La famille Perier est une famille de banquiers et d'industriels originaires du Dauphiné, dont plusieurs membres ont exercé d'importantes responsabilités politiques.
En hommage à Casimir-Pierre Perier (1777-1832), président du Conseil en 1831-1832, ses fils adoptèrent le patronyme de Casimir-Perier.
En 1870, il se distingue au combat en tant que capitaine de la 4e compagnie au 1er bataillon des mobiles de l'Aube, équipé à ses frais. Lors du combat de Bagneux le , il porte dans ses bras la dépouille de son commandant, Anne Marie André Henry Picot de Dampierre, afin de le ramener dans les lignes françaises[2]. Il est cité à l'ordre de l'armée et fait chevalier de la Légion d'honneur[3].
Mariage et enfants
Il épouse à Paris, 7e arrondissement, le , sa cousine Hélène Perier-Vitet (Paris, 5 septembre 1854 - Paris 16e, 3 mars 1912), avec qui il a deux enfants, l'un et l'autre sans postérité[4] :
Il entre dans la vie publique comme secrétaire de son père, ministre de l'Intérieur dans le ministère Thiers.
En 1874, il est élu conseiller général de l'Aube, et envoyé par ce département à la Chambre des députés lors des élections législatives de 1876 et il est toujours réélu jusqu’à ce qu’il devienne président de la République. Malgré les traditions de sa famille, il rejoint le groupe des Républicains de gauche et est un des 363 qui s’opposent au Seize-Mai (1877). Il refuse de voter l'expulsion des princes en 1883 et démissionne comme député quand la loi est promulguée, à cause de ses liens personnels avec la famille d'Orléans.
Le il devient sous-secrétaire d'État à la Guerre, poste qu'il occupe jusqu'au dans le gouvernement de Jules Ferry. De 1890 à 1892, il est vice-président de la Chambre, tout en présidant la commission des Finances. En 1893, il accède au « perchoir », c'est-à-dire à la présidence de la Chambre.
Sur le plan diplomatique, c'est sous Casimir-Perier qu'est signée le l'Alliance franco-russe qui reste un temps secrète.
Le , Spuller appelle dans un discours à la Chambre à la tolérance dans les affaires religieuses. Pour Casimir-Perier ces dernières doivent être examinées dans un « esprit nouveau ». Gestes envers les ralliés, ces déclarations suscitent surtout l'émoi des anticléricaux qui accusent le président du Conseil de « pactiser avec l'ennemi ».
Le cabinet se retrouve alors fragilisé. Lorsque le ministre des Travaux publicsCharles Jonnart refuse d'accorder la liberté syndicale aux employés des chemins de fer, la Chambre refuse de voter l'ordre du jour et Casimir-Perier remet sa démission le .
Président de la République
Casimir-Perier ne reste pas longtemps inactif puisqu'il retrouve aussitôt la présidence de la Chambre. Le , le président Carnot est assassiné à Lyon. Casimir-Perier apparaît comme un successeur plausible du président défunt, qui le considérait d'ailleurs comme son héritier. Mais il se montre très réticent à poser sa candidature, craignant le rôle de représentation qu'on lui ferait jouer à l'Élysée. Il se laisse finalement convaincre[5]. Le , soutenu par la droite, il est élu président de la République par 451 voix contre 195 pour Henri Brisson et 97 pour Charles Dupuy. Cette élection est loin de le satisfaire, d'autant qu'il est très vite considéré par les radicaux et les socialistes comme le « président de la réaction ».
Il devient immédiatement une des cibles favorites de la gauche, qui l'exècre pour son appartenance à la haute bourgeoisie et de par l’anoblissement de son aïeul Claude Perier, moqué par Jean Jaurès. Propriétaire de la majeure partie des actions des mines d'Anzin, il est surnommé « Casimir d'Anzin »[6]. Les campagnes de presse hostiles se multiplient, tout comme les procès pour offense au chef de l'État : le plus célèbre est celui où le journaliste Gérault-Richard est défendu par Jaurès qui, dans sa plaidoirie, dresse un véritable réquisitoire contre Casimir-Perier et sa politique[7].
Très vite, il prend conscience du faible rôle réservé au président par la Constitution de la Troisième République et le déplore. Il tente d'intervenir dans la politique du gouvernement, ce que ni sa fonction ni sa popularité ne lui permettent. Il est tenu à l'écart des affaires étrangères, jusqu'alors domaine réservé au président. Sa grande impopularité ne lui permet pas de réagir. Marginalisé par le président du Conseil Charles Dupuy, il sombre dans l'abattement. Regrettant de s'être présenté, il attend le premier prétexte pour démissionner[8].
