 88 ans)[1], est une peintre et graveuse française d'origine américaine.
Biographie
Anita de Caro naît à New York, dans une famille d’origine napolitaine. Elle montre très jeune un goût pour le dessin, et visite le Metropolitan Museum of Art. Elle s’inscrit à l’Art Student’s league, une école dirigée par Hans Hofmann et Max Weber. Elle étudie la peinture avec Hofmann qui dira de son travail : « Cette jeune fille a une vision intérieure ». Elle découvre l’art français, Cézanne et Matisse : « Matisse est devenu pour moi un maître qui m’a éveillée ».
Après le décès de sa mère en 1932, Anita de Caro accompagne une amie, Norina Matchabelli, pour un voyage en Europe. À Zurich, elle fréquente les cours de Otto Haas Haye dans une académie moderniste que dirige Paul Klee.
Elle rencontre le graveur Roger Vieillard lors d’une fête organisée à l’Atelier 17, et l’épouse en 1939.
Anita de Caro reste à Paris pendant les années de guerre, tandis que Roger Vieillard est mobilisé. Ses gravures, gouaches et encres montrent une inspiration surréaliste, elle réalise également des bas reliefs dans des métaux précieux. Dès le début des années 1940, le couple est en contact avec les artistes et les poètes associés à la deuxième École de Paris tels que Bazaine, Manessier, Jean Tardieu, André Frénaud. Dans cette tendance, nous pouvons également citer Jean Le Moal, Roger Bissière, et Vieira da Silva qui a également fréquenté l’Atelier 17.
Fin 1944, la galerie « L’Esquisse » organise la première exposition personnelle de Anita de Caro. Son travail s’oriente vers l’abstraction, jouant sur les modulations de la couleur et de la lumière. « Le réel est transmué dans un champ poétique de paysages intérieurs de ligne légendaires, ses tableaux se construisent par juxtaposition de touches de couleur en transparence ou superposés »[2].
Le style d’Anita de Caro évolue vers un « impressionnisme abstrait » [2] en phase avec le monde artistique parisien de cette période. Elle fait des recherches picturales sur le thème de Mallarmé, « Un coup de dé / jamais n’abolira le hasard ». Elle mélange d’autres matériaux à sa peinture, tissu, papier collé. Elle utilise d’autres techniques, contreplaqués, toile émeri, papier pliés : « le jeu pictural devient le lieu d’une interrogation libre et lyrique sur le jeu cosmique » (Marc Fumaroli). Vers 1961, la figure humaine apparaît dans ses œuvres ; d’abord sous la forme d’une d’ombre, elles deviendra de plus en plus présente. Elle crée des sculptures de bois assemblés et peints (Pièces d’échec, le roi, la reine). Elle expose régulièrement à la galerie Coard de Paris. À partir de 1985, elle crée des collages de papiers gouachés aux couleurs éclatantes.
Le décès de Roger Vieillard en 1989 la laisse seule et désemparée, en 1991 elle se remet à travailler et réalise des collages à partir des gravures de son mari, ainsi que des sculptures de bois colorées. Sous l´impulsion de bernard Legendre, elle fait l’objet d’une rétrospective et d´une exposition de ses planètes au Musée-École de la Perrine à Laval.
Le poète Jean Tardieu caractérise l’œuvre d’Anita de Caro comme « la synthèse entre ce qui parle à son esprit et ce qui plaît à sa vision ».
Anita de Caro a été décorée en 1946 de la « The American National Red Cross » pour son engagement en tant que volontaire à la Croix-Rouge, pour accueillir et soutenir les soldats de l’armée américaine.
« Quand je peins, je reste dans mon atelier, mon sanctuaire… Je fais le vide en moi. Alors s'installe une étrange conversation entre moi et ma toile ; de ce dialogue naît mon œuvre. C'est ainsi que s'exprime à travers ma peinture la partie la plus secrète de moi-même… Depuis le milieu des années 60, je me suis repliée dans mon sanctuaire. Là, on ne souffre pas, c'est dans le monde que l'on sent sa douleur. » - Anita de Caro[5]
Réception critique
« Modeste Anita ! Lorsqu'on la compare à Vieira da Silva, d'un an son aînée, elle dit : "elle est plus intelligente que moi", et ajoute : "peut-être suis-je plus intuitive". Maria Elena Vieira da Silva, Jean Messagier, Alfred Manessier, Jean Bazaine… Ne cherchez pas les points de convergence, regardez. Anita de Caro, c'est superbe : une mosaïque de couleurs d'une folle gaieté, une construction faite pour piéger la lumière, une résille de verticales et d'horizontales dans laquelle elle inscrit ses émotions de l'heure. Dans tout cela pourtant, rien n'est gratuit, tout est pensé. » - Françoise de Perthuis[5]
« L'abstraction instinctive de ses toiles et de ses gouaches rappelle parfois celle de Roger Bissière par la délicatesse et la vigueur des relations de couleurs claires. » - Gérald Schurr[6]
« La peinture d'Anita de Caro évoque des paysages, parfois citadins, d'où l'homme est exclu. Malgré ces évocations, son œuvre demeure abstraite et est structurée par un graphisme léger dont les traits peu appuyés sont comme absorbés par la couleur. Celle-ci est parfois traitée en touches parallèles, un peu à la manière impressionniste mélangeant les tons dissonants aux dominantes rouges, bleues, mauves. D'autres fois, sa peinture reste dans des tons subtils de bleus, gris et verts. Enfin, Anita de Caro peut ajouter des éléments collés : fils, papiers déchirés, fragments de tissus, cartons ondulés. À travers ses toiles, Jacques Lassaigne voit "l'espace se creuser et s'animer, s'enrichir peu à peu sans jamais de surcharge par le simple jeu des graphismes et des rapports colorés". » - Dictionnaire Bénézit[7]
Emmanuel Bénézit, Dictionnaire des peintres, sculpteurs, dessinateurs et graveurs, vol.3, Gründ, 1999
Jean-Pierre Delarge, Dictionnaire des arts plastiques modernes et contemporains, Gründ, 2001 ; voir page 214
Roger Vieillard, Catalogue raisonné, Œuvre Gravé, 1934-1989, deux volumes (ouvrage dirigé par Anne Guérin avec la collaboration de Virginie Rault, essai de Dominique Tonneau-Ryckelynck, préface de Marc Fumaroli), éditions Somogy, Paris, 2003, 217 p. (ISBN2850564818)
Roger Vieillard, Anita de Caro, le trait et la couleur, par Anne Guérin, catalogue de l'exposition de la propriété Caillebotte de Yerres, au , éditions Gourcuff et Gradenigo, Ville de Yerres, 2008, 127 p. (ISBN9782353400454)
Anita de Caro - Roger Vieillard, catalogue de l'exposition, galerie municipale d'art contemporain, Chamalières, 2012