Guan Moye naît au sein d'une famille paysanne du Shandong. De 1959 à 1961, sa famille connaît la faim en raison du Grand Bond en avant.
En 1966, pendant la Révolution culturelle, il est classé parmi les « mauvais éléments » et renvoyé de l'école.[réf. nécessaire] Sa famille vit dans une grande pauvreté durant cette période[7].
Son origine paysanne, à propos de laquelle il évoque le rôle joué par les histoires racontées par sa grand-mère, et son éducation au sein de l'armée tranchent avec celles de nombreux autres écrivains, imprégnés de la lecture des grands romans classiques[5].
Ses parents lui ont appris, par prudence, à éviter de parler à l'extérieur. C'est la raison du choix de son pseudonyme, Mo Yan, « Celui qui ne parle pas »[8].
En 1981, il publie, sous son nom de plume, sa première nouvelle, Radis de cristal. Sa reconnaissance est immédiate, mais ce n’est qu’avec Le Clan du sorgho, qui est porté à l'écran sous le nom Le Sorgho rouge par Zhang Yimou en 1986, qu'il atteint sa notoriété actuelle.
Mo Yan démissionne de l'armée en 1999, où il travaillait jusque-là au département de la culture[5].
Le prix Nobel de littérature lui est attribué en 2012, pour son œuvre « qui [selon l'Académie suédoise] avec un réalisme hallucinatoire unit conte, histoire et le contemporain[9],[10]. »
Œuvres
Son œuvre se rattache au mouvement de la « Quête des racines[6] ». Elle évoque l'histoire de sa province natale, le Shandong, d'un point de vue historique, avec Le Clan du sorgho (1986), politique, avec La Mélopée de l'ail paradisiaque (1988), ou ethnologique. L'autobiographie y occupe une part importante. Sur le plan formel, son écriture réaliste ne dédaigne pas de faire appel à l'humour, comme avec Les Treize Pas(en) (1989), ou au fantastique[5]. Sa prédilection pour les personnages marginaux, ses descriptions s'attachant aux détails l'ont fait comparer en Chine à William Faulkner[4].
Le Pays de l'alcool, écrit après les événements de 1989, a pour but la dénonciation de la corruption des hauts cadres. Beaux seins, belles fesses (1995) est, comme Le Clan du sorgho, une saga familiale, qui a reçu le prix décerné par la revue Dajia en 1996, après avoir été censuré[11].
Son roman Wa (Grenouilles) dénonce les excès de la politique chinoise de l'enfant unique : « Chaque bébé est unique. Il ne peut pas être remplacé. Des mains ensanglantées pourront-elles jamais être nettoyées ? L'âme ravagée par la culpabilité ne pourra-t-elle jamais devenir libre ? » - (extrait de Wa). Lors d'une interview en 2010 auprès de la chaîne Phoenix TV basée à Hong Kong, il reconnaissait que son livre pouvait sembler sujet à controverses, mais que le sujet lui était profondément personnel : cela avait obligé sa femme à avorter de son deuxième enfant.
C'est un des écrivains les plus réputés en Chine et à l'étranger aujourd'hui. Son style se caractérise par son traitement très libre de thèmes comme le sexe, le pouvoir, la politique décrivant sans détours mais non sans humour les méandres psychiques et physiques de la Chine contemporaine. Son intelligence et son interprétation de la Chine contemporaine expliquent sans doute pourquoi il n'a jamais été encore censuré — à l'exception de certains passages lors des premières éditions de Beaux seins, belles fesses.
Critiques
L'écrivain chinois Ma Jian a déploré le manque de solidarité et d'engagement de Mo Yan vis-a-vis des autres écrivains et intellectuels chinois réprimés et/ou mis en détention en violation de la liberté d'expression reconnue par la Constitution[12],[13].
Le , l'écrivain et dissident chinois Liao Yiwu passe une nuit dans la prison de Stockholm où il entendait protester à la suite de la remise du prix Nobel de littérature à Mo Yan dont il dénonce l'ambiguïté envers le système de censure et d’oppression en Chine[14],[15].
Liste des œuvres
Quelque quatre-vingts romans, essais et nouvelles composent son œuvre.
1984 : Touming de hong luobo (透明的红萝卜 / 透明的紅蘿蔔, tòumíng de hóng luóbo) — Le Radis de cristal, traduit par Pascale Wei-Guinot et Wei Xiaoping, Paris, Philippe Picquier, 1993
1993 : Jiu Guo (酒国 / 酒國, jiǔ guó) — Le Pays de l'alcool, traduit par Noël et Liliane Dutrait, Paris, Seuil, 2000 - Prix Laure-Bataillon 2000 de la meilleure œuvre de fiction traduite en français
La Carte au Trésor, (藏宝图, Cangbao tu), traduit par Antoine Ferragne, Paris, Philippe Picquier, 2004
Enfant de fer, traduit par Chantal Chen-Andro, Paris, Le Seuil, 2004
La Joie (Huānlè / 歡樂), traduit par Marie Laureillard, Paris, Philippe Picquier, 2007 ; édition revue et corrigée par Marie Laureillard, Points no P4095, 2015
La Dure Loi du karma(en), (生死疲劳 / 生死疲勞, Shēngsǐ píláo), 2006 ; traduit par Chantal Chen-Andro, Paris, Seuil, 2009
La Belle à dos d’âne dans l’avenue de Chang’atraduit par Marie Laureillard, Paris, Philippe Picquier, 2011
Le Veau suivi de Le Coureur de fond, traduit par François Sastourné, Paris, Seuil, 2012
Au pays des conteurs. Discours du Prix Nobel de littérature 2012, traduit par Chantal Chen-Andro, Paris, Seuil, 2013
Le Grand Chambard, traduit par Chantal Chen-Andro, Paris, Seuil, 2013
Enfant de fer, traduit par Chantal Chen-Andro, Paris, Seuil, coll. « Points », 2013
Dépasser le pays natal, traduit par Chantal Chen-Andro, Paris, Le Seuil, coll. « Essais littéraires », 2015
Professeur singe, traduit par François Sastourné, Paris, Le Seuil, 2015 suivi de Le Bébé aux cheveux d'or, traduit par Chantal Chen-Andro, Paris, Seuil, 2015
Le Clan des chiqueurs de paille (食草家族, Shi cao jia zu ), traduit par Chantal Chen-Andro, Paris, Seuil, 2016
Les Retrouvailles des compagnons d'armes (战友重逢, Zhan you chong feng), traduit par Noël Dutrait, Paris, Seuil, 2017
Chien blanc et balançoire, traduit par Chantal Chen-Andro, Paris, Seuil, 2017
« Mo Yan », de Zhang Yimou, épisode de la série documentaire Arena(en), BBC, 1993.
Liens externes
(en) Autobiographie sur le site de la fondation Nobel (le bandeau sur la page comprend plusieurs liens relatifs à la remise du prix, dont un document rédigé par la personne lauréate — le Nobel Lecture — qui détaille ses apports)