Il fut d’abord appelé « Parc national des Montrougiens »[2].
Haussmann décide de sa construction en 1860, et confie sa réalisation à l'ingénieurAlphand. Comme les Buttes-Chaumont, le site choisi se situe sur d'anciennes carrières désaffectées, ici celles de Montsouris, ce qui posa quelques problèmes.
L’endroit est ainsi décrit : « C’était un véritable désert, une sorte de morceau de Far-West encastré dans Paris et d’assez mauvais renom… Les habitants du quartier prétendaient qu’il n’était pas prudent de s’aventurer dans les parages de la Fosse aux Lions et l’on racontait à ce sujet des histoires lugubres bien capables d’impressionner les braves Montrougiens »[2].
Une première difficulté technique est d'aménager le parc au-dessus de ces anciennes carrières, qu'il faut préalablement consolider. Véritablement mis en chantier en 1867, les travaux dureront jusqu'en 1878. Quatre carrières, vingt-quatre maisons, des jardins, une pépinière, et le prolongement du chemin des Prêtres d’Arcueil furent supprimés[3]. À la demande des habitants, le parc est partiellement ouvert en 1867[4]. Le parc est malgré tout inauguré en 1869. Le lac artificiel était alimenté à l'époque par l'aqueduc d'Arcueil. Une légende veut que le jour de l'inauguration, le lac artificiel se soit vidé et qu'un ingénieur qui avait supervisé sa construction se soit suicidé[5]. Il semble que le lac se soit effectivement vidé une nuit de [6].
La terre végétale retirée lors des travaux pour la construction du réservoir de Montsouris a été utilisée pour l’aménagement du parc[7].
La construction de la ligne de Ceinture sud (pas encore « petite » puisque la « grande » n'existait pas) est réalisée en tranchée, conjointement avec l'aménagement du parc en 1866-1867. Cette tranchée, dite tranchée Alphand est même citée dans le monde entier comme modèle d'intégration paysagère. Quant à la ligne de Sceaux, qui est à l'origine en surface, elle est mise en tranchée au début des années 1930-1931 et sera incorporée en 1977 dans le réseau express régional (RER ligne B).
Le , une statue en bronze du révolutionnaire Jean-Paul Marat est installée sur la pelouse du parc mais sera enlevée dès l'année 1891 sur ordre du préfet. Elle sera par la suite installée dans le parc des Buttes-Chaumont et y restera jusqu'à la Seconde Guerre mondiale où elle est fondue[8]. Grâce à un plâtre d'origine retrouvé, une nouvelle statue a été refaite en 2012 et trône depuis à l'entrée du musée de la Révolution française à Vizille.
Autrefois parc de prédilection du centre hospitalier Sainte-Anne, ce parc n'est désormais plus accessible aux patients de l'hôpital, qui bénéficient d'un parc fermé dans l'hôpital même.
Le parc Montsouris est aujourd'hui un jardin public entretenu par le service des espaces verts de la Ville de Paris. Il est bordé au nord par l'avenue Reille (trois entrées), à l'est par la rue Gazan (deux entrées), au sud par le boulevard Jourdan (deux entrées) et à l'ouest par la rue Nansouty (une entrée).
La Seconde Guerre mondiale y fait au moins une victime : le soldat Pierre Durand y meurt, victime d'une bombe (une stèle commémore ce fait à proximité du lac).
Bâtiments et constructions remarquables
Kiosque
Construit pour l’Exposition internationale d'Électricité de 1881, le kiosque est remonté dans le parc en 1884. D’abord prévu pour abriter les promeneurs, il est transformé en kiosque à musique en 1884[4].
Prévu à l'origine pour servir de logement au personnel de l'Observatoire chargé de l'étude et du climat parisien, il eut à souffrir du siège de Paris en 1870 puis de la Commune en 1871.
Après restauration on le transforma pour en faire un observatoire météorologique dirigé jusqu'en 1886 par Marié-Davy. Puis il fut doté d'un service consacré à l'étude des eaux et des cimetières de Paris et de la plaine de Gennevilliers, irriguée par les égouts. À partir de 1893, il abrita également un service des analyses chimiques et bactériologiques de l'air de la capitale.
