Marc FumaroliMarc Fumaroli
Tombe de Marc Fumaroli au cimetière du Père-Lachaise (division 57). Marc Fumaroli, né le à Marseille et mort le à Paris[1], est un critique littéraire, historien de l'art et de la littérature, et essayiste français[2]. Spécialiste du XVIIe siècle, il est professeur des universités à Paris-Sorbonne, titulaire d'une chaire « Rhétorique et société en Europe (XVIe – XVIIe siècles) » au Collège de France et membre de l'Académie française. Il est également connu pour ses prises de position concernant la politique culturelle de la France et l'art contemporain. BiographieJeunesse et formationMarc Fumaroli passe son enfance et son adolescence à Fès. Il effectue des études secondaires au lycée mixte de cette ville (où il obtient un baccalauréat ès lettres) et des études supérieures au lycée Thiers à Marseille, à l'université d'Aix-Marseille et à la Sorbonne[3]. En 1959, il est reçu à l'agrégation de lettres[4]. De à , il effectue son service militaire à l’école militaire interarmes de Coëtquidan et dans le VIe régiment d’artillerie à Colbert (aujourd'hui Aïn Oulmene), dans le Constantinois[5]. De à , il est pensionnaire de la Fondation Thiers. Enseignement et institutionsAssistant à la faculté des lettres de Lille de 1966 à 1969[6], puis chargé d'enseignement à l'université Lille III de 1969 à 1976[7], il devient docteur ès lettres[8] et maître de conférences à université Paris-Sorbonne en [9]. De 1978 à 1985, il est professeur à l'université Paris-Sorbonne[10]. En 1986, présenté par le poète Yves Bonnefoy et l'historien Jean Delumeau, il est élu professeur au Collège de France, chaire « Rhétorique et société en Europe (XVIe – XVIIe siècles) ». De 1992 à 1997, il est désigné par l'assemblée des professeurs du Collège de France pour être membre du conseil d'administration de la fondation Hugot du Collège de France. Il est élu à l'Académie française le au fauteuil 6, succédant à Eugène Ionesco (il y est reçu le par Jean-Denis Bredin[11]) et le , à l'Académie des inscriptions et belles-lettres au fauteuil laissé par Georges Duby[12]. En 1996, il est élu président de la Société des amis du Louvre. Il aura en charge l'organisation du centenaire de la Société (dons d'une grande peinture de David et d'un exceptionnel dessin de Watteau). Après être resté vingt ans à sa tête, il en quitte la présidence en . Son vice-président, Louis-Antoine Prat, le remplace. En 1997, il est Professor at large de l’université de Chicago au titre du Department of Romance Languages et du Committee on Social Thought. À partir de l'an 2000, il travaille avec ses collaborateurs Marianne Lion-Violet (CNRS) et Francesco Solinas (Collège de France) à la constitution d'un Institut consacré à l'étude de la République des Lettres, rattaché au CNRS sous la direction du professeur Antoine Compagnon. Cette même année, il est professeur invité au Conservatoire national des arts et métiers[13] et, depuis 2003, il est professeur émérite au Collège de France et fait partie de plusieurs commissions. Par arrêté du , Marc Fumaroli est nommé président de la Commission générale de terminologie et de néologie, en remplacement de Gabriel de Broglie, de l'Académie française, pour la durée du mandat restant à courir[14]. En mars 2008, il fait partie de la Commission de nomination au poste de directeur de la Villa Médicis, à Rome. En 2009, il est membre du Comité de parrainage de l'Institut régional du cinéma et de l'audiovisuel présidé par le réalisateur Magà Ettori. En , par le biais de l'Association française pour les arts qu'il a fondée et qu'il préside, il organise à la mairie du Ve arrondissement une exposition « Présence de la peinture en France, 1974-2016 », qui rend hommage à une série de peintres figuratifs contemporains, dont Sam Szafran[15], ainsi que de graveurs et de sculpteurs actuels, inscrits dans la tradition académique. Elle est présentée comme un plaidoyer pour réconcilier l'art et la beauté[16]. Il fut membre d'honneur de l'Observatoire du patrimoine religieux (OPR), une association multiconfessionnelle qui œuvre à la préservation et au rayonnement du patrimoine cultuel français. Jurys
Prises de positionPolitique culturelle de la FranceEn 1991, dans L'État culturel, dont le titre a été repris dans celui de l'ouvrage de Jacques Donzelot, L'État animateur, Marc Fumaroli développe une critique très ferme de la politique culturelle française qui s'enracinerait dans le régime de Vichy, à travers André Malraux, pour atteindre son apogée en Jack Lang. Pour Marc Fumaroli,
