Les réalisations de Roger Corman sont majoritairement à classer dans la série B. Il a un principe simple : un budget très faible, un salaire de misère, un sujet avec de l'action et une assez grande liberté pourvu que le budget ne soit pas dépassé. Finalement, ses films sont plus ou moins bâclés (fautes de raccords, micros dans le champ...), réalisés en moins de cinq jours, voire deux. Parmi ses réussites les plus relevées par la critique, on retrouve La Petite Boutique des horreurs, comédie horrifique avec une plante carnivore parlante. Il s'essaye à de nombreux genres tel que le film de gangster Mitraillette Kelly, avec Charles Bronson en tueur, ou The Intruder[2].
Son cycle Edgar Poe, dans une veine fantastique, donne à Corman ses lettres de noblesse, et contribue à sa réputation en Europe. Pour la circonstance, il s'entoure d'une équipe de fidèles : l'écrivain Richard Matheson ainsi que Charles Beaumont et Charles Griffith travaillent aux scénarios. Floyd Crosby, ancien opérateur de Friedrich Murnau, est de la partie. Pour les acteurs, Vincent Price est la star de ce cycle, Peter Lorre, Leo Gordon, Boris Karloff et Basil Rathbone sont sollicités. Les histoires se déroulent dans de superbes décors de studio très colorés : manoirs hantés, paysages fantastiques, marécages envahis de brouillard, etc. La mise en scène est plus soignée que d'habitude, et Roger Corman, qui a œuvré pour un certain cinéma psychédélique (The Trip), affectionne les effets oniriques. La Chute de la maison Usher inaugure le cycle, suivi par Le Masque de la mort rouge, L'Empire de la terreur et La Chambre des tortures qui rendent parfaitement l'atmosphère de Poe. Le Corbeau transforme le poème original en une comédie burlesque, avec Price, Karloff, Lorre et le jeune Jack Nicholson, et s'achève par un duel de sorcellerie. La Malédiction d'Arkham est inspiré par Lovecraft. Ces films possèdent une certaine analogie avec les productions Hammer (Terence Fisher), mais avec un goût prononcé pour le théâtral et une mise en scène presque expressionniste[2].
Le cycle Edgar Poe a une influence notable sur Tim Burton, notamment sur Sleepy Hollow et ses décors fantastiques. Tim Burton est d'ailleurs un grand fan de l'acteur Vincent Price.
↑(en) Chris Barsanti, The Sci-Fi Movie Guide : The Universe of Film from Alien to Zardoz, Visible Ink Press, , 528 p. (ISBN978-1-57859-533-4, lire en ligne), p. 419.
Daniel Bastié, Edgar Allan Poe revisité par le cinéma de Roger Corman, Bruxelles, Éditions Ménadès, 2020, 283 p.
Guillaume Foresti, Corman, Lovecraft, la rencontre fantastique, éditions Dreamland, 2002, préface de John Carpenter.
Nathan Lagadec, « Les adaptations cinématographiques des récits littéraires d'Edgar Poe par Roger Corman : vers une définition de la fidélité latente à travers La Chute de la maison Usher, L'Enterré vivant, La Malédiction d'Arkham et Le Masque de la mort rouge », Sciences de l'Homme et Société, 2019 lire en ligne