En 1974, il fut définitivement évacué et laissé à l'abandon.
Se dégradant rapidement, et nécessitant une restauration, il fut racheté pour une somme symbolique par le gouvernement tunisien qui se chargea de le rénover. Il était aussi inscrit à l’inventaire des monuments historiques et était en cours de réhabilitation. La mairie de Paris venait d’affecter 15 millions de francs pour restaurer ce monument original quand il brûla entièrement le .
Conçue pour orner la colonne du square d’Anvers, Jules Coutan réalisa cette statue en 1888. Déposée en 1968, elle est réinstallée au parc Montsouris en 1984[12].
Vestiges de l'observatoire de la Marine puis du Bureau des longitudes
Façade côté parc de l'ancien pavillon de l'administration de l'Observatoire du bureau des Longitudes et de la Marine, siège de l'Association française d'astronomie (AFA) depuis 1983.
Ancienne « cabane du grand équatorial » de l'Observatoire du Bureau des Longitudes.
En 1875, le capitaine de vaisseauMouchez, membre du Bureau des longitudes depuis 1873, fait approuver son projet d'un observatoire chargé de compléter les connaissances astronomiques des officiers issus de l'École navale. Le projet est appuyé par Hervé Faye (1814-1902), président du Bureau des longitudes, plusieurs institutions et ministères, la Marine, l'Instruction publique, le département de la Guerre, et surtout la Ville de Paris, qui assurera pratiquement à elle seule le fonctionnement de l'observatoire, quand, en 1900, la Marine se désengagera du fonctionnement de cet observatoire.
Entre 1875 et 1910, l'observatoire est dirigé essentiellement par des officiers de Marine ayant tous évolué dans le cercle des amis proches de Mouchez. Ce dernier sera devenu entre-temps, en 1878, le premier marin directeur de l'Observatoire de Paris.
Les directeurs seront successivement Mouchez, son ancien second, Frédéric Turquet de Beauregard, l'amiral Charles de Poidloué, l'amiral Georges-Ernest Fleuriais, le capitaine de vaisseau Octave de Bernardières (qui prendra ensuite le commandement de l'École navale à Brest), le capitaine Émile Boistel, puis le commandant Émile Guyou. Quelques intérims seront assurés par des membres du Bureau des longitudes et de l'Observatoire, tels Félix Tisserand ou Maurice Lœwy.
L'observatoire voit passer un public plus large que les officiers de Marine : des voyageurs et explorateurs (dont le lieutenant de vaisseau Matha, de la première expédition Charcot de 1904-1905), la mission saharienne Flatters, le docteur Jules Crevaux, explorateur de l'Amazonie ; le futur directeur de l'observatoire de Tōkyō, nombre d'officiers de l'infanterie, des ingénieurs français et étrangers, des étudiants, venus s'entraîner aux observations astronomiques, régler et utiliser des instruments astronomiques (cercles méridiens, instruments nautiques).
À l'observatoire de Montsouris, des essais seront faits sur des pendules et chronomètres utilisant un tout nouvel alliage à dilatation presque nulle, l'Invar.
Après 1905, l'observatoire vit comme il peut avec peu de subventions. Il devient un lieu de stockage des archives du Bureau des longitudes.
En 1872 fut fondé l'observatoire météorologique de Montsouris par Charles Sainte-Claire Deville et Émilien Renou[13]. C’est la plus ancienne station météorologique de France[14].
En 1896, l'observatoire de la tour Saint-Jacques lui fut affecté. En 1947, une tour de relevé a été construite.
Cette station enregistre sans interruption les paramètres météorologiques depuis , ce qui constitue l'une des plus anciennes bases de données complètes disponibles en France sur le climat. Elle a été reconnue « Station d'observation centenaire » par l'Organisation météorologique mondiale[15]. En 2022 seules sept stations ont ce statut en France, et celle de Montsouris a la plus longue série de mesures[16].
Depuis l'abandon du palais Bardo, des locaux ont été construits et mis à la disposition du personnel en 1973. Depuis 2011, le personnel de ce centre moderne, qui réalisait la prévision pour Paris et la petite couronne[17], a déménagé au nouveau siège de Saint-Mandé[18]. Les capteurs, qui font la particularité du site de Montsouris, restent cependant sur place, leurs données sont recueillies par transmission régulière toutes les 6 minutes.