La politique culturelle doit viser à développer l'excellence et non s'égarer dans une « conception inflationniste »[19]. Dans ce même ouvrage, il insiste sur l'attachement des Français à la subvention des biens culturels. Cet attachement serait lié à une prise de position politique et économique : ne pas subventionner la culture serait admettre la victoire de l’« ultra-libéralisme », et serait le symbole de l’avènement de la fin du rayonnement et de la production culturelle française telle que nous la connaîtrions. Féminisation des noms de métiers en françaisEn 1998, alors que le gouvernement Jospin fait paraître une circulaire relative à la féminisation des noms de métiers en français, Marc Fumaroli rédige une tribune s'y opposant, « notairesse, mairesse, doctoresse, chefesse (…) riment fâcheusement avec fesse, borgnesse et drôlesse, n’évoquant la duchesse que de très loin. Tranchons entre recteuse, rectrice et rectale… » [20]. Art contemporainEn 2009, Marc Fumaroli publie une volumineuse étude, Paris-New York et retour, qui critique ce qu'il estime être les impostures de l'art contemporain. Il y dénonce le goût de la provocation et la surenchère dans la laideur, l'obscénité et le blasphème. Avec pour guide et point d'appui Baudelaire, il part à la recherche de ces mouvements qui ont à maintes reprises traversé l'Atlantique. Il rappelle que le précurseur a été un Français, Marcel Duchamp, installé aux États-Unis et promoteur des ready-made[21], au moment où, à Paris, fleurissaient les mouvements dadaïste et surréaliste qui auront des conséquences si importantes sur les arts plastiques. Après la Seconde Guerre mondiale, l'art abstrait (Rothko, Pollock, de Kooning) a vite été supplanté par le pop art, dont l'artiste phare, Andy Warhol, est venu chercher une certaine forme de consécration à Paris[22]. Par la suite, l'art contemporain a connu ce qu'il appelle une barnumisation[23], avec comme animateur principal Jeff Koons, très habile dans le marketing et adepte de grands défilés à travers New York. Marc Fumaroli rédige quelques pages féroces sur ces artistes et sur leur collègue britannique Damien Hirst, qui n'avait pas prévu que son requin dans le formol se décomposerait[24] ! Quant au mouvement de spéculation qui s'est emparé de ces productions, habilement entretenu par de grands galeristes, il semble éprouver un malin plaisir à contempler ces collectionneurs qui engloutissent des fortunes dans l'achat d'œuvres improbables, dont on n'a aucune certitude qu'elles pourront affronter sans dommage l'épreuve du temps. L'évolution de la relation entre art et religion est hautement significative pour Marc Fumaroli. Le renouveau impulsé par les fondateurs de la revue L'Art sacré, Marie-Alain Couturier et Pie Raymond Régamey, a permis de faire appel à des peintres abstraits capables d'atteindre à une grande spiritualité, comme Jean Bazaine et Alfred Manessier[25]. Mais les avatars de l'art contemporain se sont emparés de cette relation dans un sens diamétralement opposé car ils ont compris que le scandale faisait parler de soi et donc vendre. À l'origine de cette prise de conscience, Marc Fumaroli voit le rôle joué en Grande-Bretagne par les tabloïds qui ont fait bondir la cote des Young British Artists, promus par le publicitaire Charles Saatchi[26]. En effet, chacun des scandales initiés par ces artistes, tels que les cadavres éventrés dans du formol de Damien Hirst, était du pain bénit pour ces journaux en mal de sensationnel, et en retour assurait la notoriété des artistes en cause. Dans le milieu des collectionneurs, il est vite devenu de bon ton d'accepter cette forme d'art :
Vue par ces artistes, la religion devient prétexte à des performances d'automutilation voulant rappeler les stigmates, tel Michel Journiac[28], et à des représentations blasphématoires comme le Piss Christ d'Andres Serrano. Tous ces développements sont repris dans l'exposition « Traces du sacré » à Beaubourg en 2008, vaste panorama dont sont pourtant exclus les artistes que promouvait la revue L'Art sacré[29]. Il regrette également que la France ait cru devoir encourager, voire chercher à imposer cette forme d'art, en se lançant dans une sorte de concurrence avec les États-Unis au risque de perdre ses valeurs[30] et en contradiction même avec le principe d'exception française défendu par le ministère[31]. À ce titre, il remarque qu'à Paris comme à New York, de grands musées classiques ont cru opportun de faire une place à des spécialistes de la provocation tels que Damien Hirst au Met et Jan Fabre au Louvre[32], et s'interroge sur les raisons de ces choix : désir de faire du « buzz » et d'attirer ainsi de nouveaux visiteurs, pressions des galeristes qui veulent faire monter la cote de leurs poulains ou, en France, intervention du ministère ? Parmi les nombreuses analyses du livre parues en France et à l'étranger, on peut citer celle de Jean d'Ormesson dans Le Figaro[33], celle de Jean-Louis Jeannelle dans Le Monde[34], qui, en tant que spécialiste de André Malraux, reproche à Marc Fumaroli son hostilité de principe à l'égard du ministre, ou celle, plus critique, du Magazine littéraire[35]. Ce dernier regrette en particulier que les développements manquent au distinguo effectué par l'auteur entre cet art contemporain et les artistes véritables, alors que c'est un élément clé[36]. Enseignement du latin et du grecEn 2015, Marc Fumaroli prend position contre la nouvelle réforme du collège présentée par la ministre de l'Éducation nationale Najat Vallaud-Belkacem, notamment pour ses effets concernant l'enseignement du latin et du grec, victimes, selon lui, du « fanatisme égalitariste »[37]. Publications
DistinctionsPrix
Société savantesMarc Fumaroli fut membre de sociétés et d'académies :
HonneursPlusieurs universités l'ont fait docteur honoris causa : DécorationsFrançaisesÉtrangères
Notes et références
Voir aussiBibliographie
Liens externes
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