De fait, sa présidence ne durera que six mois. La démission du ministère Dupuy le est suivie de la sienne dès le lendemain. Il l'explique par le fait qu'il se sent ignoré des ministres, qui ne le consultent pas avant de prendre leurs décisions et ne l’informent pas des événements politiques, surtout dans le domaine des affaires étrangères. Dans le message qu'il adresse aux Chambres, il explique que sa retraite est motivée par l'attitude de la majorité, qui ne lui a pas prêté le concours sur lequel il était en droit de compter.
Je ne me suis jamais dissimulé les difficultés de la tâche que l'Assemblée nationale m'a imposée. Je les avais prévues.
Si on ne refuse pas un poste au moment du danger, on ne conserve une dignité qu'avec la conviction de servir son pays.
La présidence de la République, dépourvue de moyens d'action et de contrôle, ne peut puiser qu'en la confiance de la nation la force morale sans laquelle elle n'est rien. Ce n'est ni du bon sens ni de la justice de la France que je doute ; mais on a réussi à égarer l'opinion publique : plus de vingt années de luttes pour la même cause, plus de vingt années d'attachement à la République, de dévouement à la démocratie, n'ont suffi ni à convaincre tous les républicains de la sincérité et de l'ardeur de ma foi politique, ni à désabuser des adversaires qui croient ou affectent de croire que je me ferai l'instrument de leurs passions et de leurs espérances.
Depuis six mois se poursuit une campagne de diffamation et d'injures contre l'armée, la magistrature, le Parlement, le chef irresponsable de l'État, et cette liberté de souffler les haines sociales continue à être appelée liberté de penser.
Le respect et l'ambition que j'ai pour mon pays, ne me permettent pas d'admettre qu'on puisse insulter chaque jour les meilleurs serviteurs de la patrie et celui qui la représente aux yeux de l'étranger.
Je ne me résigne pas à comparer le poids des responsabilités morales qui pèsent sur moi et l'impuissance à laquelle je suis condamné.
Peut-être me comprendra-t-on si j'affirme que les fictions constitutionnelles ne peuvent faire taire les exigences de la conscience politique : peut-être, en me démettant de mes fonctions, aurai-je tracé leur devoir à ceux qui ont le souci de la dignité du pouvoir et du bon renom de la France dans le monde.
Invariablement fidèle à moi-même, je demeure convaincu que les réformes ne se feront qu'avec le concours actif d'un Gouvernement résolu à assurer le respect des lois, à se faire obéir de ses subordonnés et à les grouper tous dans une action commune pour une œuvre commune.
J'ai foi, malgré les tristesses de l'heure présente, dans un avenir de progrès et de justice sociale.
Je dépose sur le bureau du Sénat et de la Chambre des députés ma démission des fonctions de président de la République française.
Casimir-Perier
Élu président de la République à l’âge de 46 ans, il est le troisième plus jeune président de l'histoire (après Louis-Napoléon Bonaparte en 1848 et Emmanuel Macron en 2017)[10]. Il détient aussi le record du mandat de président de la République française le plus court, toutes républiques confondues, soit 6 mois et 20 jours.
Dernières années et mort
À partir de ce moment, Casimir-Perier abandonne complètement la politique. Il se consacre aux affaires et, surtout, à l'exploitation minière. Lors du procès d’Alfred Dreyfus à Rennes, son témoignage, opposé à celui du général Mercier, est très utile à la cause de l’accusé. En 1899, en pleine crise politique, le président Loubet lui propose la présidence du Conseil, qu'il refuse.
Il meurt dans sa soixantième année en 1907, des suites d'une angine de poitrine. Il ne reçut pas d'obsèques nationales, en vertu de ses dernières volontés.
↑Le patronyme Perier désigne celui « qui est originaire de Perier, de Périer, de Perrier », nom de beaucoup de localités et de lieux-dits. Très répandu, le nom de famille est notamment porté en Rhône-Alpes et en Limousin. Le toponyme Périer désigne lui-même un tas de pierres, une carrière, et dérive du mot pierre, du latinpetra : pierre, caillou (Sources : Geneanet).
Références
↑« Élection du nouveau président de la République », Le Petit Parisien, (lire en ligne)
↑André Lebon, L'Année politique, Volumes 21 à 22, Paris, Charpentier et Cie, .
↑Arnaud Folch, Guillaume Perrault, Les Présidents de la République pour les nuls, Éditions générales First, 2011, p. 236.
Voir aussi
Bibliographie
Yvert Benoît (dir.), Premiers ministres et présidents du Conseil. Histoire et dictionnaire raisonné des chefs du gouvernement en France (1815-2007, Paris, Perrin, , 916 p.
Jean-Paul Ollivier, Président de la République, Les 22 chefs d'État français, 1848-2002, Paris,, Reader's Digest, , 208 p.
Serge Berstein, Chef de l'État : L'histoire vivante des 22 présidents à l'épreuve du pouvoir, Paris, Armand Colin, , 272 p.