Climat
Le parc abrite, depuis 1873, l'une des stations de relevés météorologiques d'Île-de-France et la principale de Paris[19]. Paris-Montsouris a un climat de type Cfb (océanique) avec comme record de chaleur 42,6 °C le et comme record de froid −23,9 °C le . La température moyenne annuelle (1971-2000) est de 12,1 °C.
Le méridien de Paris traverse le parc Montsouris. Une stèle, mire sud du méridien de Paris, matérialise approximativement son emplacement. En effet, la mire servait à calibrer l'alignement nord-sud d'instruments (quart de cercle et lunette méridienne) ; ces instruments n'étaient pas placés exactement sur le méridien mais installés dans l'aile est de l'Observatoire de Paris. Par conséquent, la mire a été installée dans le parc en tenant compte de ce décalage.
Achevée en 1806, cette œuvre de Vaudoyer, haute de quatre mètres, est appelée la « mire du Sud », ou « mire de l'Observatoire », car elle était placée à l'origine dans le jardin de l'Observatoire de Paris. Sur la stèle, désormais classée, on peut lire l'inscription suivante :
« DU REGNE DE… [le nom de Napoléon a été gratté] MIRE DE L'OBSERVATOIRE - MDCCCVI »
Pour la célébration du bicentenaire de la naissance de François Arago, Jan Dibbets remporte le concours de l'Hommage à Arago. Entre 1989 et 1994, cent trente-cinq médaillons sont placés le long du méridien de Paris par l'artiste, dont neuf dans le parc entre l'avenue Reille et le boulevard Jourdan.
La ligne du méridien de Paris tracée dans le parc par les médaillons de l'Hommage à Arago montre que la mire du Sud n'est pas exactement sur cette ligne.
La ligne B du RER traverse le parc Montsouris. La gare de Cité universitaire, construite en 1930, a remplacé l'ancienne station de Sceaux-Ceinture ouverte le . Son accès se fait exclusivement par le boulevard Jourdan.
La traversée du parc par la ligne se fait pour partie en remblai, pour partie en tranchée à ciel ouvert. Deux ponts permettent aux piétons de passer d'une partie du parc à l'autre.
Depuis 2006, la gare est également desservie par la station Cité Universitaire de la ligne de tramway T3a.
Ligne de Petite Ceinture
La ligne de Petite Ceinture, voie de chemin de fer, fermée au service régulier des trains de voyageurs depuis 1934, passe par le parc Montsouris. C'est d'abord une tranchée de 150 mètres[21] qui sort du tunnel passant sous la rue Gazan. Puis la voie emprunte un tunnel d'un kilomètre est-ouest qui passe sous le parc.
Longtemps restée ouverte au trafic régulier des marchandises (desserte des entrepôts des Gobelins et des abattoirs de Vaugirard notamment, ainsi qu'au transit de trains d'autos des usines Citroën de Javel vers le sud-est et le sud-ouest, ainsi qu'occasionnellement aux trains spéciaux (COPEF notamment) jusqu'en 1993. En 2017, bien que de fait interrompue (avenue de France notamment), elle n'a jamais été déclassée.
La gare Parc de Montsouris se situait en bordure est de la rue de l'Amiral-Mouchez[22], et a été détruite lors de l'urbanisation de la partie ouest de la gare de la Glacière-Gentilly, au début des années 1980.
Lieux et observations remarquables
Ce parc calme et ombragé qui possède de nombreuses essences d'arbres, est aussi le refuge de plusieurs espèces d'oiseaux. Il est traversé par le sentier de grande randonnée GR1.
Arbres remarquables
Plus de 1 400 arbres sont plantés ici, dont la plupart centenaires. On peut y admirer notamment :
le parasol chinois dont les feuilles ressemblent à celles des érables. C'est un arbre rare, il se trouve près de l'esplanade du pavillon Bardo ;
à l'entrée nord du parc, un plaqueminier (qui donne un fruit appelé kaki), arbre exotique dont les feuilles se parent d'une couleur lie-de-vin à l'automne ;
C'est aussi, depuis plusieurs années, pendant le mois d'août, un des sites de projection de la mairie de Paris pour son animation culturelle Cinéma au clair de lune.
Chanson
En 1988, Jacques Higelin écrit et interprète une chanson intitulée Parc Montsouris, consacrée au parc éponyme, dans l'album Tombé du ciel :
Le parc Montsouris c’est le domaine
Où je promène mes anomalies…
Où j’me décrasse les antennes
Des mesquineries de la vie.
Des milliers et des milliers d'années
Ne sauraient suffire
Pour dire la petite seconde d'éternité
Où tu m'as embrassé
Où je t'ai embrassée
Un matin dans la lumière de l'hiver
Au parc Montsouris à Paris
À Paris
Sur la terre
La terre qui est un astre.
Jaya Ganga, le Gange et son double (Ramsay, 1985 ; Ginkgo éditeur, 2005) par Vijay Singh, écrivain, cinéaste et scénariste indien basé à Paris (né en 1952). L'action commence à Paris, principalement au parc Montsouris. Ce livre a été adapté au cinéma sous le titre Jaya, fille du Gange. Il est sorti en France en 1998.
Léo Malet, le « père » du détective Nestor Burma : Les Rats de Montsouris ; NMP-14e ()
Le roman de Robert Brasillach, Le Marchand d'oiseaux, est centré autour du parc Montsouris.
Le roman de Michel Audiard, La Nuit, le Jour et toutes les autres nuits, y fait longuement référence.
Le roman d'Ingo Grünewald, Montsouris, publié aux éditions Les Chantuseries, se déroule presque entièrement dans ce parc et l'interprète comme un lieu de symbolisme botanique.
Montsouris, de Louise Hervieu, édition Émile-Paul frères, 1928. Évocation par l’artiste peintre de son enfance au parc Montsouris et dans son quartier.
Le Parc Montsouris (poèmes), de Raymond Benoit, est un recueil de poèmes en alexandrins entièrement dédié au parc.
Le musée Carnavalet conserve deux tableaux du peintre Ludovic Vallée représentant le parc entre 1900 et 1914 : Le Parc Montsouris(P. 1990) et L'Après-midi au parc Montsouris (P. 2520).
↑Raymond Dartevelle et Françoise Hildesheimer, Les Archives. Aux sources de l'histoire des entreprises, Éditions de l'Epargne, , 143 p. (ISBN978-2-85015-268-9), p. 58, voir [1] (consulté le 13 novembre 2008).
↑Raymond Quesneau et Odile Cortinovis (éditrice scientifique) (postface Emmanuël Souchier), Connaissez-vous Paris ?, Gallimard, , 192 p. (ISBN978-2-07-044255-3), p. 17.
↑Léon Tesserenc de Bort, « Notice biographique sur M. Émilien-Jean Renou », Annuaire de la Société météorologique de France, Société météorologique de France, vol. 50, (lire en ligne, consulté le ).
Guy Boistel, 2010, L'Observatoire de la Marine et du Bureau des longitudes au parc Montsouris, 1875-1914, Paris, I.M.C.C.E./E-Dite (avec une préface de Nicole Capitaine, présidente du Bureau des longitudes) (ISBN978-2-846-08283-9) Lien IMCCE [3]. Émission sur France-Culture (podcast) « Astronomie amateur, la tête dans les étoiles », sur www.franceculture.fr, .
René-Léon Cottard, Vie et histoire du 14e arrondissement, Montparnasse, Parc de Montsouris, Petit Montrouge, Plaisance : histoire, anecdotes, célébrités, curiosités, monuments, musées, promenades, jardins, dictionnaire des rues, vie pratique, Paris, Hervas, , 155 p. (ISBN2-903118-34-5).
Sur l'observatoire de la Marine puis du Bureau des longitudes, créé en 1875 par l'amiral Ernest Mouchez : Guy Boistel, Instruire les marins avec les moyens du bord : l'observatoire de Montsouris, Les Génies de la Science (Pour la Science), no 28, août-, p. 28-33. [4]. PDF disponible sur demande auprès de l'auteur.
Pour l'œuvre de Jan Dibbets, Le Méridien de Paris. Une randonnée à travers l'Histoire, de Philip Freriks, EDP Sciences.